Eglises d'Asie

De nouveaux détails sur une enquête religieuse menée au Vietnam par un groupe américain en février 2002

Publié le 18/03/2010




Dans une interview accordée à la chaîne de télévision vietnamienne TV 4, le 15 mai dernier (1), Lê Quang Vinh, le directeur du Bureau des Affaires religieuses, de retour d’une mission officielle aux Etats-Unis, avait fait allusion à la visite d’une délégation du “Comité américain de la liberté religieuse dans le monde venue au Vietnam à la fin de février 2002, sur invitation du gouvernement, enquêter sur la liberté religieuse. Selon le fonctionnaire vietnamien, cette délégation, dont il a été fait peu de cas à l’époque, aurait rencontré les principaux responsables religieux du pays et serait repartie satisfaite. D’autres échos de ce voyage viennent d’être donnés par une émission en vietnamien de Radio Free Asia diffusée le 28 juin 2002. Celle-ci a repris dans le détail une interview accordée à la chaîne ACTD par le chef de la délégation en question, Firuz Kazemzadeh, immédiatement après son voyage au Vietnam en février. Il y expose, en particulier, les impressions que lui et la délégation ont retirées de leur séjour au Vietnam du 20 au 28 février 2002.

La première question posée au chef de la délégation américaine visait à savoir si son groupe avait rencontré d’autres personnalités que les fonctionnaires chargés des affaires religieuses et les personnes choisies par ces derniers pour être présentées aux étrangers. Avait-il rencontré les dirigeants du bouddhisme unifié (bouddhisme dissident), ceux de l’Eglise catholique, du Caodaïsme ou du bouddhisme Hoa Hao ? Le chef de la délégation américaine a répondu : “Notre délégation a essayé de contacter de telles personnalités, mais d’une façon non officielle. Nous n’avions pas présenté leurs noms à l’avance car le gouvernement vietnamien cherchait à contrôler tous nos déplacements. Pourtant, en quelques occasions, nous avons eu des contacts discrets non officiels avec des éléments non officiels. Ce sont des rencontres qui ont déplu au gouvernement.” Pressé de donner des précisions, Firuz Kazemzadeh a révélé que la délégation avait par téléphone, donné des rendez-vous à un certain nombre de personnes qu’elle désirait voir. Ces rencontres avaient eu lieu, secrètement, à des moments de la journée, laissés libres par le programme officiel. Le chef de la délégation a même ajouté qu’il avait admiré le courage des personnes ainsi contactées.

Le chef de la délégation américaine a aussi donné des exemples du type de dialogue qu’ils avaient noué avec leurs interlocuteurs gouvernementaux. Certaines questions posées par la délégation ont porté sur diverses arrestations et mises en résidence surveillée de religieux. A la question concernant le vénérable Thich Quang Do et son internement dans sa propre cellule monastique de Thanh Minh Thiên Viên, il a été répondu que le religieux était ainsi puni pour avoir violé la loi de l’Etat. Mais les interlocuteurs n’ont pas su préciser de quelle loi il s’agissait et ont changé de sujet. Lorsque la délégation a demandé qu’on lui explique le motif pour lequel il était impossible de prendre contact avec certaines personnalités religieuses, les représentants du gouvernement ont expliqué que celles-ci, astreintes à la résidence surveillée, ne pouvaient rencontrer les gens de l’extérieur. En conclusion le docteur Firuz Kazemzadeh a déclaré : “Mon impression est que, actuellement, il n’y a pas de liberté religieuse au Vietnam, car les autorités veulent contrôler étroitement toutes les religions et les organisations religieuses. Celles qu’ils ne peuvent contrôler, ils les interdisent…”

Les indications données par le chef de la délégation américaine avaient été corroborées immédiatement après le voyage par un communiqué du Bouddhisme Hoa Hao à l’étranger (2). La délégation ayant manifesté le désir de rencontrer Lê Quang Liêm, le leader traditionnel du bouddhisme Hoa Hao, la police s’est opposée à cette rencontre, a cerné sa résidence après avoir fait confisquer les téléphones portables qui s’y trouvaient. Puis au lieu d’être conduite vers la résidence de Lê Quang Liêm, comme elle l’avait demandé, la délégation a été guidée vers le siège du Comité Hoa Hao parrainé par l’Etat. Cependant, grâce à un stratagème non révélé, le dirigeant du bouddhisme Hoa Hao a pu s’entretenir une heure durant avec le chef de la délégation.