Eglises d'Asie

Des catholiques taiwanais sont en désaccord avec le gouvernement sur les questions liées à la gestion de l’eau dans certaines régions de l’île

Publié le 18/03/2010




Certains agriculteurs et intellectuels catholiques taiwanais n’approuvent pas la solution adoptée par le gouvernement pour remédier à la pénurie d’eau dans les régions du sud-ouest de Taiwan. Une solution qui pénalisera l’agriculture, affirment-ils. Le 15 mars dernier, Liao Chin-chih, aborigène de l’ethnie bunum, agriculteur, catholique et directeur d’une mutuelle d’épargne, a déclaré aux journalistes de l’agence Ucanews que « le plus grand problème était le déséquilibre écologique provoqué par le développement d’industries électroniques à haute valeur ajoutée au détriment de l’agriculture ». Du fait d’une sécheresse persistante dans le district de Hsinchu, le Conseil gouvernemental de l’agriculture a ordonné de laisser en jachère 18 000 hectares de terres agricoles à partir du 1er mars afin de permettre la poursuite de l’exploitation du Parc industriel et de recherches scientifiques de Hsinchu, connu sous le nom de Silicon Valley taiwanaise’. Ce Parc consomme 120 000 m d’eau par jour tandis que les capacités d’approvisionnement n’excède pas 100 500 m , expliquent les autorités qui précisent qu’un projet de déclenchement artificiel de précipitations pluvieuses a échoué.

Dans les districts de Hsinchu et de Taoyuan, situés tous deux sur le territoire du diocèse de Hsinchu, l’eau des particuliers est rationnée, le lavage des voitures et l’alimentation les piscines, limités. Pour l’agriculteur Liao, spécialisé dans la culture biologique à Nantou, le problème n’est pas tant la mise en jachère de ses terres, fort bien indemnisée par l’Etat que la politique du gouvernement. Teresa Chang Te-lang, catéchiste de la paroisse du Christ Sauveur du diocèse de Hsinchu, fait observer, de son côté, que les exploitants des parcelles en terrasses de la région de Hsinchu sont de fait satisfaits des subventions perçues, parfois supérieures à leurs revenus antérieurs. Mais Wang Wu-chang, président de la branche asiatique d’une association rurale catholique internationale, considère que la solution gouvernementale consiste à « donner un poisson à manger à l’homme chaque fois qu’il a faim ». Ce qui, dit-il, n’aidera en rien à améliorer la situation économique des agriculteurs.

Les agriculteurs sont confrontés, certes, à de grandes difficultés depuis l’entrés de Taiwan dans l’Organisation mondiale du commerce mais ce n’est rien comparé à celles des agriculteurs de Chine continentale, explique Wang Wu-chang, par ailleurs professeur de sociologie, spécialiste des coopératives associatives. Pour sa part, il demande au gouvernement d’aider les fermiers à mettre sur pied des coopératives dans les villages agricoles et de rejoindre l’Association internationale des coopératives, afin de leur permettre de devenir compétitifs. A Taiwan, peu de gens savent que l’île est classée par les Nations Unies parmi les 18 régions du monde souffrant d’un manque d’eau endémique. Cependant, gaspiller l’eau ne semble pas être un tellement grand problème à Taiwan puisque, chaque fois que le gouvernement propose d’augmenter son prix, il essuie un refus de la part des députés soucieux avant tout de leur réélection, explique-t-il encore.

Selon les experts, le manque d’eau dans la région de Hsinchu vient du relief vallonné de cette région d’une part et, d’autre part, de l’erreur humaine qui a consisté à concentrer là une industrie de haute technologie, grande consommatrice d’eau. Depuis 1996, les entreprises installées dans le Parc se plaignent régulièrement du manque d’eau. Lin Hsin-pei, professeur catholique de l’université nationale Sun Yat-sen, qui poursuit des recherches sur les ressources en eau, a expliqué qu’il n’était « pas bon pour Taiwan » de lier la moitié de son économie à l’industrie des semi-conducteurs. Selon lui, il faut sérieusement réfléchir et décider si oui ou non sacrifier l’agriculture à l’industrie des semi-conducteurs est une politique valable. De plus, a-t-il ajouté, la pollution de l’eau, ressource déjà rare, du fait de l’activité industrielle (pétrochimie, sidérurgie, semi-conducteurs) réduit encore les réserves disponibles. L’agriculture était considérée comme importante il y a quelques années et a constitué une des bases du développement de l’île, mais aujourd’hui elle ne l’est plus et les jeunes ne veulent pas rester à la ferme.