Eglises d'Asie – Indonésie
Moluques : regain de violences meurtrières après une période d’accalmie de plusieurs semaines
Publié le 18/03/2010
Le premier incident remonte au 6 septembre lorsque l’explosion d’une bombe à la tribune du stade Lapangan Merdeka d’Amboine a fait quatre morts et une dizaine de blessés. Les auteurs de l’attentat n’ont pas été identifiés et les victimes appartiennent tant à la communauté chrétienne qu’à la communauté musulmane de la ville. La plupart des victimes sont des athlètes locaux qui s’entraînaient en vue d’une compétition nationale prévue pour la fin de cette année en Papouasie occidentale.
Le second incident meurtrier s’est produit le dimanche 8 septembre lorsque, tôt le matin, sur le rivage de l’île de Saparua, des rafales d’armes automatiques ont été tirées en direction de trois musulmanes occupées à ramasser des fruits de mer non loin de Kulur, leur village. Toutes trois ont été tuées. Elles étaient âgées respectivement de 12, 13 et 27 ans. La plus âgée des trois, une institutrice, était enceinte. Un peu plus tard dans la journée, lorsque les corps sont arrivés à l’hôpital Al-Fatah d’Amboine, la rumeur a couru que les coupables étaient des villageois de Porto, une localité située à douze kilomètres de Kulur et peuplée de chrétiens. Dans le quartier musulman de Galunggung, à Amboine, une foule en colère s’en est alors pris à des chrétiens passant en voiture. Un chauffeur de taxi chrétien, Daniel Matulessy, a été tué, probablement brûlé vif et son véhicule a été incendié. A peu près en même temps, le chef du village de Porto a démenti toute implication de chrétiens de son village dans l’attaque commise sur la plage de Kulur. Le responsable local de la police s’est dit incapable de déterminer le ou les coupables.
Ces incidents sont intervenus à un moment où, selon le P. Böhm, du Centre de crise du diocèse catholique d’Amboine, la situation s’était nettement améliorée depuis quelques semaines dans la province. Dans la ville d’Amboine, où les quartiers chrétiens et musulmans étaient étanches les uns par rapport aux autres, les Moluquois, chrétiens ou musulmans, avaient recommencé à circuler. Dans la baie d’Amboine, les nombreux bateaux qui faisaient la navette jusqu’à l’aéroport voyaient même leurs affaires péricliter, les chrétiens osant à nouveau emprunter la route terrestre qui passe à travers des zones musulmanes. Toujours selon le P. Böhm, les contacts allaient au-delà d’une simple reprise du trafic. Au terminal routier de Belakang Kota, par exemple, les vendeurs de rue voyaient à nouveau des chrétiens venir à eux. Durant les années de conflit, les gens n’osaient plus s’aventurer à quelque distance de leurs villages et, en conséquence, les cochons sauvages se sont multipliés, infligeant d’importants dégâts aux récoltes. Des battues ont été récemment organisées, réunissant musulmans et chrétiens, pour chasser ces animaux, dont la viande a servi à améliorer l’ordinaire de familles chrétiennes. Enfin, des matchs de volley ont rassemblé plusieurs milliers de supporteurs des deux communautés – sans incident. Sur un plan religieux, dans le village de Passo, des jeunes chrétiens sont venus aider des musulmans à nettoyer la mosquée locale et, à Batumerah, ce sont des musulmans qui ont travaillé dans l’église du lieu. L’amélioration de ce climat augurait bien des élections de novembre prochain pour la désignation du gouverneur et du vice-gouverneur de la province – jusqu’à ce regain de violences meurtrières.