Eglises d'Asie

Selon un prêtre catholique, vice-président de la commission pour la réconciliation et la vérité au Timor-Oriental, l’Indonésie doit être jugée devant un tribunal international

Publié le 18/03/2010




Le 17 mai dernier, le P. Jovito Rego de Jesus Araujo, vice-président de la commission pour la réconciliation et la vérité mise en place au début de cette année par l’UNTAET, l’administration transitoire mise en place par l’ONU (1), a déclaré que le jugement des autorités indonésiennes pour crimes de guerre devant un tribunal international était la seule façon d’établir la justice au Timor-Oriental. Selon le prêtre catholique, le gouvernement indonésien a été “le maître d’œuvre de toutes les atrocités” commises au Timor-Oriental entre 1975 et 1999 et doit donc être tenu pour responsable, tout comme doivent l’être “les forces externes qui ont donné l’opportunité [à l’Indonésie] de perpétrer des violations des droits de l’homme telles que l’Australie et les Etats-Unis qui “ont donné l’ordre à l’Indonésie d’envahir le Timor-Oriental”. Etablie au début de cette année, la Commission pour la Recherche de la Vérité et de la Réconciliation au Timor-Oriental a pour tâche d’enquêter sur les abus des droits de l’homme commis entre 1974 et 1999, soit une période qui va de la guerre civile qui a eu lieu au Timor-Oriental lors du retrait du Portugal au référendum d’août 1999 à la mise à sac du territoire par l’armée indonésienne et les milices est-timoraises à sa solde.

Selon le P. Araujo, le président du Timor-Oriental, Xanana’ Gusmao, par ses engagements et ses déclarations, penche en faveur de la réconciliation plutôt que pour la justice. “Gusmao souhaite la réconciliation en premier lieu et ensuite la justice. Mais comment cela pourrait-il se faire ? La réconciliation ne sera pas possible si la justice n’est pas faite”, a-t-il affirmé. En effet, le défi qui se présente aux autorités est de prévenir les représailles qui pourraient être exercées contre les auteurs de crimes s’ils reviennent au Timor-Oriental du Timor occidental où ils sont toujours réfugiés. Ce défi, estimé le P. Araujo, ne peut être relevé que si un véritable système judiciaire fonctionne. “La plupart des responsables politiques cherchent à préserver de bonnes relations avec l’Indonésie. Mais les gens attendent que justice soit rendue. Si le système judiciaire faillit à sa mission, nous allons au devant de graves problèmes, a mis en garde le prêtre. La justice sera rendue par la rue.”

L’Eglise catholique a un rôle crucial à jouer ici, a encore déclaré le P. Araujo. “Dans les paroisses et les communautés, le clergé doit prendre l’initiative”, a-t-il ajouté, soulignant le fait que la réconciliation est au cœur de l’action pastorale : apprendre à vivre en harmonie et en paix, améliorer la compréhension que les gens ont de la foi chrétienne. Selon lui, la foi de nombreux Timorais manque de maturité : “Parfois, ils confondent la religion et la foi, deux choses distinctes. Ils ne vivent pas leur foi mais peuvent se montrer fanatiques dans la défense de leur religion.” Pendant presque cinq cents ans, les missionnaires portugais ont prêché la religion catholique et les gens ont généralement une compréhension très vague des autres religions ou confessions – “c’est le péché de la colonisation”, a souligné le prêtre. Le résultat est que les Timorais de l’Est sont “devenus très exclusifs, fanatiques en matière de religion” mais n’ont pas véritablement approfondi leur foi.