Eglises d'Asie

Assam : une religieuse accusée de conversion forcée et de meurtre est emprisonnée avant d’être libérée sous caution

Publié le 18/03/2010




Dans le diocèse de Dibrugarh, en Assam, au nord-est de l’Inde, une religieuse de la congrégation du Cour immaculée de Marie, la sour Lucela Lakra, a été arrêtée le 22 juillet dernier et emprisonnée pendant 44 jours jusqu’à sa récente libération sous caution. La police et un certain nombre de responsables locaux du parti au pouvoir, le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP), l’ont accusée d’avoir tenté de convertir de force sa belle-sour, Meena Tanti, et n’y ayant pas réussi, de lui avoir donné la mort. Tanti, l’épouse de son frère, âgée de 24 ans, est morte le 21 juillet, à la suite de brûlures très graves dont les causes ne sont pas à ce jour éclaircies.

La religieuse et sa famille affirment que la victime s’est elle-même infligée les brûlures qui ont entraîné sa mort trois jours plus tard, tandis que ses accusateurs prétendent que celle-ci, avant de mourir, aurait révélé que la sour Lucela Lakra avait versé du kérosène sur elle et y avait mis le feu, avant de fermer la porte de la maison à clef de l’extérieur. Cette version des faits est vivement démen-tie par la religieuse, d’ordinaire en poste dans le diocèse de Krishnagar, au Bengale oriental, mais qui, à cette époque, était en congé dans sa famille. Selon ses dires, elle était en conversation avec des gens du voisinage lorsqu’elle a entendu Tanti pousser des cris de douleur à l’intérieur de sa chambre. Elle s’est alors précipitée et a essayé de la sauver en l’enveloppant dans une couverture mouillée.

Le P. Anthony Xalxo, de la Commission diocésaine de la jeunesse, a mené une enquête sur les faits. Ses conclusions sont sans ambiguïté. Les charges retenues contre la religieuse sont fausses et sans fon-dement. Les accusations de tentative de conversion forcée sont d’autant plus absurdes, souligne le prê-tre, que les registres paroissiaux montrent clairement que Meena Tanti était déjà chrétienne et n’avait nul besoin de se convertir. Elle avait suivi un enseignement de doctrine chrétienne et avait été baptisée à l’église Saint Patrick de Philobari, en 1999. Par ailleurs, les voisins ont témoigné que la jeune femme souffrait de dépressions chroniques et que, souvent, de violentes querelles l’opposaient à son mari.

Le P. Xalxo affirme que le frère de la victime et ses amis, responsables locaux du BJP, ont monté toute cette affaire afin de transformer cette mort en prétexte à agissements sectaires. Dès le lendemain de la mort de Tanti, alors que la religieuse se rendait à l’église pour participer à la messe, un groupe de personnes s’en est pris à elle. Elle a été frappée à la tête et à la poitrine puis jetée dans un véhicule pour être amenée au poste de police. Lors du transport, elle a été l’objet de mauvais traitements et d’une tentative de viol. Le jour suivant, c’est le frère de la religieuse, Marcus Lacra, qui a été arrêté. Mais il a pu être libéré sous caution le 19 août, son employeur ayant fourni une attestation certifiant qu’il était au travail à l’heure où se sont produits les faits.

Deux demandes de libération sous caution avaient été rejetées par le tribunal avant que la religieuse ne soit libérée le 4 septembre sur promesse d’une caution de 40 000 roupies (824 euros) pour laquelle deux personnes se sont portées garantes. Auparavant, une pétition avait été envoyée par le P. Xalxo au président de la Fédération indienne ainsi qu’au Premier ministre et au chef de l’opposition, demandant la libération immédiate de la religieuse. Le P. Leander Kerketta, vicaire général du diocèse, avait fait une déclaration publique dans laquelle il annonçait que le diocèse avait posé une nouvelle demande de libération sous caution au tribunal du district. Il avait également affirmé que le diocèse condamnait le traitement inhumain infligé à la religieuse et exigeait l’arrestation de ceux qui se sont efforcés de créer de toutes pièces ce conflit intercommunautaire.