Eglises d'Asie

Décès du vénérable Thich Duc Nhuân, religieux ayant milité pour l’indépendance de l’Eglise bouddhiste unifiée

Publié le 18/03/2010




Le vénérable Thich Duc Nhuân, une des plus hautes personnalités de l’Eglise bouddhiste unifiée du Vietnam, une Eglise non reconnue par l’Etat vietnamien, est décédé de thrombose pulmonaire lundi 21 janvier. Transporté ce jour-là dans un hôpital de la faculté de médecine, il est mort quatre heures plus tard. Il était âgé de 79 ans et totalisait 58 ans de vie religieuse. Le religieux était assigné à résidence surveillée dans la pagode de Giac Minh à Hô Chi Minh-Ville depuis le mois de juin dernier pour avoir manifesté son intention de se joindre à un groupe de religieux qui avaient décidé de délivrer le patriarche Thich Huyen Quang de sa résidence surveillée au Centre Vietnam et de le reconduire à Hô Chi Minh-Ville (1) pour y recevoir des soins, une tentative que la police avait fait échouer. Immédiatement après sa mort, la police est venue apposer des scellés sur la porte de sa cellule obligeant les religieux à exposer le corps du défunt dans la cour de la pagode.

Le religieux, né dans la province de Nam Dinh au Nord, était entré à la pagode à l’âge de treize ans. Après les accords de Genève, il vint résider au Sud-Vietnam où il s’est occupé un temps de la sangha des moines du Nord réfugiés dans le sud. Après 1963, il occupa des postes importants au sein du boud-dhisme unifié. Il est l’auteur d’un certain nombre d’ouvrages religieux, poétiques et historiques. Il s’est particulièrement efforcé d’étudier les rapports du bouddhisme et du peuple vietnamien dans des livres comme Le Bouddhisme et l’histoire du Vietnam, un livre de 692 pages, édité clandestinement en 1999.

En 1985, il avait été arrêté avec un groupe de religieux de l’Eglise bouddhiste unifiée pour une préten-due tentative de coup d’Etat. Il dut attendre jusqu’au 30 septembre 1988 pour être traduit devant le tri-bunal populaire de Hô Chi Minh-Ville en compagnie de 21 autres accusés. Les sentences prononcées à l’issue du procès avaient provoqué une émotion et des protestations générales à l’intérieur du pays comme à l’extérieur. Deux religieux étaient condamnés à mort, d’autres à la prison à perpétuité. Thich Duc Nhuân était condamné à 10 ans de prison. Il fut libéré avant l’expiration de sa peine en 1993. Il re-prit immédiatement sa lutte pour la liberté de son Eglise. Une des dernières lettres écrite par lui date du mois de septembre 2001. Il y expliquait et exaltait le geste de Hô Tân Anh, un dirigeant d’un mou-vement de jeunesse bouddhiste de Da Nang, qui s’était immolé par le feu, le jour de la fête nationale, le 2 septembre, pour protester contre l’oppression exercée par l’Etat contre le bouddhisme unifié (2).

Les obsèques du religieux ont eu lieu dans la matinée du 24 janvier. Malgré les tracasseries de la police, environ 2 000 religieux et fidèles participaient aux cérémonies. Un forte délégation de religieux de Huê et Quang Tri était présente aux cérémonies. Le premier et le second personnage du bouddhisme unifié, Thich Huyân Quang et Thich Quand Dô, l’un et l’autre en résidence surveillée n’ont pu se rendre sur le lieu des obsèques.