Eglises d'Asie

La présence de l’armée américaine dans le pays provoque des débats au sein de l’Eglise catholique

Publié le 18/03/2010




La présence de troupes américaines dans le pays, dont le nombre s’élève à environ 4 000 hommes, depuis le mois de février dernier (1) soulève des débats. Dans les cercles politiques, certains se sont ouvertement interrogés sur la constitutionnalité de cette présence. Au sein des milieux catholiques, les discussions sont également vives.

Le 12 juin dernier, Mgr Deogracias Iniguez Jr., évêque du diocèse d’Iba et vice-président de la Commission pour les questions œcuméniques de la Conférence épiscopale philippine, a présidé un congrès réunissant 200 personnes appartenant à différentes Eglises chrétiennes du pays, que ce soit l’Eglise catholique, diverses dénominations protestantes ou l’Eglise indépendante des Philippines. Rassemblés sous la bannière de “Cry Out Now !”, les participants à ce congrès ont exprimé leur frustration de voir les troupes américaines s’installer dans le pays. Des orateurs ont dénoncé l’exercice conjoint des armées philippines et américaines, baptisé Balikatan ( épaule contre épaule’), dont la raison d’être officielle est la lutte contre le groupe Abu Sayyaf et “la guerre contre le terrorisme”, et dont la date finale, annoncée pour le 31 juillet 2002, a toutes les chances d’être repoussée. Sœur Angelita Navarro, co-présidente de Cry Out Now !, a ainsi déclaré que, dans les écoles gérées par sa congrégation, les Sœurs missionnaires du Cœur immaculé de Marie, des projections de films allaient être organisées pour informer les enseignants et les élèves des “plans stratégiques des Etats-Unis pour pénétrer les pays du Tiers Monde”.

Mgr Iniguez, pour sa part, tout en appelant à la “vigilance” en ce qui concerne la “protection de la souveraineté nationale”, a précisé que les groupes favorables ou hostiles à la présence américaine dans le pays devaient “dialoguer et réfléchir au contexte local, national et international” de cette présence. Il a souligné qu’un certain nombre d’évêques catholiques du pays n’étaient pas opposés à la présence de l’armée américaine car c’était là le souhait de leurs fidèles.

A Lamitan, sur l’île de Basilan, région concernée au premier chef par les agissements du groupe Abu Sayyaf, le P. Cirilo Nacorda, curé du lieu, 3 000 de ses paroissiens et des “citoyens inquiets” ont adressé une pétition à la présidente Gloria Macapagal-Arroyo pour dire leur souhait de voir les troupes américaines rester sur place à l’issue de Balikatan, des troupes qui ont apporté “un espoir de paix et de prospérité dans la région”. Pour Mgr Martin Jumoad, évêque d’Isabela, dont dépend l’île de Basilan, le désir de sécurité des habitants est “compréhensible”, les résidants de Basilan ayant bénéficié des puits et des routes aménagés par les troupes américaines. Toutefois, a-t-il ajouté, l’entraînement des troupes philippines par l’armée américaine ne devrait pas être prolongé car l’arrivée d’hommes du génie américains et la multiplication des réalisations en dur suggèrent que l’intention des Américains est d’installer une base sur l’île, éventualité peu souhaitée.

Pour Mgr Dinualdo Gutierrez, évêque de Marbel et président de la Commission épiscopale pour l’Action sociale, Justice et Paix, l’accueil fait par ses diocésains aux Américains est bon car “ils ne font pas confiance à la police et à l’armée philippine pour faire le travail”. “Je ne partage par leur opinion mais je me dois de respecter les craintes des gens”, a-t-il ajouté, précisant que son souci était de constater que les Philippins étaient dépendants des Américains au lieu de devenir “responsables et autonomes”. Il a encore déclaré que Mgr Orlando Quevedo, archevêque de Cotabato et président de la Conférence épiscopale, avait demandé aux évêques du pays d’être “réceptifs aux gens et à leurs désirs”.