Eglises d'Asie

La toute petite communauté musulmane du Timor-Oriental s’interroge sur les raisons qui ont présidé à son maintien à l’écart de la récente élection présidentielle

Publié le 18/03/2010




Après les événements d’août-septembre 1999 qui ont vu la fin de la domination indonésienne sur le Timor-Oriental, la communauté musulmane de ce pays n’a plus compté que quelques milliers de membres et il est généralement estimé que les musulmans représentent aujourd’hui à peine 2 % des près de 800 000 Est-Timorais, par ailleurs catholiques à 92 %. Pour être minoritaire, la communauté musulmane du Timor-Oriental n’en a pas moins continué à vivre et, même si les forces de l’ONU présentes dans le pays ont dû veiller à leur sécurité, elle n’a pas eu à déplorer d’actes de violence de la part de catholiques est-timorais désireux de se venger des années de l’occupation indonésienne et du saccage du territoire à l’issue du référendum d’août 1999 (1). Pourtant, à l’occasion des élections présidentielles du 14 avril dernier, les musulmans du village de Kampong Alor, situé dans le district de Dili, ont exprimé leur déception après avoir été empêchés de prendre part au scrutin par la Commission électorale indépendante.

Le jour même de l’élection présidentielle, Arham bin Haji Appe, chef de la communauté musulmane de Kampong Alor où les musulmans vivent regroupés sur les terrains appartenant à la mosquée An’nur, a déclaré : « Nous, 175 des 265 musulmans nés citoyens indonésiens, représentant 80 familles, n’avons pu exprimer nos intentions de vote car nous n’avons pas été reconnus comme étant citoyens est-timorais ». Selon Arham, les musulmans de Kampong Alor, qui ont demandé à bénéficier de la citoyenneté est-timoraise il y a deux ans, ont vu leur requête rejetée par l’UNTAET, l’administration provisoire mise en place par les Nations Unies, au motif que celle-ci n’était qu’une institution de transition. Par conséquent, tant la participation aux élections législatives d’août 2001 que celle au scrutin du 14 avril 2002 leur ont été refusées. « A la vérité, nous avons été déçus de ne pouvoir participer au processus démocratique, mais cela ne nous décourage pas de travailler à obtenir la citoyenneté afin de pouvoir prendre part à la vie démocratique de Timor Lorosae » (nom en tetum du Timor-Oriental), a précisé le leader musulman.

Selon Arham, la démarche des musulmans est soutenue par Mgr Carlos Belo, administrateur apostolique du diocèse catholique de Dili. L’an dernier, poursuit-il, l’évêque de Dili, accompagné de Mari Alkatiri, de confession musulmane et responsable de l’exécutif en place, et de Ramos Horta, ministre des Affaires étrangères du pays, se sont rendus à la mosquée An’nur et ont abordé le problème avec les responsables de la communauté musulmane. Toujours selon Arham, Ramos Horta leur a déclaré que leur citoyenneté devait être confirmée et leur a demandé de se montrer patients. Interrogé sur ce que les musulmans ont fait le jour de l’élection présidentielle, Arham a déclaré qu’ils auraient voté pour Xanana Gusmao mais que, faute de pouvoir voter, ils se sont réunis à la mosquée et ont « prié pour le succès de l’élection ».

Un peu plus d’un mois avant la proclamation officielle de l’indépendance du Timor-Oriental, le 20 mai 2002, les électeurs est-timorais ont, sans surprise, porté à la présidence de leur pays Xanana Gusmao. Le scrutin s’est déroulé dans un climat paisible, avec un fort taux de participation (85 %). L’ex-résistant a remporté 86,7 % des voix contre 17,3 % à son adversaire, Francisco Xavier do Amaral. Fort de cet appui populaire, le président de la République démocratique du Timor-Oriental aura ainsi, en dépit des pouvoirs relativement réduits que lui confère la Constitution tout récemment votée (2), la possibilité de peser sur l’Assemblée nationale dans laquelle le Fretilin occupe 55 sièges sur 88.