Eglises d'Asie

Le gouvernement décide de la création d’une maison d’édition religieuse déjà en activité

Publié le 18/03/2010




Le quotidien du Parti communiste vietnamien, le Nhân Dân, dans son édition du 1er juin 2001, annonce une décision gouvernementale créant une maison d’édition religieuse confiée à la responsabilité du Bureau des Affaires religieuses et destinée à “la publication de livres de prières, des œuvres d’enseignement catéchétique, aux œuvres culturelles purement religieuses des organisations religieuses autorisées par l’Etat ainsi que d’ouvrages au service de la propagande et de l’éducation concernant les lois, les options et la politique du Parti et de l’Etat en matière religieuse Cette décision a également été annoncée par une dépêche de vietnamienne d’information à la même date (1).

Cette annonce paraît étrange, car l’existence d’une maison d’édition de ce type avait été signalée au grand public depuis plus d’un an, en avril 2000. Dans une interview accordée à Catholicisme et nation (2), l’organe du Comité d’union du catholicisme à Hô Chi Minh-Ville, M. Pham Ngoc Châu, sans toutefois préciser la date exacte de sa création, avait déjà signalé l’existence d’une Maison des éditions religieuses, dont il s’était vu confier la responsabilité. Après avoir énuméré les décrets du ministère de la Culture et du Bureau des Affaires religieuses légitimant la naissance du nouvel établissement, le fonctionnaire en avait énuméré les objectifs, ceux-là mêmes qui ont été indiqués par le récent décret, à savoir la publication des deux catégories fort différentes de livres religieux : les livres de prières et d’enseignement religieux publiés par les religions et les livres sur la religion publiés par le Parti communiste et l’Etat. Dans les pages de la revue Catholicisme et nation contenant l’interview citée, on pouvait voir des fac-similés des couvertures d’un certain nombre d’ouvrages donnés comme déjà parus dans cette maison d’édition. On pouvait y reconnaître entre autres un livre de Mgr Bui Tuân, évêque de Long Xuyên, et du P. Ngô Phuc Hâu, auteur du Journal de Jésus. Selon M. Pham Ngoc Châu, en avril 2000, la maison d’édition aurait déjà fait paraître 120 titres de livres appartenant à la première catégorie. De nombreux livres canoniques devaient être publiés, en l’année 2000, les écritures bouddhistes, l’Ancien et le Nouveau Testaments, le Coran ainsi que les écrits prophétiques du fondateur du bouddhisme hoa hao, Huynh Phu So (3). A ce jour, aucun élément d’explication n’a été fourni qui puisse éclairer l’énigme de cette double annonce de création d’une maison d’édition religieuse.

Plusieurs fois dans un passé récent, dans les requêtes envoyées aux plus hautes autorités de l’Etat à l’issue de leurs réunions annuelles, les évêques du Vietnam avaient souhaité pouvoir créer et faire fonctionner, par eux-mêmes, une maison d’édition chargée de l’impression et de la diffusion des divers ouvrages religieux. Jamais cette autorisation ne leur a été accordée. Bien au contraire, dès 1993, la directive 379/TTG, publiée le 23 juillet 1993 (4), stipulait que “l’autorisation d’impression pour les livres religieux doit être donnée en conformité avec la loi sur les publications laquelle prévoyait à l’article 18 : “Les organes de gestion de l’Etat en matière de publication qui en ont la compétence détermineront concrètement les maisons d’édition qui seront chargées de publier les livres de prière et les ouvrages religieux le plus commodément” (5). Plus tard, une directive sur la religion du Bureau politique, publiée le 2 juillet 1988, document très important inspiré par Lê Kha Phiêu, avait annoncé que “le gouvernement ferait connaître un projet de création d’une maison d’édition pour la publication de livres de prières et d’ouvrages culturels des religions Une année plus tard, une lettre d’application, intitulée 01/1999TT/TGCP de juillet 1999, commentait avec précision le fonctionnement de la maison d’édition. Il y était dit à ce sujet que “les organisations ayant des besoins en matière d’impression, de publication de diverses catégories de livres de prière, de produits culturels à contenu religieux doivent faire enregistrer les propositions de publication auprès de la maison d’édition religieuse dépendant directement du Bureau des Affaires religieuses du gouvernement” et que “dans un délai de trente jours à partir de la réception de la demande, le directeur de la maison d’édition religieuse doit régler la question et fournir une réponse écrite 

On ne peut interpréter la décision gouvernementale récente créant une seconde fois la maison d’éditions religieuses comme une marque de libéralisme. Il s’agit bien plutôt d’un durcissement de l’Etat dans le contrôle de la production littéraire et spirituelle des divers secteurs de la société civile. Non seulement la décision du gouvernement va contre le souhait public des évêques de posséder leur propre maison d’édition, mais surtout il met un terme à un certain état d’anarchie de l’édition religieuse, régnant jusqu’à aujourd’hui et finalement favorable à la liberté d’expression de l’Eglise catholique.