Eglises d'Asie – Indonésie
Dans une démarche commune, les deux principales organisations musulmanes de masse du pays cherchent à donner une meilleure image de l’islam
Publié le 18/03/2010
Selon Syafii Ma’arif, l’affaiblissement de l’Etat de droit et le désordre qui en découle sont les facteurs qui expliquent la montée de l’islamisme radical, certains groupes musulmans ayant commencé à faire la loi par eux-mêmes. “A long terme, cela finira par tuer le mouvement islamique. L’image qui en sortira sera celle de la violence et de la cruauté”, a-t-il dit. Pour éviter cela, les deux organisations entendent approcher les groupes islamistes radicaux afin de “synchroniser nos perceptions”, a-t-il encore déclaré.
Depuis la chute du président Suharto en 1998 et la relative démocratisation de la vie politique qui a suivi, l’Indonésie a souvent fait parler d’elle, l’action de certains groupes islamistes attirant l’attention des médias internationaux. Outre le Laskar Jihad, actif aux Moluques et à Célèbes, certains mouvements fondamentalistes, après les attaques du 11 septembre aux Etats-Unis et la campagne militaire américaine en Afghanistan, avaient proposé de s’en prendre aux ressortissants américains présents en Indonésie ; d’autres avaient lancé des expéditions contre les boîtes de nuit à Djakarta et dans plusieurs villes du pays, les qualifiant de “lieux de débauche”.
Selon une étude menée récemment dans la région de Djakarta auprès de musulmans et dont les résultats ont été publiés début janvier dans le magazine Tempo, la pratique de l’islam est en train de changer. L’islam abangan – une forme syncrétique de l’islam propre à Java et faisant appel à des éléments religieux issus de l’hindouisme, du bouddhisme et de l’animisme – régresse au profit d’une forme plus rigoureuse de la religion musulmane. Pour les femmes, par exemple, le port du voile est de plus en plus fréquent. Dans les grandes villes, de jeunes actifs, membres de la classe moyenne, s’inscrivent à des cours d’enseignement sur l’islam. 58 % des personnes sondées soutiendraient un gouvernement dont le Coran et les préceptes laissés par le prophète Mahomet seraient la base. Parallèlement, l’étude montre que les musulmans deviennent moins tolérants envers ceux qui pratiquent une autre religion. Ainsi près de 73 % des sondés estiment que les membres des groupes minoritaires ne devraient pas avoir le droit d’enseigner dans les écoles publiques ; 47 % n’apprécient pas que le culte chrétien soit célébré dans leur voisinage et 42 % refuseraient qu’une nouvelle église soit bâtie près de chez eux. Saiful Mujani, chercheur au Centre de recherches sur l’islam et la société, organisme rattaché à l’Institut islamique d’Etat Syarif Hidayatulah, de Djakarta, a commenté ce sentiment croissant d’intolérance envers les minorités religieuses en déclarant : “Les chrétiens et la communauté chinoise forment un groupe qui domine l’économie.”