Eglises d'Asie

Les critiques se multiplient concernant le dialogue entamé entre la hiérarchie chrétienne et les dirigeants du nationalisme hindou

Publié le 18/03/2010




Les entretiens engagés depuis quelque temps entre dirigeants chrétiens au plus haut niveau et responsables de l’Association nationaliste hindoue, le Rashtriya Swayamsevak Sangh (Corps national des volontaires, RSS), continuent de susciter des remous aussi bien dans la hiérarchie catholique indienne que dans son laïcat, tous deux divisés sur ce problème. La quatrième série d’entretiens a eu lieu au mois de novembre au Kerala (1) avec l’absence remarquée de hautes personnalités appartenant aux Eglises de rites syro-malabar et latin. Depuis, des appréciations contradictoires sur cette rencontre ont été livrées à l’opinion publique par la voie d’articles de presse ou de communiqués publics.

Dès le début, le président de la Conférence des évêques catholiques de l’Inde, qui était à la tête de la délégation chrétienne, n’a cessé d’affirmer qu’un tel dialogue pouvait contribuer à apporter la paix entre les deux communautés. C’est aussi l’avis de l’instigateur principal de ces entretiens, John Joseph, une personnalité chrétienne contestée, membre de la Commission nationale des minorités, qui a servi d’intermédiaire entre les deux parties. Il est persuadé que l’on doit poursuivre ce genre de rencontres, en dépit des critiques et du scepticisme qu’elles ont soulevés jusqu’ici dans les milieux catholiques.

Cependant, depuis la dernière rencontre, beaucoup de dirigeants chrétiens, y compris le porte-parole de l’Eglise syro-malabare, ont exprimé leur mécontentement de constater que le principal responsable de la Conférence épiscopale n’ait pas sollicité l’opinion des autres dirigeants d’Eglise avant de s’engager dans ce dialogue. Le P. Paul Thelakat, au nom de l’Eglise syro-malabare, qui est la plus importante des deux Eglises catholiques de rite oriental en Inde et compte près de 3,5 millions des 6 millions de chrétiens du Kerala, a eu une réaction particulièrement vigoureuse. Dans un communiqué de presse publié le 27 novembre, il a déclaré que le synode de son Eglise n’avait reçu aucune notification officielle concernant la rencontre et le dialogue avec le RSS. Il a ajouté qu’une discussion aurait dû avoir lieu au sein de l’Eglise sur l’utilité de tels échanges. Les déclarations de Mgr Daniel Acharuparambil, archevêque de Verapoly, dirigeant de l’Eglise de rite latin au Kerala, qui s’est abstenu de participer aux entretiens de novembre, sont empreintes du même scepticisme. Il ne voit, a-t-il dit, aucun mérite à participer à un dialogue avec le RSS, car celui-ci est dépourvu de tout sérieux. Selon lui, avant de s’engager dans ces échanges, la Conférence épiscopale, comme toute autre groupe chrétien en Inde, aurait dû convoquer une réunion préparatoire chargée de déterminer l’objet du dialogue et la manière dont il devrait se poursuivre.

A la mi-décembre, ce fut le tour de Mgr Gregory Karotemprel, de Rajkot, de publier un article sur ce sujet en première page de l’hebdomadaire catholique Sathyadeepam ( Lumière de la Vérité’). Il y qualifiait les entretiens d’“inefficaces et inutiles”. L’évêque syro-malabar affirmait aussi que les diocèses de mission, comme le sien, étaient totalement sceptiques sur les chances de réussite de telles rencontres. Il a incité le président de la Conférence épiscopale à ne pas tomber dans le piège de ce faux dialogue à deux. Selon quelques membres de la hiérarchie syro-malabare qui ont tenu à garder l’anonymat, seuls deux hommes étaient actifs dans ces entretiens : John Joseph, l’intermédiaire du gouvernement, et le président de la Conférence épiscopale, Mgr Baselios.

Ce dernier, dans des déclarations à l’agence Ucanews, s’est déclaré persuadé qu’il n’existe aucune différence d’opinion dans l’Eglise au sujet du dialogue avec les dirigeants nationalistes hindous. Il a également énoncé son intention de faire participer tous les éléments de l’Eglise au dialogue en cours.