Eglises d'Asie – Vietnam
Un nouveau document semi-officiel suggère une future politique religieuse apparemment plus libérale mais aussi plus contraignante
Publié le 18/03/2010
Une première série d’avis porte sur les nombreux conflits et controverses opposant, aujourd’hui, au nord comme au sud, l’Etat et les religions au sujet de la propriété de terrains ou de lieux de culte. Une série de principes ont été retenus en vue de régler ces différends. Il est dit en premier lieu que ce sont les intérêts du peuple qui importent mais que l’on doit apporter des solutions conformes aux conditions et à la situation du pays, ainsi qu’aux exigences particulières des diverses religions. Il est ensuite affirmé clairement que l’Etat ne rendra pas les biens et les établissements qui lui ont été « offerts ». Cependant, les services gouvernementaux ont le devoir d’utiliser ces biens en fonction des objectifs fixés lors du « don à savoir éducatifs, sociaux ou caritatifs. Ils n’ont pas le droit de les donner, vendre ou louer à des individus. Par ailleurs, selon certaines opinions recueillies, il importe d’examiner la légitimité du don fait au gouvernement. Un curé peut-il signer une offre sans avis de l’évêque du diocèse, le véritable propriétaire du bien ? Des pressions ont-elles été exercées sur le donateur ? Par contre, les terrains et établissements empruntés pour un temps déterminé, plus ou moins long, par les services étatiques, ou accaparés par le « peuple » en fonction de ses besoins, en principe, devront être rendus dans leur état premier ; sinon, ils seront échangés ou encore rachetés aux associations religieuses par leurs utilisateurs actuels.
A plusieurs reprises, la Conférence épiscopale du Vietnam a fait état de son désir d’engager à nouveau l’Eglise dans des activités sociales, éducatives, culturelles et médicales, très nombreuses avant le changement de régime de 1975. C’est l’objet de la deuxième rubrique du document du Conseil consultatif. Les participants auraient été unanimes pour que, dans le cadre de la politique de socialisation (i.e. privatisation) du gouvernement (3), les diverses religions soient autorisées à ouvrir des écoles, non seulement des écoles maternelles comme aujourd’hui, mais aussi des établissements de tout niveau, aussi bien primaire que secondaire, des écoles professionnelles et même des instituts universitaires. Bien d’autres domaines devraient leur être ouverts, comme celui des sports, des loisirs, de la santé, etc. C’est, sans doute, la première fois qu’un document semi-officiel envisage de telles possibilités pour les communautés religieuses, même s’il ne s’agit ici que d’opinions recueillies chez les cadres religieux du régime, opinions qui n’ont reçu aucune approbation officielle du pouvoir exécutif. De plus, le document souligne que cette collaboration des communautés religieuses devrait être strictement contrôlée par l’Etat, les divers ministères et les syndicats.
D’autres sujets très brûlants ont été encore abordés dans ce document, avec moins de libéralisme. Le texte a souligné très fortement la nécessité de renforcer le contrôle de l’Etat et du Front patriotique sur la formation sacerdotale dans les séminaires. Ce contrôle devra porter sur « l’organisation des écoles de formation religieuse, sur le contenu de l’enseignement, le programme d’études, le recrutement du corps enseignant Les cours d’instruction idéologique et civique devront être obligatoires. Cependant, le texte souhaite que l’Etat accorde avec plus de générosité la permission d’ouvrir de nouveaux séminaires, ce qui éviterait l’existence d’institutions clandestines, trop nombreuses aujourd’hui.
Au sujet des mouvements et des associations religieuses, trois types d’opinion ont été émis. Certains demandent à l’Etat d’abandonner son attitude défiante et de ne plus poser la question de la nature réelle des associations religieuses en activité aujourd’hui. Il suffirait de considérer leurs activités comme les activités religieuses ordinaires de l’Eglise au même titre que les cérémonies religieuses et de les reconnaître comme telles. D’autres opinions recommandent de reconnaître automatiquement des associations dont les activités sont purement religieuses comme les chorales et les fanfares. Les autres mouvements impliquant des réunions et des rassemblements populaires auront besoin de l’examen et de la permission des autorités. Enfin, d’autres préconisent que n’importe quel mouvement ou association religieuse soit soumis à l’obligation de l’enregistrement et de la reconnaissance par l’Etat.
Apparemment, si l’on considère les solutions préconisées par la majorité des participants, on est frappé par leur libéralisme en comparaison avec l’ensemble de la réglementation religieuse en vigueur actuellement. Cependant, cette apparente ouverture est accompagnée d’un contrôle accru aussi bien sur les esprits que sur le fonctionnement de divers établissements religieux comme, par exemple, les séminaires. Le document donne l’impression que l’Etat communiste vietnamien voit sans trop de déplaisir s’étendre la zone d’activités et d’influence des religions, à condition d’en contrôler strictement les orientations et les manières de faire.