Eglises d'Asie

Les écoles catholiques dénoncent une tentative d’islamisation des programmes scolaires

Publié le 18/03/2010




Les responsables d’écoles catholiques dans le pays ont rejeté comme étant une tentative d’islamisation des écoles et des esprits une réforme des programmes scolaires du second cycle lancée par le ministère de l’Education nationale. Selon le jésuite Theodorus Sukristiyono, directeur du lycée De Britto à Yogyakarta, « sur le fond, le document (présenté par le ministère) cherche à donner une coloration religieuse à tous les sujets enseignés afin de toucher les étudiants. A ce jour, c’est ce que nous avons fait dans notre école dans la mesure où cela est en accord avec notre mission et la vision que nous avons de notre établissement. Or, la réforme vise à lier tout l’enseignement au Coran et à la tradition musulmane (Hadith). Nous ne sommes pas compétents pour l’appliquer car nos enseignants et nos élèves ne sont pas familiers de ces éléments. Il est difficile et injuste de lier tout enseignement aux seuls enseignements de l’islam. Cela nous donne l’impression que le but recherché par le gouvernement est de convaincre les élèves de la supériorité de l’islam. »

Selon Aliyanto, responsable au ministère de l’Education nationale du département supervisant les éco-les secondaires, lier la foi et la piété avec les programmes scolaires est un projet déjà ancien, antérieur aux réformes introduites depuis 1998, année de la chute du président Suharto. Le nouveau programme est présenté comme précisant le Programme national de 1994 et est intitulé : « Document sur la pertinence de 10 matières dans le second cycle de l’enseignement secondaire en lien avec la foi et la dévotion ». Publié en avril dernier par le ministère, il a pour objectif d’améliorer le point de vue religieux des enseignants. Pour ce faire, des liens sont systématiquement institués entre la foi mu-sulmane et les dix matières suivantes : bahasa indonesia (la langue indonésienne), littérature, anglais, mathématique, physique, biologie, santé et sport, histoire, sciences sociales et éducation civique.

La réaction de la quasi-totalité des enseignants des lycées catholiques a été négative. Hilarius Yosep Ponijan, directeur d’une école secondaire catholique, estime que le gouvernement promeut cette réforme dans l’espoir de toucher les « Islam abangan » (musulmans qui ne professent que formellement l’islam) et dénonce le fait que les élèves chrétiens dans les écoles publiques soient obligés de suivre des cours de religion musulmane, là où les élèves musulmans des écoles catholiques ne sont pas contraints de suivre des cours de religion chrétienne. Pour Yohana Maria Mia Belang, professeur de langue et de littérature indonésiennes dans un lycée public de Yogyakarta, il est « bizarre » de lier les matières qu’elle enseigne avec des passages d’Ecritures saintes, quels qu’ils soient. De confession catholique, cette enseignante estime que, « par la mise en œuvre de cette politique, les élèves sont indirectement conditionnés à considérer toute autre religion comme étant inférieure, voire même antagoniste avec l’islam ».

Cependant, le jésuite Mardi Santoso, professeur de mathématiques au lycée De Britto, a fait remarquer que, si effectivement « tenter de lier l’enseignement des mathématiques avec la foi et la dévotion » est artificiel, les chrétiens ne doivent pas se montrer trop inquiets de cette mesure. « Il suffit de l’ignorer, a-t-il déclaré. Après tout, à l’heure de l’autonomie régionale, nous pouvons mettre au point nos propres programmes d’enseignement. » Un fonctionnaire du ministère de l’Education nationale a confirmé que, depuis la décentralisation mise en place ces dernières années, « les provinces peuvent adopter et ajuster les directives (reçues de l’Etat central) en fonction de leur propre situation ».