Eglises d'Asie

Un ancien parlementaire du Golkar ressuscite l’ex-Parti catholique (Partai Katolik)

Publié le 18/03/2010




Le 1er août dernier, devant environ 300 catholiques réunis à Djakarta, Johannes Riberu a présidé à la cérémonie marquant la renaissance du Parti catholique (Partai Katolik), formation politique disparue en 1973 lorsque Suharto, alors chef de l’Etat indonésien, avait réduit le nombre des partis de dix à trois. Selon Johannes Riberu, ancien parlementaire et membre du Golkar, la formation au pouvoir du temps des présidents Suharto et Habibie, la renaissance de ce parti a pour objet de « rappeler au gouvernement et à la société que l’Indonésie est une nation plurielle où aucune discrimination ne saurait être admise ». Plaçant son initiative dans la lignée de l’enseignement de l’Eglise et en particulier de « la mission confiée aux laïcs telle qu’elle a été exprimée par le Concile de Vatican II précisant que son parti avait pour ambition d’être « comme le sel et la lumière au sein du système politique indonésien », Johannes Riberu n’a cependant pas reçu le soutien de la hiérarchie de l’Eglise catholique.

Au mois de mars dernier, des intellectuels et responsables politiques catholiques s’étaient réunis à Djakarta afin de débattre de l’opportunité pour les catholiques de disposer d’une formation politique qui leur soit propre. A quelques exceptions près, un consensus s’était dégagé pour affirmer que les catholiques indonésiens, qui forment un peu moins de 4 % de la population du pays, devaient s’efforcer de placer les valeurs chrétiennes au centre du débat politique mais qu’il n’était pas nécessaire pour cela de former un parti catholique en tant que tel (1). Sans surprise, l’initiative de Johannes Riberu n’a donc pas soulevé beaucoup d’enthousiasme dans les cercles catholiques du pays. Pour Frans Seda, qui fut président du Partai Katolik dans les années 1960 et qui est aujourd’hui, à 75 ans, un proche de la présidente Megawati Sukarnoputri, les catholiques peuvent plus efficacement défendre les valeurs chrétiennes en rejoignant les partis dominants et en les inspirant de l’intérieur plutôt qu’en créant un nouvel outil politique.

Réagissant au nom des évêques catholiques indonésiens, le P. Fransiskus Xaverius Agus Suryana Gunadi, secrétaire exécutif de la Commission pour l’apostolat des laïcs de la Conférence épiscopale, a déclaré ne pas accorder une importance excessive à la renaissance de ce parti. « Quel avantage y a-t-il à mettre en avant une étiquette catholique dans une société pluraliste où les catholiques ne sont qu’une petite minorité ? », a-t-il commenté, ajoutant : « Si nous voulons être le sel et la lumière dans la société, il est inutile de créer un parti s’affichant comme catholique et nous laisser ainsi enfermer à l’intérieur de notre propre communauté. » Précisant que le Partai Katolik ne pouvait prétendre représenter les catholiques indonésiens, le P. Gunadi a toutefois ajouté que la hiérarchie de l’Eglise respectait la liberté de s’affilier à un parti politique, quel qu’il soit, pourvu que ce parti ouvre au bien commun.

Face à ces critiques implicites ou exprimées ouvertement, Johannes Riberu a répondu en mettant en avant la devise de son parti : « Salus Populi Suprema Lex » (‘Le bien du peuple est la loi suprême’). « Nous ne sommes pas étroits d’esprit. Nous ne menons pas notre combat pour nous-mêmes mais pour tout le peuple a-t-il déclaré. Selon le P. Alex Paat, modérateur du nouveau parti, « notre objectif n’est pas de remporter les prochaines élections législatives mais de proposer une alternative dans la sphère politique indonésienne – défendre la vérité et donner de l’amour à tous ». Le prêtre catholique a ajouté : « L’important n’est pas que l’Eglise nous soutienne ou non. Mais l’Eglise a pour mission de guider les laïcs à exercer leur responsabilité politique selon la morale et la foi catholiques ».

Outre ce nouveau Partai Katolik, la scène politique compte deux autres formations d’inspiration directement chrétienne : le Partai Kristen Indonesia, formé l’an dernier par des protestants, et le Partai Katolik Demokrat, formé il y a quelques années par de jeunes catholiques.