Eglises d'Asie – Vietnam
En recevant ses évêques, le pape invite l’Eglise du Vietnam à avancer vers le large et à garder son indépendance vis-à-vis de “la communauté politique”
Publié le 18/03/2010
Si l’on se réfère à la petite plaquette publiée par les évêques à l’issue de leurs dix jours passés à Rome, dressant le compte-rendu de toutes les visites effectuées par eux aux divers dicastères de Rome (1), ceux-ci n’ont guère eu le loisir de contempler les beautés de la ville sainte. Les rencontres avec les dif-férents responsables de la curie romaine se sont succédé au rythme de deux ou trois par jour. La délé-gation vietnamienne fut même obligée de se diviser en plusieurs groupes pour mieux venir à bout de sa tâche. A titre d’exemple, le programme de la journée du 18 janvier, journée choisie au hasard, compre-nait la visite d’un premier groupe, conduite par l’évêque coadjuteur de Phan Thiêt, auprès du Conseil pontifical Justice et paix’, dont le responsable n’est autre que le cardinal F.-X. Nguyên Van Thuân, personnalité bien connue de chacun des évêques du Vietnam, qu’ils avaient d’ailleurs rencontré une première fois, dès le lendemain de leur arrivée à Rome. Les évêques vietnamiens ont pris connaissance des dernières publications de Justice et paix’ en matière de doctrine sociale de l’Eglise et ont exposé au cardinal les problèmes posés à l’Eglise par la politique dite de “dôi moi” et l’introduction dans le pays de l’économie du marché. Pendant ce temps, une autre délégation d’évêques vietnamiens se rendait à la Commission pontificale pour la culture, dirigée par le cardinal Poupard à qui les évêque vietnamiens exposèrent certaines particularités de leur culture. En fin de matinée, un groupe rendait encore visite à la Commission pontificale pour le laïcat, dirigée par le cardinal Francis Stafford.
Cependant, ce sont les rencontres avec le pape qui ont marqué le plus profondément les esprit les évêques vietnamiens. Elles ont été nombreuses et ont revêtu diverses formes : des rencontres personnelles du 17 au 21 janvier, des invitations communes au déjeuner de midi, le 17 et le 21 et enfin, le 22, après une messe concélébrée avec Jean-Paul II dans sa chapelle personnelle, la réception officielle des évêques par le Souverain Pontife avec un échange de discours qui, tous les deux, ont évité les lieux communs et ont évoqué la situation de l’Eglise au Vietnam en toute franchise (2).
Dans son adresse au pape, le président de la Conférence épiscopale, Mgr Paul Nguyên a fait une rapide présentation de l’histoire de l’Eglise du Vietnam ainsi que du pays dans lequel vit celle-ci, “un pays en voie de renouveau”, un pays agricole se transformant en pays industriel, passant de l’économie dirigée à l’économie du marché. De l’Eglise, il a dit qu’elle “ne jouissait pas encore de toutes les libertés nécessaires quelle souffrait de restrictions dans “les domaines du recrutement, de la formation, de l’ordination et de la nomination des prêtres et des religieux”. A cette situation, l’Eglise du Vietnam réagit dans un esprit de dialogue et Mgr Hoa a rappelé que l’Eglise a exprimé publiquement et à plusieurs reprises ses exigences en matière de droits de l’homme et de l’Eglise (3).
La réponse du pape qui a été distribuée aux évêques n’est pas moins explicite. Tout en l’invitant à avancer vers le large, il a approuvé les orientations récentes de l’Eglise du Vietnam. Se référant à l’en-seignement de Vatican II, il a approuvé les efforts de l’Eglise pour conserver son indépendance et son autonomie face au pouvoir politique. Il estime que la communauté chrétienne doit pouvoir prendre sa juste part à la vie de la nation. Il a développé longuement et dans le détail les implications concrètes de la liberté religieuse, en reprenant des revendications souvent exprimées par l’Eglise du Vietnam.