Eglises d'Asie – Taiwan
Méfiance et mise à l’écart marginalisent les “jeunes mariées” d’origine étrangère
Publié le 18/03/2010
Sœur Wei a évoqué les droits des “épouses d’origine étrangère à Taiwan” au cours d’un symposium consacré à l’“Evolution des droits des femmes taiwanaises et aux difficultés des femmes appartenant à des minorités”, qui s’est tenu du 7 au 9 mars à Nantou, dans les locaux de l’université d’Etat Chi Nan. Ce symposium, organisé à l’occasion de la Journée internationale des femmes du 8 mars, est apparu “comme une avancée alors que jamais dans le passé ce problème n’avait été officiellement abordé”, a souligné la religieuse. Bien que son Centre situé à Taipei soit davantage orienté vers les droits des minorités et des travailleurs migrants, il reçoit aussi des appels à l’aide de femmes philippines, thaïlandaises ou vietnamiennes mariées à des Taiwanais, a-t-elle expliqué. Mais le Centre ne peut traiter tous les cas parce que certains maris ou beaux-parents condamnent au silence certaines de ces femmes et vont même jusqu’à “leur cacher l’adresse de leur propre maison où elles habitent ainsi que leur numéro de téléphone de peur de les voir s’enfuir avec l’argent de la famille”, a affirmé la religieuse catholique.
Ces mariages entre des femmes originaires du Sud-Est asiatique et des Taiwanais de niveau social et culturel pauvre et malhabiles à se trouver une partenaire dans leur voisinage sont principalement des mariages arrangés par des agences spécialisées. Après avoir versé entre 200 000 et 300 000 dollars taiwanais (5 750 à 8 600 dollars américains) à l’agence qui propose une fille “aussi gracieuse que celles des années 1950”, les hommes attendent de leurs futures épouses qu’elles soient “multifonctionnelles”, c’est-à-dire aptes à leur donner un garçon, soigner leurs vieux parents et rapporter de l’argent grâce à un travail d’artisanat d’appoint. La religieuse a cité des cas de violence familiale et de mauvais traitements commis contre ces femmes, la plupart ne parlant pas chinois, quand elles ne répondaient pas à ce qu’on attendait d’elles. Dans certains cas ces femmes sont même forcées à se prostituer. Sans compter les barrières culturelles et linguistiques, quelques-unes, catholiques, sont choquées de se voir obligées de pratiquer le bouddhisme ou les religions traditionnelles chinoises. Ces épouses et leurs familles espèrent pourtant beaucoup de ces mariages qui, imaginent-elles, amélioreront leur niveau de vie. Avant d’arriver à Taiwan, ces femmes ne connaissent rien de la situation réelle de leurs maris ni qu’un permis de travail en règle leur est nécessaire. Soulignant qu’il devait y avoir à l’heure actuelle près de 100 000 femmes mariées d’origine étrangère à Taiwan, Sœur Wei a suggéré que le gouvernement modifie sa politique de naturalisation. La loi actuelle en effet, peut laisser croire que les épouses ne sont que des “intruses et des exploiteuses” au lieu de les considérer comme les mères d’une future génération de Taiwanais. Pour l’instant, les épouses d’origine étrangère doivent renoncer à leur nationalité et attendre de trois à sept ans avant d’obtenir la nationalité taiwanaise qui leur donne droit à la sécurité sociale. Comptant surtout sur l’aide des Eglises et de bénévoles, hormis trois mois de cours de langue chinoise, le gouvernement n’a mis sur pied aucun programme de formation pour ces femmes qui doivent pourtant s’intégrer à la société taiwanaise.
Les mariages mixtes ne se font pas uniquement avec des femmes du Sud-Est asiatique. Des épouses venues de Chine continentale se heurtent, elles aussi, au même genre de problème de société, a encore affirmé Sœur Wei.