Eglises d'Asie

A Katmandou, une « Maison de la miséricorde », mise en place par l’Eglise catholique, contribue à changer le regard des Népalais sur les malades du sida

Publié le 18/03/2010




Considérés jusqu’à présent comme des pestiférés, les malades du sida au Népal commencent à voir leur place sinon reconnue du moins acceptée au sein de la société népalaise. Ce changement est en partie dû à l’action de l’Eglise catholique qui a ouvert en 1998 une « Maison de la miséricorde » (Karuna Bhawan), à Katmandou, non loin de la cathédrale de l’Assomption, pour accueillir des femmes et des enfants porteurs du virus HIV et/ou malades du sida. « Lorsque nous avons ouvert cet abri, se rappelle Mgr Anthony Sharma, préfet apostolique du Népal, même les religieux qui venaient visiter la maison prenaient soin de ne pas s’asseoir sur les chaises qui venaient d’être utilisées par des pensionnaires. Les sœurs de l’Adoration, responsable de ce centre, ont fait en sorte, par leur travail et leur exemple, que cette attitude change. »

Sœur Deepa Neeruvelil, directrice de Karuna Bhawan, explique que elle et les deux religieuses qui travaillent à ses côtés ont accueilli 25 femmes et enfants en trois ans. Selon elle, leur mission est « de les protéger contre l’opprobre sociale dont sont toujours victimes dans les villages les personnes atteintes de cette maladie ». Une des pensionnaires, Renu, se souvient comment les femmes « autour de notre maison » se sont plaintes auprès du responsable de quartier pour exiger le déménagement de Karuna Bhawan. Après que ce responsable eut informé les habitantes du quartier des réalités du sida, « elles sont venues et aujourd’hui elles nous rendent visite ». Sarada, une autre pensionnaire, rapporte que les épiciers du coin qui, avant, refusaient ne serait-ce que de les accepter dans leurs échoppes vendent aujourd’hui les lampes que les malades du sida fabriquent pour assurer un peu de revenu au centre.

Actuellement, la « Maison de miséricorde » héberge 13 femmes âgées de 18 à 23 ans, trois enfants de moins de huit ans et un nourrisson de cinq mois. Sur les 25 pensionnaires qui sont passées ou qui vivent encore au centre, 10 venaient directement des maisons closes de l’Inde toute proche. Selon Sœur Neeruvelil, les pensionnaires, toutes analphabètes, suivent des leçons pour apprendre à lire et écrire en népali et en anglais ainsi qu’une formation technique. Pour celles qui ont été prostituées, des sessions spéciales de conseil les aident à surmonter les épreuves subies. Sarada, évoquée ci-dessus, a ainsi été vendue alors qu’elle était une enfant ; forcée à se prostituer, elle a découvert à l’âge de 15 ans qu’elle était séropositive.

Le 1er décembre dernier, pour la journée mondiale sur le sida, les membres du centre ont pris part au défilé organisé sous les auspices du Premier ministre dans les rues de Katmandou. Dans le stade national, où la parade a pris fin, le Premier ministre a exprimé son souci face au taux élevé d’infection constaté chez les jeunes. Sharan Chettri, une des premières personnes testées séropositives dans le pays, a déclaré à cette occasion que 40 000 Népalais étaient aujourd’hui infectés par le virus ou développaient la maladie du sida (1).