Eglises d'Asie

Bihar : la profanation d’une statue de la Vierge indigne chrétiens, hindous et musulmans

Publié le 18/03/2010




Au cours de la nuit du 19 au 20 janvier, une statue de la Vierge se trouvant dans un ancien cimetière de la ville de Bettiah, située dans l’Etat du Bihar, a été profanée par des inconnus. C’est le gardien du cimetière qui, dans la matinée suivante, a constaté que la statue avait la tête et les bras brisés. Une pluie abondante s’était abattue sur la ville pendant toute la nuit et avait favorisé les agissements des profanateurs.

Dés que la nouvelle a été connue, elle a fortement ému la population chrétienne du diocèse de Bettiah, un nouveau diocèse issu en 1998 de la division du diocèse de Muzaffapur et devenu suffragant du diocèse de Patna, dans l’Etat du Bihar. Un spécialiste de l’histoire du christianisme local, Cherobim John, a souligné la rareté de tels incidents dans la région et fait remarquer que, depuis l’introduction du christianisme en 1745, c’était la première fois qu’une telle tragédie se produisait. Un certain nombre de chrétiens n’ont pu s’empêcher de voir dans cet acte une tentative pour troubler l’harmonie sociale existant jusqu’ici entre la communauté catholique forte d’environ 4 000 personnes et les communautés hindoue et musulmane. Aussi bien, nombre d’entre eux ont décidé, dans le cas où la police ne se livrerait pas à des recherches diligentes, de faire connaître leur mécontentement. Ils se proposent, par exemple, de fermer pendant un certain temps les écoles tenues par l’Eglise pour forcer les forces de sécurité à passer l’action.

Cependant, les responsables locaux de la police affirment que le retard de l’enquête entreprise pour élucider l’affaire tient au fait que leurs services n’ont été informés de l’incident que cinq jours plus tard, ce qui a donné aux auteurs de la profanation tout le temps nécessaire pour effacer les traces de leur méfait. Le gardien du cimetière qui a découvert les faits a admis n’avoir porté plainte auprès de la police que le 25 janvier. Cependant, il avait averti les responsables de la paroisse qui n’ont rien fait.

L’évêque du diocèse, Mgr Victor Henry Thakur, averti lui aussi avec beaucoup de retard, est également persuadé que l’objectif de cet acte est principalement d’empoisonner les esprits et les coeurs, de porter atteinte à l’harmonie sociale et à la paix. Cependant, le prélat s’est efforcé de calmer les esprits et de détourner ses fidèles d’actions trop voyantes. “Ne tombons pas dans le piège !”, a-t-il conseillé. Selon lui, en tant que disciples du Christ, les chrétiens ne peuvent se montrer dans la rue trop souvent : “Notre héritage et notre culture nous appellent plutôt à prier même pour nos ennemis”. Il a expliqué ensuite que cela ne signifiait pas que la seule possibilité pour les chrétiens soit de souffrir l’injustice et de pardonner. Cependant la lutte des chrétiens ne peut se dérouler que dans le respect du droit et dans la paix afin que l’harmonie sociale soit préservée.

Une même indignation règne dans les communautés religieuses non chrétiennes, unanimes à condamner la profanation. On a même a pu assister à un début de mobilisation en milieu non chrétien. Le responsable du Parti du Congrès pour le district, Mohammad Kumaran, a déclaré que l’incident avait choqué tous ceux qui, dans le district, aimaient Dieu. Même les responsables locaux des groupes nationalistes hindous ont publiquement pris partie. Pramod Lundia, coordinateur du Rashtriya Swayamsevak Sangh (Corps national des volontaires, RSS) a affirmé que “cette honteuse profanation était en contradiction avec l’éthique hindoue et qu’aucun hindou authentique ne pouvait l’approuver Le député Renu Devi du Parti pro-hindou, le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP), a demandé à la police d’arrêter promptement les coupables et de préserver dans la ville une tradition centenaire de coexistence interreligieuse.