Eglises d'Asie

Des organisations musulmanes demandent l’inscription de la charia dans la Constitution, provoquant l’inquiétude de certains chrétiens

Publié le 18/03/2010




Le 27 août dernier, devant la Chambre des représentants, environ 5 000 manifestants appartenant au Front des défenseurs de l’islam et à l’Association des travailleurs musulmans d’Indonésie ont réclamé l’inscription du droit musulman dans le texte de la Constitution du pays. Les manifestants, brandissant des pancartes où on pouvait lire Tegakkan Syariat Islam ( Faisons respecter la charia islamique’) ou Hancurkan Maksiat ( Détruisons/anéantissons les conduites immorales’), ont justifié leur revendication arguant du fait que la majorité des Indonésiens se disent musulmans.

Ayant obtenu de rencontrer A.M. Fatwa, vice-président de la Chambre des représentants, le leader du Front des défenseurs de l’islam, Muhammad Rizieq Shyihab, a demandé à ce que la “phrase en sept mots” soit inscrite dans le préambule de la Constitution, écrite en 1945, et que son application soit garantie par l’article 29 de la Constitution. La phrase en sept mots renvoie à un slogan Dengan mewajibkan menjalankan syariat islam bagi pemeluk-pemeluknya qui signifie, mot à mot : Rendre obligatoire l’application de la charia pour les musulmans’. En outre, le dirigeant du Front a appelé la président Megawati Sukarnoputri à démissionner, déclarant qu’une femme n’a pas le droit de diriger un pays majoritairement musulman. “Selon le droit musulman, la principale tâche d’une femme n’est pas de diriger mais de mettre au monde un leader”, a-t-il affirmé.

Réunis à l’occasion d’un colloque le 21 août dernier, des dirigeants et des hommes politiques chrétiens ont estimé que la demande d’appliquer la charia dans le pays ne pouvait que mettre les chrétiens sur la défensive. Selon Gregorius Seto Harianto, un catholique, et Jacob Tobing, un protestant, tous deux actifs sur la scène politique, il est vrai que certains partis politiques d’obédience islamique poussent à la Chambre des représentants pour que la charia soit introduite dans la Constitution. Mais, selon Johanes Soedjati Djiwandono, membre de la Commission pour l’Apostolat des laïcs de la Conférence des évêques catholiques d’Indonésie et ancien vice-président de l’Association de sciences politiques d’Indonésie, il ne faut “jamais avoir peur de dire ce qui est vrai et juste”. Il a ajouté qu’il n’est pas possible qu’une nation laïque et un Etat religieux coexistent, précisant que l’Indonésie “se désintégrerait” si l’Etat cessait de se montrer neutre. Face aux revendications des militants islamiques, le révérend L.P. Lambe, secrétaire général de la Communion des Eglises (protestantes) en Indonésie, a invité les chrétiens à prévenir “un conflit frontal” par le dialogue interreligieux et intercommunautaire.