Eglises d'Asie

Papouasie occidentale : la présence du Laskar Jihad dans la province est confirmée et les responsables religieux, chrétiens comme musulmans, s’en inquiètent

Publié le 18/03/2010




Depuis quelques mois, la nouvelle était connue : le Laskar Jihad, mouvement musulman extrémiste dit des « combattants de la guerre sainte » (1), a commencé à prendre pied en Papouasie occidentale, dans la partie la plus occidentale de la province, à Fak Fak et à Sorong notamment, deux localités situées face à l’île moluquoise de Céram (Seram) (2). Face à l’inquiétude soulevée dans les milieux religieux par la présence de ce groupe dont la présence aux Moluques a grandement contribué à entretenir et à envenimer le conflit entre les communautés chrétiennes et musulmanes, les responsables chrétiens, catholiques et protestants, ainsi que les responsables musulmans de Papouasie occidentale ont décidé d’enquêter sur les motifs de la présence du groupe dans leur province. Selon le frère franciscain J. Budi Herman, du secrétariat de la Commission Justice et paix’ du diocèse catholique de Jayapura, les responsables religieux se sont réunis à la fin du mois de mars à Jayapura, chef-lieu de la province, et ont décidé d’envoyer Zuweir Husein, de la branche papoue du MUI (Majelis Ulama Indonesia, Conseil indonésien des oulémas), à Sorong afin d’enquêter sur les motifs de la présence des combattants du djihad dans cette ville. Selon le quotidien indonésien Suara Pembaharuan, du 29 mars dernier, qui rapporte la nouvelle, les responsables religieux se réuniront à nouveau après le retour de Husein et discuteront de l’opportunité de publier un communiqué commun.

Selon le Frère Budi, la nouvelle de la présence des hommes du Laskar Jihad à Sorong et à Fak Fak s’est déjà propagée dans toute la province et les populations papoues se montrent inquiètes, craignant que les affrontements inter-communautaires qu’ont connu ces trois dernières années les Moluques et la région de Poso, à Célèbes, ne se reproduisent en Papouasie. Selon le Rév. Herman Saud, président de l’Eglise chrétienne évangélique en Papouasie, les responsables religieux de la province ont rencontré le chef local de la police et celui de l’armée et leur ont demandé d’obtenir le départ du Laskar Jihad. La réponse des forces de sécurité n’a pas été univoque.

Dans le Timika Pos, un journal local, du 26 mars dernier, Made Mangku Pastika, responsable de la police en Papouasie, a déclaré qu’il n’y avait pas de combattants du Laskar Jihad dans la province. « Je me suis rendu à Sorong et à Fak Fak et je n’y ai pas rencontré d’éléments du Laskar Jihad », a-t-il affirmé. Le 5 avril, le chef de la police à Sorong, Faisal Abdul Naser, est allé dans le même sens en déclarant dans les colonnes du Papua Post qu’il n’existait pas de preuve d’une infiltration de ce mouvement à Sorong. Cependant, le même jour mais dans les colonnes du Timika Pos, Bachtiar, commandant du détachement de l’armée présent à Sorong, a reconnu que le Forum de communication Ahlus Sunnah Wal Jamaah, organe qui chapeaute le Laskar Jihad, était présent dans sa ville et que la réaction des habitants avait été vive. Le 28 mars en effet, 32 responsables locaux, représentant les Eglises chrétiennes, des associations et diverses organisations civiques, ont publié un communiqué pour exprimer « leur ferme opposition » à la présence du Laskar Jihad dans la région.

A Djakarta, dans l’hebdomadaire Bangkit du 1-7 avril 2002, le leader du Laskar Jihad, Jafar Umar Thalib, a reconnu que ses hommes étaient effectivement présents en Papouasie occidentale et qu’ils étendaient leur présence par le biais du Forum de communication Ahlus Sunnah Wal Jamaah dont la principale activité, a-t-il précisé, est la prédication de l’islam. Présent dans la province depuis le 13 décembre 2001, le Forum a déjà établi sept branches en Papouasie, à Jayapura, à Sorong, à Fak Fak, à Timika, à Nabire, à Manokwari et dans une autre ville, a ajouté Jafar Umar Thalib.