Eglises d'Asie – Philippines
Malgré la campagne menée par la présidente Arroyo en faveur du oui, les électeurs de Minda-nao, à une écrasante majorité, ont voté contre le rattachement à la région autonome musulmane
Publié le 18/03/2010
Selon les analystes locaux, plusieurs facteurs expliquent les résultats de ce référendum. Premièrement, Nur Misuari, ancien leader du MNLF et actuel gouverneur de l’ARMM, a échoué à améliorer les conditions de vie dans les provinces dont il a la charge. L’ARMM couvre environ 4 % du territoire des Philippines mais ne génère guère plus de 0,9 % de son PIB. Près de 70 % de ses 2,2 millions d’habitants sont considérés comme étant pauvres. Or, depuis la date de sa création en 1989 et malgré les millions de pesos injectés par Manille, la situation économique des quatre provinces qui composent l’ARMM (Jolo, Lanao del Sur, Maguindanao et Tawi-Tawi) ne s’est pas véritablement améliorée. Par contraste, les provinces qui ne font pas partie de l’ARMM apparaissent aux yeux des électeurs comme nettement plus prospères.
Deuxièmement, les chrétiens de Mindanao n’ont pas voulu rejoindre une entité contrôlée par les musulmans et dont ils craignent le droit islamique. Selon un responsable de l’administration philippine, qui a tenu à garder l’anonymat, “les chrétiens se montrent plus que réticents à l’idée d’être gouvernés par des musulmans”. Ils mettent en avant le fait que les provinces placées sous l’ARMM sont aussi les zones où les groupuscules musulmans qui ont fait des enlèvements une de leurs occupations favorites sont les plus actifs.
Enfin, l’exécutif philippin semble s’être engagé seul dans la bataille pour le oui. Nur Misuari, critiqué par sa base et sachant que l’opinion ne lui était pas favorable, avait qualifié le référendum d’“exercice futile”, appelant les électeurs musulmans à boycotter les urnes. Le cessez-le-feu conclu quelques jours avant le 14 août entre le MILF et Manille n’y a rien changé. Selon Amado Mendoza, professeur de sciences politiques à l’Université des Philippines, il ne reste plus aux Philippins qu’à “chercher d’autres solutions pour satisfaire les demandes légitimes du peuple Bangsamoro (la communauté musulmane philippine) ».
Peuplées de 76,5 millions d’habitants, les Philippines sont catholiques à 85 %. Les musulmans, qui vivent principalement dans la partie sud du pays, à Mindanao, sont environ 5 millions et ils se sentent marginalisés par l’afflux progressif de “colons” venus du nord et du centre de l’archipel philippin. De 1971 à 1996, le MNLF a mené une lutte pour l’indépendance avant de signer un traité de paix avec Manille. Le MILF, fondé en 1978, a continué la lutte armée jusqu’au 3 août dernier où il annoncé, à Kuala Lumpur, en Malaisie, qu’il déposait les armes pour s’unir avec le MNLF. Depuis le vote du 14 août, l’ARMM compte 3,2 millions d’habitants tandis que Mindanao regroupe un total de 17,6 millions d’habitants.