Eglises d'Asie – Inde
Les milieux chrétiens accueillent avec réticence une amorce de dialogue entre leurs responsables et les nationalistes hindous
Publié le 18/03/2010
Ces rencontres et ce début du dialogue continuent de susciter de très vives critiques dans divers milieux chrétiens. Un communiqué publié le 13 septembre par un Centre de dialogue cuménique du Kerala, animé par une tendance de l’Eglise orthodoxe malankara, s’en prend violemment aux tentatives de dialogue des évêques catholiques et des dirigeants protestants avec le groupe fondamentaliste hindou. La position du prélat orthodoxe rédacteur du communiqué, Mgr Thomas Athanasius, diffère considérablement de celle du Conseil national pourtant présidé par un autre évêque orthodoxe, Mgr Geevarghese Mar Coorilose. Mgr Athanasius a qualifié de particulièrement trompeurs les communiqués de la partie chrétienne qui laissaient entendre que ces dialogues seraient aptes à dissiper les fausses idées des uns sur les autres. Le dirigeant du Centre de dialogue cuménique, tout en affirmant ne point s’opposer au dialogue avec les dirigeants hindous, se demande pourquoi les responsables chrétiens ont choisi, pour ce dialogue, les membres du RSS qui ne représentent en rien la grande majorité des hindous. Selon le communiqué, les questions discutées durant les contacts ne concernent pas les chrétiens mais l’ensemble des participants de la démocratie indienne. Elles ne sont, en effet, ni spirituelles, ni religieuses, ni théologiques, mais politiques et idéologiques. « Il est malheureux, insiste le prélat orthodoxe, de voir une poignée de dirigeants chrétiens courir après des dirigeants de l’extrême droite hindoue dont la seule ambition est de faire de l’Inde une nation hindoue et de mettre en péril le caractère séculier et démocratique du pays. » En fin de compte, le communiqué demande aux dirigeants chrétiens de se détourner de ces conversations secrètes, injurieuses pour les minorités religieuses persécutées.
Dès la rencontre des évêques catholiques et du RSS le 22 août dernier, les réactions avaient été particulièrement vives. B.B. Koshy de La voix chrétienne de toute l’Inde écrivait à Mgr Oswald Gracias que le RSS s’était mis au ban de la société du pays par les méfaits commis par lui au cours des 50 dernières années. Seule l’arrivée au pouvoir de son allié, le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP) lui avait donné un semblant de respectabilité. En parlant avec ses représentants, les évêques catholiques leur donnaient une légitimité indue. De toute façon, concluait B.B. Koshi, le dialogue, même réussi, avec ce groupe n’aurait qu’une portée limitée, le RSS n’ayant aucune qualité pour représenter les hindous. D’autres laïcs avaient également protesté, affirmant qu’en entamant ce dialogue, les évêques avaient usurpé le rôle des laïcs à qui il revenait.
Le dialogue amorcé a donné lieu à d’autant plus de rancœur critique que, dans la semaine qui a suivi la rencontre de New Delhi, à la fin du mois d’août, quatre attaques successives ont été perpétrées contre des chrétiens. Le 28 août, dans la banlieue de New Delhi, des militants hindouistes ont interrompu une réunion de prières d’une secte néo-chrétienne, blessant même des prédicateurs. Deux jours plus tôt, dans le Madhya Pradesh, deux prêtres ont été blessés dans une salle de prières livrée au pillage. Le 25 août dans le Gujarat, des employées de la Mission pentecôtiste du Gujarat ont été agressées. Enfin, dans l’Andhra Pradesh, le 29 août, 29 tombes chrétiennes ont été profanées. Le ministre de l’Intérieur L.K. Advani, à qui une délégation chrétienne est allé faire un compte-rendu des faits a aussitôt ordonné une enquête sur les incidents et a déclaré que de tels incidents ne devraient pas avoir lieu.