Eglises d'Asie

Madhya Pradesh : à Raipur, la police ouvre une école pour les jeunes délinquants vivant sur les quais de la gare

Publié le 18/03/2010




En Inde, un certain nombre d’enfants fuyant la pauvreté de leurs familles ou les mauvais traitements subis chez eux ont élu domicile sur les quais des gares où ils subsistent grâce à divers petits services rendus, en particulier la vente de divers articles alimentaires aux voyageurs, mais aussi à divers menus délits commis à leur détriment. Pour ces enfants vivant dans l’illégalité, il n’y avait pas jusqu’à présent de pire ennemie que la police qui les pourchassait jusque dans les wagons des trains, la plupart du temps, sur plaintes de voyageurs dérangés dans leur quiétude. Or, du moins dans une gare, celle de Raipur, dans l’Etat du Madhya Pradesh, à 1 775 km au sud-ouest de New Delhi, la situation a grandement changé. La police, autrefois la terreur des gamins des gares, a pris fait et cause pour eux et, fait unique en Inde et peut-être dans le monde, elle a ouvert une école pour eux.

La police du lieu, comme le raconte Vedhram Bhaskar, inspecteur divisionnaire des chemins de fer du Madhya Pradesh, lasse de punir cette population enfantine pour des fautes sans importance, a décidé, depuis deux ans, de s’occuper d’elle, de la former et de l’éduquer en la faisant accéder à l’instruction. Chaque matin, aux alentours de 7 h 30, quelque 25 enfants se regroupent dans un abri pour voyageurs au toit en amiante pour y suivre une classe où les enseignants sont des policiers bénévoles qui consacrent une partie de leur temps libre à cette tâche. L’un d’eux, qui, a-t-il dit, n’avait jamais eu l’idée de dispenser un quelconque enseignement à ses propres enfants, se ré-jouit de pouvoir enseigner ce qu’il sait aux gamins des gares (1). Des uniformes gratuits, cahiers et crayons in-dispensables aux études ont été offerts aux élèves, qui ont trouvé là un encouragement pour leurs efforts scolaires.

Ce n’est pas simplement un enseignement scolaire qui leur est offert en cette école improvisée mais une formation humaine intégrale. Chaque matin, les maîtres se préoccupent, entre autres choses, de vérifier si leurs élèves ont bien pris leur bain matinal et si leurs ongles sont faits. Les enfants sont conduits régulièrement auprès de médecins pour des bilans de santé. Ils sont initiés au yoga, aux bonnes manières, emmenés en excursion dans la nature. Des comptes en banque ont été ouverts pour eux pour qu’ils puissent y déposer le peu d’argent qu’ils gagnent durant la journée grâce à l’alimentation qu’ils vendent aux voyageurs.

Selon les témoignages des officiers de police qui s’occupent de l’école, les résultats de cette prise en main des gamins vivant sur les quais ont dépassé toutes les espérances. Correctement habillés, souriants, les élèves ont désormais abandonné leur ancien parler argotique, leurs bagarres, la drogue et le vol. Ils redeviennent peu à peu semblables à des enfants normaux, ne fuient plus la police, lisent les journaux et se conduisent avec courtoisie. Six élèves de l’école viennent d’être brillamment reçus à des examens officiels. Interrogé, l’un d’entre eux, qui n’a pas connu son père et dont la mère gagnait sa vie en portant de lourdes charges, a déclaré qu’il songeait maintenant à faire des études de médecine.

Déjà ses premiers résultats ont fait connaître l’école de la gare de Raipur dans le pays et deux écoles semblables ont été ouvertes dans d’autres gares par des associations caritatives. Afin d’assurer sa pérennité même si les policiers-enseignants bénévoles sont affectés par un changement de poste, l’école cherche maintenant à se faire enregistrer au plan fédéral par le ministère de l’éducation. De toute façon, elle ne compte pas s’en tenir aux résultats obtenus jusqu’à présent. Elle désire pouvoir offrir un enseignement technique à ses jeunes élèves afin qu’ils puissent se présenter avec certains atouts sur le marché du travail.