Eglises d'Asie

Célèbes : une délégation de responsables chrétiens de Poso témoigne devant la Commission nationale des droits de l’homme et demande au gouvernement de faire cesser les violences

Publié le 18/03/2010




Le 24 novembre dernier, une délégation de responsables de la communauté chrétienne de la ville de Poso, composée de catholiques et de protestants, s’est rendue à Djakarta pour témoigner devant la Commission nationale des droits de l’homme. La ville de Poso, dans la province des Célèbes-Centre, est le théâtre depuis deux ans de violents affrontements entre les communautés chrétienne et musulmane (1). La situation s’est envenimée depuis quelques mois du fait de l’arrivée dans la région de “combattants (musulmans) de la guerre sainte” appartenant au Laskar Jihad. Les délégués chrétiens ont demandé à la commission, organe officiel, fonctionnant indépendamment du gouvernement, d’envoyer un “avertissement rédigé dans les termes les plus fermes” aux responsables de l’exécutif afin que soient prises des mesures contre les combattants musulmans étrangers. Selon Arnold Tobondo, responsable de l’Eglise chrétienne des Célèbes-Centre, des miliciens venus d’Afghanistan, du Moyen-Orient et du Pakistan sont actifs à Poso et dans sa région.

Selon Arnold Tobondo, plus de 27 000 chrétiens du district de Poso ont dû quitter leurs demeures pour trouver refuge dans des bâtiments publics des districts avoisinants (Donggala, Ampana et Kolonodale). Certains sont allés se réfugier jusque Gorontalo, ville située au nord de l’île (2). Depuis la mi-novembre, trois personnes ont été tuées à la suite d’affrontements inter-communautaires. Toutes les activités sont perturbées par la situation qui prévaut actuellement, a poursuivi le responsable protestant. “Les fonctionnaires chrétiens éprouvent de grandes difficultés à retourner à leur travail étant donné que les femmes doivent obligatoirement porter le voile islamique et les hommes les vêtements caractéristiques des musulmans. Ils ne peuvent plus venir à Poso”, a-t-il précisé.

Par ailleurs, selon l’agence Reuters, une église chrétienne, l’église de Béthanie, a été incendiée et a complètement brûlé le 26 novembre à Poso. La police locale a déclaré qu’aucune émeute n’avait éclaté du fait de cet incident et que l’incendie n’avait pas fait de victimes. Mais, selon d’autres sources, des émeutes ont éclaté le lendemain dans le village chrétien de Betalemba, les émeutiers s’en prenant aux villageois plusieurs heures durant, incendiant leurs maisons et laissant plus de 2 000 personnes sans toit. Selon un journal indonésien, des incidents auraient également éclaté dans les villages de Tangkura et de Patiwunga, faisant au total cinq morts – deux assaillants et trois villageois.

Selon des sources locales, depuis décembre 1998, début des troubles à Poso et dans ses environs, plus de 1 000 personnes, musulmanes et chrétiennes, ont trouvé la mort ; des milliers de maisons ou de bâtiments – y compris des lieux de culte – ont été détruits ; des centaines de milliers de personnes ont été déplacées. Selon Noldy Talcoh, secrétaire du Centre de crise de l’Eglise catholique des Célèbes-Centre, “des onze églises chrétiennes de Poso, la seule a être encore utilisée est l’église de Sion” ; cette dernière, située près du quartier général local des forces militaires et de la résidence officielle du maire de Poso, est la seule à avoir été épargnée par les émeutiers.