Eglises d'Asie – Inde
Le dialogue entamé entre de hauts responsables chrétiens et la branche la plus radicale de l’hindouisme est remis en cause par des déclarations intempestives
Publié le 18/03/2010
Les deux organismes chrétiens qui, malgré les réticences de la base, continuaient d’espérer dans les chances de réussite du dialogue entamé se sont tous les deux déclarés profondément choqués par la prise de positon du leader de l’extrémisme hindou. Dans un communiqué de presse publié le 29 octobre, la Conférence des évêques catholiques de l’Inde a souligné que les propos tenus refroidissaient beaucoup l’entrain de l’Eglise pour des entretiens destinés, avait-on dit au début, à dissiper les malentendus. L’exigence formulée par Sudarshan était l’équivalent d’une intervention dans les affaires intérieures des musulmans et des chrétiens. Selon les évêques catholiques, l’attitude de Sudarshan ne pouvait que vicier l’atmosphère des futurs entretiens et donner du poids aux arguments des opposants au dialogue.
Le communiqué de presse exprimant la réaction du Conseil national des Eglises, qui rassemble en son sein 29 Eglises protestantes et orthodoxes, a été publié le 31 octobre. Après avoir dit combien étaient inopportuns les propos du dirigeant hindouiste, le Conseil national des Eglises posait la question de la poursuite des entretiens commencés, qui, dans ces conditions, s’avéraient presque impossibles à l’avenir.
C’est le 21 août dernier que les premiers entretiens avec le RSS avaient eu lieu, malgré les 200 actes de violence contre les chrétiens attribués à l’influence de cette association depuis trois ans. Ce jour-là, dans les locaux de la Conférence épiscopale à New Delhi, le dirigeant du RSS, K.S. Sudarshan, Madan Vaidya, son porte-parole, et S. Shastri, une personnalité importante du mouvement, s’étaient entretenus avec quelques hauts dirigeants de l’Eglise catholique parmi lesquels Mgr Oswald Gracias, secrétaire général de la Conférence, et Mgr Vincent Concessao, son premier vice-président. La réunion destinée à dissiper les préjugés s’était terminée sur des comptes-rendus relativement satisfaits des deux parties. Le 12 septembre suivant, c’était au tour du Conseil national des Eglises en Inde d’inviter, à Nagpur, des représentants du RSS pour dialoguer avec eux. Déjà en 1998, les groupes hindous avaient suggéré la mise en place d’entretiens réguliers avec les dirigeants chrétiens, mais, les attaques s’étant renouvelées et multipliées, le projet avait été abandonné.
Un peu partout en Inde, des voix se sont élevées pour mettre en cause, condamner, voire critiquer ces rencontres avec un organisme à qui beaucoup dénient toute représentativité religieuse. Un prélat de l’Eglise orthodoxe malankara au Kerala s’est désolé “de voir une poignée de dirigeants chrétiens courir après des dirigeants de l’extrême droite hindoue dont la seule ambition est de faire de l’Inde une nation hindoue et de mettre en péril le caractère séculier et démocratique du pays La résistance est d’autant plus vive que le dirigeant du RSS est déjà bien connu pour l’outrance des propos tenus par lui contre l’Eglise. Il s’était plusieurs fois signalé à l’attention des chrétiens. En octobre 2000, au cours d’un rassemblement marquant le 75e anniversaire de son association, il avait appelé les catholiques de l’Inde à établir une Eglise “swadeshi”, c’est-à-dire nationale et séparée de Rome (2).