Eglises d'Asie

Gia Lai : des pasteurs rencontrés par des journalistes au cours d’une visite organisée, leur disent que les conditions du culte se sont améliorées

Publié le 18/03/2010




Dans le cadre de la préparation du rapatriement des montagnards réfugiés au Cambodge, une visite a été organisée par les autorités vietnamiennes pour une trentaine de journalistes de la presse nationale et internationale dans la province de Gia Lai sur les hauts plateaux, la deuxième de ce type depuis les troubles de février 2001. Au cours de la visite avait été prévu un entretien avec deux pasteurs protestants de l’ethnie Jarai, les révérends Siu Y Kim et Siu Pek. Le compte-rendu publié par l’officielle Agence d’information du Vietnam au sujet de cette rencontre qui a eu lieu le 18 février, ne s’est pas embarrassé de nuances inutiles (1) : “Les pasteurs ont déclaré que loin d’empêcher les fidèles de pratiquer leur religion, les autorités locales de pair avec les organisations de masse de la localité ont créé des conditions favorables pour que les communautés de protestants organisent leur congrès et réalisent les politiques religieuses du Parti”.

La version de la rencontre rapportée par les journalistes et publiée par leurs agences (2) est heureusement de caractère moins manichéen et l’on y voit les deux pasteurs interrogés, responsables de communautés chrétiennes de la commune de Chu A, nuancer leur “satisfecit” à l’égard du gouvernement par des critiques précises. Si les deux responsables protestants ont admis que les conditions du culte se sont améliorées quelque peu au cours des deux années passées, ils ont en même temps souligné que les restrictions apportées à l’exercice du culte étaient importantes. Même si le gouvernement reconnaît aujourd’hui l’existence officielle du protestantisme, il interdit encore la construction des églises. Aussi, les chrétiens sont-ils obligés de célébrer le culte dans des maisons, appelées pour cela, a-t-il fait remarquer, des “Eglises domestiques Selon les pasteurs, les directives religieuses gouvernementales actuelles permettent de pratiquer sa foi à l’intérieur de sa maison avec les membres de la famille. Cependant, si l’on désire inviter d’autres personnes au culte, il faut demander une permission aux autorités. Les pasteurs ont précisé qu’avant le reconnaissance de l’Eglise protestante par le gouvernement, il était illégal d’amener quelqu’un prier chez soi.

Pour illustrer cette amélioration des conditions du culte, un pasteur a déclaré que désormais les activités du culte n’avaient plus lieu dans le secret comme autrefois, mais qu’elles avaient toujours besoin de discrétion. Il a montré aux journalistes le lieu de culte actuel, constitué de deux grandes pièces situées derrière sa maison. On y accède par une porte s’ouvrant dans le plafond et témoignant de la clandestinité des réunions de prière d’autrefois. Le pasteur s’est déclaré persuadé que dans quelque temps la communauté chrétienne pourrait se rassembler dans des conditions moins précaires.

D’une façon générale, ont dit les pasteurs aux journalistes, la situation des protestants varie beaucoup selon les lieux et les bonnes ou mauvaises dispositions des autorités locales. Interrogés sur certaines pratiques du pouvoir régional, dénoncées par les organisation humanitaires internationales, comme celle consistant à contraindre les chrétiens montagnards à revenir au culte animiste au cours d’une cérémonie durant laquelle ils sont obligés de boire un mélange d’alcool et de sang de chèvre (3), un pasteur a dit être dans l’impossibilité de confirmer cette information, sans toutefois la rejeter comme fausse : “Je pense, a-t-il dit, que ce n’est pas une politique habituelle. Cela a pu arriver quelquefois. Mais ce n’est pas une politique dont le gouvernement est coutumier, au plus le comportement de certains individus.”

Les deux pasteurs se sont démarqués nettement des chrétiens protestants qui ont participé au soulèvement de février 2001. Les manifestants, ont-ils dit, ont été leurrés par les montagnards exilés aux Etats-Unis qui leur ont promis certains avantages financiers. La plupart d’entre eux étaient des jeunes sans vraie connaissance du message du protestantisme, associant la religion à la politique. Selon eux, la majorité des protestants de la province de Gia Lai sont orthodoxes et ne suivent pas les militants protestants qui cherchent à faire de la région un Etat séparé appelé Dega.

Le président du Comité populaire provincial de Gia Lai, Nguyên Vy, qui, semble-t-il, assistait à l’entretien a confirmé que la province de Gia Lai mettait en application une nouvelle politique religieuse, reconnaissant l’existence des “Eglises domestiques”. Il a démenti l’existence de pressions exercées sur les montagnards pour les faire revenir à leurs cultes ancestraux. Selon lui, si le gouvernement a mis tant de temps pour reconnaître l’Eglise protestante, c’est à cause des liens de celle-ci avec les Etats-Unis.