Eglises d'Asie

Deux journaux locaux du Gujarat sont accusés d’avoir présenté une version tendancieuse des troubles qui ont ravagé la région

Publié le 18/03/2010




La “Guilde des rédacteurs de presse” avait chargé un groupe de journalistes de mener une enquête sur la façon dont avaient été couverts par la presse nationale les troubles ayant mis une partie du Gujarat “à feu et à sang”, à partir du 27 février, violences qui, aujourd’hui, ne sont que partiellement terminées. Le groupe était composé de trois grands noms de la presse nationale, Dileep Padgaonkar du Times of India, Aakar Patel de Mid-Day de Bombay, et B.G. Verghese, ancien rédacteur au The Hindustan Times. Du 31 mars au 6 avril, les enquêteurs se sont rendus sur les lieux touchés par les émeutes, ont pris contact avec les plus hautes autorités de l’Etat et consulté les récits et reportages rédigés à ce sujet dans la presse. Le résultat de cette enquête est contenu dans un copieux rapport de 254 pages qui vient d’être publié.

La conclusion de l’ouvrage est toute en faveur de l’objectivité des organes de la presse nationale et d’une partie des médias du Gujarat, dont il est dit qu’ils ont été exemplaires dans leurs comptes-rendus quotidiens des troubles intercommunautaires. La condamnation sans complaisance portée par l’équipe d’enquête contre les deux principaux quotidiens du Gujarat n’en prend que plus de poids. Selon le rapport d’enquête, en effet, les deux journaux de l’Etat, Sandesh et Gujarat Samachar, auraient, dans un premier temps, publié des comptes-rendus “provocateurs et irresponsables” du drame de la gare de Godhra, le 27 février (1). Ce jour-là, un convoi ramenant des militants hindouistes de Ayodhya, alors qu’il quittait la gare de Godhra, a été attaqué et incendié par une foule de plusieurs milliers de musulmans. A l’arrivée de la police sur les lieux, il y avait 58 morts dont 15 enfants. Le rapport d’enquête voit dans le contenu des articles publiés à ce sujet dans les journaux incriminés une intention délibérée d’inciter à la violence, de propager la haine et d’alimenter la discorde. D’une façon générale, la couverture donnée par les deux journaux locaux aux événements qui ont suivi l’attaque du train reflète une volonté de provocation, absolument incompatible avec les normes ordinaires de la déontologie journalistique.

En conclusion, le groupe chargé d’enquête suggère au gouvernement de nommer un haut magistrat chargé de déterminer les infractions à la loi commises par les auteurs des écrits incriminés et de recommander la mise en œuvre d’une action de justice contre les journaux qui les ont publiés. Le Gujarat Samachar et le Sandesh, les deux journaux mis en cause par l’enquête, sont deux importants quotidiens de la région, en langue locale. En temps ordinaire, ils tirent respectivement à 810 000 et à 705 000 exemplaires. Depuis le début des troubles du Gujarat, leur nombre de lecteurs a plus que doublé à tel point que 1 500 000 exemplaires du Sandesh sont vendus chaque jour.