Eglises d'Asie

Bornéo : confrontée à de nouveaux affrontements inter-ethniques, l’Eglise demande aux catholiques de garder leur calme

Publié le 18/03/2010




D’après le témoignage d’un prêtre, de nouveaux affrontements inter-ethniques ont eu lieu à Bornéo (Kalimantan) provoquant la mort de cinq personnes et la destruction de centaines de cabanons (1). Par téléphone, le P. Fidelis Ninsa, capucin et curé de la paroisse St Fidelis à Pontianak, dans la province de Kalimantan-Ouest, a déclaré que la situation demeurait tendue après que des Malais locaux et des Madurais réfugiés se soient affrontés le 23 juin dans les environs proches de sa paroisse. “Les points chauds sont maintenant occupés par la police et les militaires, spécialement les camps des réfugiés Madurais, mais les gens ne semblent pas pour autant vouloir oser sortir de chez eux”, a-t-il déclaré.

Selon le P. Ninsa, les heurts ont commencé quand un groupe d’hommes a battu à mort un garçon malais âgé de 6 ans lors d’une tentative de vol qui s’est produite près d’un camp de réfugiés madurais. Le garçon et son père circulaient en moto. Suspectant les auteurs de cette tentative de vol et de ce meurtre d’être des Madurais, des Malais ont attaqué le camp des réfugiés installé dans le Centre sportif de badminton où vivent 344 familles maduraises. La foule a incendié leurs cabanons, un certain nombre d’étals placés à l’extérieur et des tricycles. “Quatre Madurais, tous les quatre conducteurs de tricycle, ont été tués, plusieurs portés disparus, probablement kidnappés par des Malais”, a encore précisé le prêtre, d’origine dayak.

Pour prévenir de nouveaux affrontements, le gouvernement local a affrété des camions, le 26 juin, pour évacuer les réfugiés à Sungai Asam et Tebang Kacang, à quelque 25 km de Pontianak, “mais les réfugiés refusent de partir”, a expliqué le prêtre catholique. Selon lui, certains réfugiés souhaiteraient quitter Pontianak mais ils sont menacés par d’autres qui les obligent à rester et qui disent que les réfugiés ne partiront que lorsque les autorités accorderont à chaque famille un hectare de terre et 30 millions de rupiah (environ 2 700 dollars US) en argent liquide, de quoi bâtir une maison.

Tous ces réfugiés étaient installés, souvent depuis de nombreuses années, dans le district de Samba, dans la province de Kalimantan-Ouest et sont originaires de Madura, île située à proximité de la côte nord-est de Java. Ils se sont repliés sur Pontianak, la capitale provinciale, après les affrontements de 1999 qui les ont opposés aux Dayaks, populations autochtones de Bornéo. Depuis, près de 15 000 de ces réfugiés ont été placés sous la protection du gouvernement local et logés dans deux centres, l’un sportif, l’autre universitaire.

Le P. Ninsa indique que les paroisses catholiques fournissent régulièrement aux réfugiés du riz, du poisson salé, des nouilles lyophilisées, de l’huile et du sucre. “Les musulmans malais protestent disant que l’Eglise catholique favorise trop les réfugiés madurais et, dans les camps, persiste toujours l’idée dans l’esprit des Madurais que l’aide de l’Eglise catholique ne vise qu’à les christianiser”, explique encore le prêtre qui souligne que tous les réfugiés madurais sont musulmans. Selon lui, les communautés dayaks et malaises se sont mises d’accord pour expulser les réfugiés madurais de la ville mais l’Eglise a demandé aux Dayaks catholiques de rester à l’écart de ces affrontements : “Nous rappelons toujours aux catholiques de ne pas se laisser abuser par les provocations et de rester solidaires avec tous.”