Eglises d'Asie

Jharkhand : l’Etat a cessé d’assurer le traitement des enseignants des écoles privées travaillant au services des minorités ethniques

Publié le 18/03/2010




Plus de 8 000 enseignants travaillant dans des écoles implantées auprès des minorités ethniques de l’Etat du Jharkhand ont manifesté leur mécontentement le 18 décembre dernier dans les rues de Ranchi. Voilà en effet quarante mois que leurs salaires restent impayés. 80 % de ces écoles privées dispensant l’enseignement primaire en milieux ethniques sont gérées par des chrétiens, pour la plupart des catholiques. Depuis l’arrêt du versement des traitements aux instituteurs, la situation de ceux-ci est devenue totalement insupportable, d’autant plus que les responsables d’écoles ne peuvent exiger de leurs élèves les frais de scolarité généralement perçus dans l’enseignement privé.

Les responsables de l’éducation dans le diocèse attribuent la responsabilité de cette situation au gouvernement de l’Etat entre les mains du Parti nationaliste hindou, le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP). Selon eux, l’administration locale poursuivrait un plan secret d’élimination de toutes les écoles en milieu ethnique. Ce reproche est également formulé par l’opposition politique dans l’Etat. Shibu Soren, dirigeant du parti Mukti Morcha, accuse, lui aussi, le gouvernement d’essayer de mettre un terme à l’existence des écoles pour les minorités, ayant pris le parti de ne pas octroyer d’éducation aux enfants issus des ethnie minoritaires ou des milieux pauvres. Stephen Marandi, un député de l’opposition à l’Assemblée législative locale, affirme que le BJP n’accorde ses faveurs et ses privilèges qu’aux établissements avec lesquels il entretient des liens spéciaux. Il aurait déjà mis la main sur les établissements scolaires d’Etat qu’il aurait confiés à des groupes acquis par avance à la cause du nationalisme hindou.

A la suite de la grande manifestation des enseignants à Ranchi, le 18 décembre dernier, l’Assemblée législative locale a créé une commission spéciale chargée de régler les problèmes en cours dans l’enseignement privé. Selon Niranjan Kuùmar Sandil, le dirigeant du syndicat enseignant, la commission désignée aurait proposé des solutions particulièrement adaptées à la situation difficile des enseignants du privé. Cependant, le gouvernement ne les a pas prises en compte et, à plus forte raison, mises en œuvre. En conséquence, la situation du corps enseignant de l’éducation privée s’est encore détériorée : “Nos conditions d’existence sont bien pires que celles des mendiants a déclaré le dirigeant syndical.

L’Etat du Jharkhand a été détaché de l’Etat du Bihar en 2000 et ses dirigeants ont poursuivi la politique d’éducation en vigueur dans ce dernier Etat avant la division. A la suite de mesures législatives datant de 1978, l’éducation libre, au Bihar, bénéficiait d’un système où le paiement des traitements des maîtres de l’enseignement privé incombait à l’Etat, tandis que les établissements se chargeaient des dépenses d’entretien. En 1990, avec le changement de gouvernement dans l’Etat du Bihar, la situation s’est détériorée et le paiement des enseignants a commencé à devenir irrégulier. Actuellement, il a cessé totalement depuis quarante mois. Depuis sa venue au pouvoir dans le Jharkhand, le BJP n’a rien changé à cette politique, pas plus qu’il n’a débloqué de fonds pour payer les arriérés dûs au corps enseignant privé.

Selon le P. James Toppo, directeur de l’éducation dans l’archidiocèse de Ranchi, le gouvernement du Bihar justifiait son comportement en affirmant que le paiement du traitement des enseignants par l’Etat était, non pas un droit, mais une aide accordée à l’enseignement privé, aide dont l’Etat se dispensait en cas de pénurie financière. Le gouvernement du nouvel Etat du Jharkhand a fait sienne cette politique qui n’a cependant jamais fait l’objet d’un communiqué public.