Eglises d'Asie

Un envoyé du Vatican demande avec insistance aux paroisses de Singapour de ne pas traiter les travailleurs migrants en étrangers

Publié le 18/03/2010




En visite dans la cité-Etat, Mgr Stephan Hamao, président du Conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des gens du voyage, a demandé avec insistance aux paroisses catholiques de Singapour de ne pas traiter en étrangers les travailleurs migrants. Prenant la parole le 8 juillet dernier lors d’une rencontre avec des représentants des communautés philippine, indienne, birmane et sri lankaise organisée par la Commission diocésaine pour la pastorale des migrants et des gens du voyage (1), Mgr Hamao a déclaré : “L’Eglise locale est toujours responsable des migrants et des réfugiés, spécialement quand ils n’ont pas d’aumônier ou de missionnaire pour s’occuper d’eux”. Accueillir les migrants “est le devoir de la communauté locale comme il est du devoir des chrétiens migrants de participer à la vie communautaire du pays qui les reçoit», a-t-il encore précisé.

Insistant sur la nécessité de participer à l’actualisation de cette réalité qu’est la famille humaine, il a demandé à l’Eglise locale de respecter les droits des migrants et la liberté religieuse. Mgr Hamao a aussi fait l’éloge de ceux qui aident les migrants en situation difficile, regrettant que leur travail ne soit pas assez apprécié. Néanmoins, il a recommandé que ces personnes ou ces groupes fassent souvent le point pour voir si leurs actions sont bien dans la ligne d’une reconnaissance du Christ présent dans chaque migrant dans le besoin. Il a appelé les bénévoles à s’interroger : “Ai-je servi le Christ à travers mes actions charitables en faveur des migrants ? Ne suis-je simplement que le membre d’une ONG comme les autres ? Qu’est-ce qui me différencie d’eux ?”. Les bénévoles chrétiens ont besoin d’être bien formés dans leur foi, a-t-il encore fait remarquer, “en particulier ceux qui sont au contact de personnes de religion différente”.

Au cours de cette rencontre, les représentants des divers groupes au service des communautés migrantes ont exposé leurs besoins. Le frère franciscain Peter Michael, qui travaille auprès des Tamouls indiens depuis une dizaine d’années, a confié que la plupart de ses administrés étaient des ouvriers du bâtiment sans instruction. A cause de leur ignorance, dit-il, “ils se font escroquer facilement par les agences pour l’emploi”. Le religieux a expliqué que leur premier mois de salaire était fréquemment confisqué par les agences de recrutement. Un autre délégué a indiqué que ces “confiscations” pouvaient aller jusqu’à six mois pour nombre de migrants employés comme domestiques.

Bridget Lew, responsable de la Commission diocésaine pour les migrants, a expliqué que, selon la loi relative à l’Agence nationale pour l’emploi, les recruteurs n’ont pas le droit de prélever plus de 10 % du salaire d’un employé. Mais, dit-elle, l’Agence nationale n’arrive pas à faire arrêter les recruteurs malhonnêtes parce que les travailleurs migrants ne les dénoncent pas, de peur des représailles. Elle a aussi précisé que la Commission diocésaine proposait un modèle type de contrat d’embauche, mis à la disposition de tous dans toutes les ambassades de Singapour. Jean Hsi, un Singapourien au service des Sri Lankais, a signalé qu’ils n’avaient pas encore de local “pour eux”, où ils pourraient célébrer la messe dans leur langue comme les Philippins et les Indiens. D’après Lew, les migrants deviennent souvent des “clandestins” parce que leurs passeports leur ont été retirés par les recruteurs des agences. Pris par la police, ils sont alors battus, emprisonnés. Ils ne sont expulsés que s’ils ont de l’argent pour payer leur retour au pays. Certains, cependant, ont l’autorisation de travailler pour payer leur voyage, d’autres non.