Eglises d'Asie

L’opposition politique et les responsables de la communauté chrétienne s’opposent à la tentative du gouvernement de distiller le nationalisme hindou dans l’esprit des élèves

Publié le 18/03/2010




Dans le cadre du remaniement du programme des études scolaires qui, normalement, a lieu tous les cinq ans, le gouvernement fédéral a, depuis novembre 2000, commencé à modifier certains des grands chapitres du cursus scolaire indien. Cette tâche, qui était jusqu’en 1976 entièrement de la responsabilité des divers Etats de l’Inde, appartient, depuis cette date où un amendement à la Constitution a été voté, à la responsabilité commune des instances fédérale et régionales. Plus précisément, la définition de la qualité et de la nature de l’éducation appartient aux autorités fédérales. Or, depuis quelques mois, dans beaucoup de milieux indépendants, dans les Etats gouvernés par des partis d’opposition à la coalition actuellement au pouvoir, on peut remarquer un fort mouvement d’opposition à la politique éducative suivie par le gouvernement fédéral. Il est en particulier reproché à l’actuelle réforme des programmes de vouloir faire perdre au système éducatif indien le caractère séculier qui est traditionnellement le sien.

C’est dans ce contexte que s’est réuni à New Delhi, le 3 novembre dernier, un séminaire sur ce sujet, où se sont exprimés divers groupes chrétiens, des dirigeants religieux et des représentants de partis de gauche. La plupart d’entre eux ont mis en garde contre la tentative menée par le gouvernement fédéral actuel, poussé sur cette voie par les groupes de l’extrême droite hindoue, “d’injecter l’idéologie du nationalisme hindou dans l’esprit des enfants à travers divers manuels scolaires”. Ils ont accusé les tenants du nationalisme hindou et leurs collaborateurs en place dans les divers services de l’éducation de tenter de déformer les faits historiques et d’introduire dans le programme des éléments peu adaptés aux temps modernes. Récemment, le gouvernement fédéral a légitimé l’astrologie comme discipline d’études dans les universités, suscitant la protestation d’un certain nombre de responsables chrétiens et d’intellectuels qui ont vu dans cette initiative un recul en arrière peu apte à créer un véritable esprit scientifique chez les étudiants.

C’est en particulier ce qui a été reproché à la réforme éducative en cours par Sitaram Yechury, dirigeant du Parti communiste indien et participant au séminaire. Selon lui, le gouvernement est en train de tenter une réécriture de l’histoire et veut imposer l’uniformité au lieu de la saine diversité. Il a également accusé le gouvernement d’entreprendre la révision de la politique éducative sans demander l’avis du Parlement et du Bureau consultatif de l’éducation.

L’archevêque catholique de Delhi, Mgr Vincent M. Concessao, dans son intervention au séminaire, a eu des mots très durs pour qualifier le nouveau programme d’enseignement dont il a dit qu’il “remodelait l’histoire à sa manière et la dénaturait mettant ainsi en péril l’avenir de la nation en entravant les jeunes étudiants dans leur quête de connaissances. Par suite, il a appelé les universitaires et les responsables politiques à s’unir pour résister à une réforme éducative que l’on voudrait imposer sans consultation préalable. Selon John Dayal, du Conseil chrétien pan-indien, l’objectif du gouvernement dans cette réforme éducative est de cultiver chez les étudiants la crédulité, l’irrationalisme, le manque d’esprit scientifique afin de pouvoir mieux les manipuler. La plupart des autres intervenants chrétiens au séminaire ont repris ces mêmes thèmes.

La ministre-présidente de Delhi, Sheila Dixit, du Parti du Congrès, a fait état devant les participants du séminaire de la résistance opposée par divers Etats à ce qu’elle a appelé une réforme éducative subreptice. Les gouvernements de neufs Etats ont déjà protesté. Malheureusement, plusieurs Etats aux mains de la coalition dirigée par le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP) ont déjà changé leur programme scolaire et y ont introduit la “nouvelle histoire hindoue” et modifié certains manuels scolaires.