Eglises d'Asie

Depuis le 11 septembre dernier, les groupes extrémistes hindous ont tourné leurs attaques contre les musulmans

Publié le 18/03/2010




Un certain nombre de commentateurs de la presse indienne soulignent aujourd’hui le tournant pris par l’extrême droite hindoue et l’orientation de plus en plus hostile aux musulmans suivie par elle depuis les événements du 11 septembre dernier. Deux manifestations volontairement agressives de militants hindouistes sur le site des deux monuments les plus prestigieux hérités de l’ère moghol illustrent ce virage actuel.

La première manifestation a eu lieu, le 14 octobre dernier, au Taj Mahal, dans la ville d’Agra, très pur édifice de marbre blanc, l’un des monuments les plus célèbres et les plus visités de l’Inde, construit par le shah Jahan, entre 1630 et 1652, pour servir de tombeau à son épouse. Des centaines de jeunes militants hindouistes ont souillé de graffitis les murs de marbre de la construction. Les actes de vandalisme ont été commis pendant une pause d’un rassemblement national de deux jours, organisé par le Rahstriya Swayamsevak Sangh (Corps national de volontaires, RSS), mais où se trouvaient aussi de jeunes militants du parti au pouvoir, le BJP. Après avoir écouté des discours enflammés contre les terroristes musulmans, de nombreux jeunes gens ont passé outre les consignes de sécurité, bousculé les gardiens, pénétré sur le site en criant des slogans hindouistes et ont infligé de très sérieuses dégradations au monument. Certains ont dansé au rythme de chants populaires hindis. Le ministre de l’Intérieur, L. K. Advani, et le Premier ministre, Atal Behari Vajpayee, étaient présents au rassemblement et se sont adressés l’un et l’autre aux jeunes.

Une autre manifestation de l’extrême droite hindoue a eu lieu à Ayodhya sur le site de la mosquée détruite il y a neuf ans par des groupes hindous fondamentalistes (1). Pour le moment, ce lieu considéré par les hindouistes comme le lieu de naissance du dieu Ram, est gardé par des troupes paramilitaires et est interdit d’accès à quiconque jusqu’à ce qu’un tribunal décide du légitime propriétaire. Cependant un temple provisoire construit immédiatement après la démolition de la mosquée a été laissé sur place par les autorités. C’est là que mystérieusement, le 17 octobre, un groupe de dirigeants du groupe Vishwa Hindu Parishad (Conseil mondial hindou, VHP) a réussi à s’introduire et a récité des prières, ce qui n’a pas manqué d’apparaître comme un défi ouvert lancé à la communauté musulmane.

Le ministre de l’Intérieur qui, autrefois, a souvent épousé les causes hindouistes, a rejeté l’idée selon laquelle les deux incidents pourraient être considérés comme l’œuvre d’“extrémistes religieux” ayant envie d’en découdre avec l’islam en Inde. Il a certes désapprouvé les faits, mais il a précisé qu’il était hors de question d’interdire les groupes hindouistes impliqués comme cela été fait pour le Mouvement islamique des étudiants indiens (2). Ces propos n’ont pas emporté l’adhésion de l’opposition politique du pays qui est convaincue que l’ensemble des groupes fondamentalistes hindous, dont la cible de ces dernières années était la minorité chrétienne, était maintenant entièrement tournée vers les 140 millions de musulmans du pays. D’une façon encore plus précise, les opposants au BJP affirment que ce dernier parti encourage la nouvelle orientation des divers groupes hindouistes. Il espère ainsi que les élections qui vont avoir lieu l’année prochaine en Uttar Pradesh, Etat où se trouvent Ayodhya et Agra, se trouvent marquées par les dissensions religieuses. Beaucoup d’observateurs craignent en effet qu’elles ne soit envenimées par des conflits interreligieux.

Récemment le Premier ministre a incité les dirigeants du VHP à des entretiens et a réactivé une cellule spéciale destinée à régler la querelle d’Ayodhya. Cependant les musulmans n’ont pas été invités aux entretiens et ils ont mis en garde le gouvernement contre toute initiative unilatérale en ce domaine.