Eglises d'Asie

Le parlement a voté à l’unanimité moins une voix la légalisation de l’avortement

Publié le 18/03/2010




Le 14 mars dernier, à la quasi-unanimité (147 voix pour et 1 voix contre), le parlement népalais a voté la légalisation de l’avortement. Le texte, qui doit être signé prochainement par le roi Gyanendra Bir Bikram Shah Dev pour avoir pleinement force de loi, faisait partie d’un projet législatif plus large au sujet des droits de la femme et comprenait d’autres volets tels que l’affirmation du droit de propriété pour les femmes. Classé parmi les crimes jusqu’à cette date et assimilé à un infanticide (1), l’avortement sera désormais légal et sans condition s’il est demandé au cours des douze premières semaines de grossesse et pourra être requis jusqu’à dix-huit semaines de grossesse en cas de viol, d’inceste ou si la santé de la mère est en danger ou bien encore en cas de malformation du fœtus.

Dans ce pays hindou à près de 90 %, un sondage réalisé en 2000 avait indiqué que les trois-quarts de la population environ étaient opposés à l’avortement, que ce soit pour des raisons religieuses ou socioculturelles (2). Depuis 1996, la légalisation de l’avortement est revenue plusieurs fois à l’ordre du jour du parlement mais, à chaque fois, elle avait été refusée. Cette année, très peu d’opposants à l’avortement se sont manifestés. Dans le camp des partisans de la légalisation de l’avortement, l’Association du planning familial du Népal a fait campagne pour assurer à l’avortement des conditions de sécurité, une pratique largement répandue malgré son caractère illégal. « Nous voulons faire de l’avortement un acte plus sûr. Le taux des femmes qui meurent en couches au Népal est le quatrième plus élevé au monde », a ainsi affirmé Nirmal Bista, directrice du Planning familial. Dans le camp des adversaires de la légalisation de l’avortement, la mobilisation a été très faible, voire inexistante. Le P. Silas Bogati, prêtre de la paroisse catholique de l’Assomption à Katmandou, a ainsi déclaré : « Je ne connais qu’une seule personne active dans le camp des anti-avortements au Népal. et il s’agit d’un hindou. » Selon le prêtre catholique, il est « trop tard » pour faire campagne contre la légalisation de l’avortement.

Pour Shyam Sharma, catholique convertie, la légalisation de l’avortement, même si elle est regrettable, ne changera malheureusement pas grand-chose à la situation actuelle « où chacun sait que l’avortement est pratiqué quasi-ouvertement ». « Il est très difficile pour une femme au Népal de respecter l’interdit de l’avortement et de garder un fœtus non désiré par le père, tout particulièrement si elle n’est pas mariée », ajoute Shyam Sharma.

Selon un responsable de l’Eglise catholique, qui a tenu à préserver l’anonymat, de nombreux catholiques au Népal « ne réalisent pas la gravité du crime qu’est un avortement » et pourtant, ajoute-t-il, « nous ne devons pas nous montrer hypocrites et nous cacher que même les chrétiens au Népal recourent à l’avortement. Ils utilisent des méthodes de contraception artificielle ou se font opérer pour être débarrassées de la question du contrôle des naissances. » Selon une catholique âgée, « ces choses ne sont pas abordées en public ou avec des personnes du sexe opposé ». Elle remarque que l’Eglise n’a pas toujours su trouver les mots pour exprimer le message chrétien sur ces questions : « Il y a quelques années de cela, un prêtre nous a réunies, nous des femmes, pour nous dire qu’il n’était plus nécessaire de confesser continuellement le recours à des méthodes contraceptives (artificielles) ».