Eglises d'Asie

Cachemire : malgré la persistance de la violence, les responsables chrétiens sont en partie satisfaits des dernières élections législatives de l’Etat

Publié le 18/03/2010




A l’issue du quatrième et dernier scrutin des élections législatives dans l’Etat de Jammu et Cachemire qui a eu lieu le 8 octobre dernier, les responsables chrétiens ont exprimé leur soulagement en même temps qu’une certaine satisfaction. Mgr Peter Celestine Elampassery, l’évêque catholique du diocèse de Jammu-Srinagar qui s’étend sur tout le territoire de l’Etat dont la population s’élève à dix millions d’habitants, s’est même déclaré étonné du succès remporté par ces élections. Le responsable du diocèse a relevé en premier lieu le taux de participation plus élevé que d’habitude. Au total 44 % de l’électorat s’est rendu aux urnes. Ce quatrième scrutin régional qui se déroulait dans le district de Doda, place forte des partis musulmans séparatistes qui avaient réclamé l’abstention, a même connu une affluence record, puisque le taux de participation au vote a été de 52 %. Autre sujet de contentement pour les responsables religieux du Cachemire, l’absence de fraudes et de litiges au cours des élections. Le porte-parole du diocèse, Joseph Dhar a déclaré ne pas avoir entendu parler de fraudes ou de pressions exercées sur les électeurs alors que des fraudes massives avaient entaché les précédentes consultations électorales. Cette constatation a été confirmée par bon nombre d’observateurs occidentaux qui estiment que dans l’ensemble les élections ont été équitables. Seul point noir dans cet ensemble de raisons de se réjouir, mais de taille, c’est la violence qui une fois de plus s’est donné libre cours au cours des derniers mois. Depuis l’annonce des élections au mois d’août jusqu’au dernier scrutin du 8 octobre dernier, l’Etat a déploré plus de 800 victimes du terrorisme aveugle, tombées lors d’attentats ou d’affrontements entre la guérilla islamiste pro-pakistanaise et les forces gouvernementales. Mais de l’aveu de Mgr Elampassery, surtout pour le dernier scrutin, on craignait que la violence soit encore plus présente, dans un Etat où depuis 1989, date du début de la rébellion armée musulmane, elle a fait pas moins de 70 000 victimes.

Si les responsables religieux ont volontiers donné leur avis sur le climat, le déroulement des derniers scrutins électoraux, ils se sont, par contre, montrés plus réservés et discrets dans le commentaire des résultats relativement surprenants des élections. La presse, elle, ne s’en est pas privée et a relevé en premier lieu la cinglante défaite infligée par l’électorat au parti pro-indien de la Conférence nationale (NC). Le Parti qui, durant cinq décennies, et à travers les trois générations de la dynastie des Abdullah, a dominé la vie politique de l’Etat, n’a obtenu que trente sièges dans la nouvelle assemblée alors qu’il en détenait 57 sur 87 dans l’ancienne. Selon les observateurs, la défaite de l’ancien parti au pouvoir tiendrait en grande partie à sa servitude à l’égard de la politique de New Delhi, à la répression meurtrière menée par lui contre la rébellion islamiste, à son inflexibilité par rapport au Pakistan. Tirant les conséquences de sa défaite électorale, la chef du gouvernement, Faroq Abdullah, dont le fils est président du parti NC, a donné sa démission le 11 octobre.

Un nouveau gouvernement de coalition devrait être formé par les deux partis pro-indiens qui s’étaient prononcés pour une discussion avec la rébellion islamiste, le Parti du Congrès et le Parti démocratique du peuple (PDP). A eux deux, ils ont obtenu un total de trente-six sièges et comptent s’allier avec les huit élus du forum des indépendants, groupe d’anciens membres de l’alliance séparatiste dont ils n’ont pas voulu respecter la consigne de boycott.

Quel que soit le nouveau gouvernement, il ne pourra pas ne pas tenir compte de l’Alliance séparatiste musulmane Hurriyat, même si celle-ci, ayant rejeté la dernière consultation électorale du 16 septembre au 8 octobre, se retrouve sans représentants légaux. L’alliance, formée en 1993 par Omar Farocq, regroupe vingt-trois partis en lutte contre la domination indienne sur les deux tiers du Cachemire qu’ils soient irrédentistes ou indépendantistes. Selon eux, les élections régionales n’ont rien changé aux données du problème du Cachemire et à l’urgence d’un dialogue entre l’Inde, le Pakistan et les séparatistes. Le président de la Hurriyat, Abdul Gani Bhat a salué, le 10 octobre, la défaite de la Conférence nationale et estimé que la formation d’un gouvernement de coalition entre le Parti du Congrès et le PDP pourrait “faire avancer les choses”.