Eglises d'Asie

Dans le sud des Philippines, acculées par les difficultés financières, des écoles catholiques luttent pour leur survie

Publié le 18/03/2010




Dans le sud des Philippines, à Mindanao, région parmi les plus pauvres du pays, un certain nombre d’écoles catholiques luttent pour garder l’équilibre entre les frais de scolarité que les parents en difficulté ne peuvent acquitter, les salaires des professeurs et le minimum de frais d’entretien à assurer. “Certains mois, une fois payés les salaires des professeurs, les caisses sont vides”, avoue Sœur Juliet Camacho, économe de l’école Sainte Croix de Babak sur l’île de Samal, dans la province de Davao del Norte. Religieuse de la Congrégation des Filles thérésiennes de Marie, la religieuse explique que l’établissement diocésain dont elle a la responsabilité en était réduit, pour l’entretien de ses locaux, à ne faire que quelques réparations mineures comme de mettre de l’enduit pour boucher les trous du toit. “Améliorer nos infrastructures est du domaine du rêve”, dit-elle. Elle explique que l’école ne peut pas compter sur l’ensemble des frais de scolarité de ses 552 élèves puisque 20 % des parents ne peuvent s’en acquitter et demandent un sursis. A chaque inscription, “les parents demandent, supplient ou font des pieds et des mains pour que je leur permette de différer le versement des frais de scolarité de leurs enfants”, précise encore la religieuse qui ajoute que bon nombre de parents sont tributaires pour leur survie de la vente de leur production de coprah, vente parfois aléatoire.

Les frais de scolarité non perçus se montaient à 100 000 pesos, soit 1 960 dollars américains, pour l’année scolaire 2000-2001. Ce manque à gagner rend difficile de garder l’équilibre entre les demandes des parents et le versement des salaires aux treize enseignants de l’école. La religieuse dit avoir pu faire face ces deux dernières années mais l’attrait des salaires élevés dans la fonction publique n’avantage pas l’enseignement catholique. Deux professeurs, dont l’un enseignait à Ste Croix depuis 19 ans, sont partis pour enseigner dans le public. A Ste Croix, le salaire mensuel de départ est de 4 400 pesos alors qu’à l’école publique, il est de 10 000 pesos.

L’école diocésaine de l’Assomption de Peqaplata a, elle aussi, de “terribles” problèmes financiers, là aussi à cause du retard des parents à s’acquitter des frais de scolarité de leurs enfants. Sœur Camacho a confié que Mgr Fernando Capalla, archevêque de Davao, avait été obligé de demander aux autres écoles de son diocèse de l’aider.

Selon Jimmy de la Vega, directeur de l’Association des collèges et écoles de Davao, les écoles de la région “souffrent d’un roulement important chez les enseignants comme chez les élèves”. Les élèves, dit-il, partent vers l’école publique, gratuite. Certaines écoles privées ont perdu l’équivalent de deux classes, chaque classe comptant de 30 à 50 élèves. Il révèle encore que 109 écoles privées sur 150 à Mindanao reçoivent des aides du gouvernement par le truchement des programmes du Bureau des contrats et des subventions du ministère de l’Education. Dans le cadre de ces programmes, une école privée reçoit 2 500 pesos par année et par élève pour les enfants que l’école publique ne peut prendre en charge. D’autre part, explique Loe de la Vega, le programme de subvention accorde aux écoles privées 500 pesos par élèves si les frais de scolarité annuels ne dépassent pas 3 500 pesos. Il note aussi que, depuis le mois de novembre 2001, le ministère de l’Education n’a pas versé la totalité des 21 millions pesos prévus pour certaines écoles, et fait remarquer que ces subventions non versées représentent “quelque chose de grave pour les écoles en difficulté. On a généralement l’impression que les écoles catholiques sont riches. En réalité, elles suffoquent, au bord de l’asphyxie”.

Les évêques des Philippines avaient déjà inscrit les écoles catholiques comme un problème majeur au programme de leur session plénière de janvier. La Conférence épiscopale et l’Association de l’enseignement catholique des Philippines doivent se rencontrer au cours de ce mois d’avril pour discuter de la situation d’ensemble de l’enseignement catholique.