Eglises d'Asie

Les propos malheureux d’un pasteur baptiste sont à l’origine du climat de grande insécurité régnant dans la communauté chrétienne de la Vallée du Cachemire

Publié le 18/03/2010




Devant les marques d’animosité qui se multiplient contre la communauté chrétienne de la Vallée du Cachemire depuis le début du mois d’octobre, les services gouvernementaux se sont vus obligés de renforcer la protection des établissements placés sous la responsabilité de l’Eglise et de demander aux fidèles de restreindre au maximum leurs déplacements. Depuis le 3 octobre, en effet, les diverses confessions chrétiennes de la région sont devenues la cible de manifestations, de protestations et d’attaques violentes. Ce jour-là, la presse régionale avait rapporté dans ses colonnes les propos qui auraient été tenus par un pasteur baptiste américain, le révérend Jerry Falwell, lors d’une émission télévisée. Il aurait affirmé, qu’après avoir lu de nombreux livres écrits par des musulmans et des non-musulmans, il avait été amené à conclure que le prophète Muhammad avait été un “homme violent “un homme de guerre Il aurait même ajouté : “Muhammad est un terroriste.”

Dès que cette appréciation publique du prophète par un ministre du culte chrétien est parvenue à la connaissance des milieux musulmans, la tension est très rapidement montée, si bien que, le 6 octobre, lors de la messe célébrée dans l’église de la Sainte famille à Srinagar un cordon de police entourait l’assistance, ce qui a fait dire à l’évêque du lieu, Mgr Peter Celestine Elampassery, que c’était probablement, la première fois, que les chrétiens bénéficiaient d’une telle sécurité. Le 7 octobre, à Srinagar, en guise de protestation contre les propos du pasteur, des groupes de musulmans ont bloqué les rues et obligé les boutiques à fermer leurs portes. A Baramulla, au cour de la vallée de Cachemire, lieu généralement considéré comme le fief des séparatistes musulmans, la police a été obligée de disperser avec des grenades lacrymogènes des protestataires qui avaient entouré l’école Saint Joseph. Les religieuses et les prêtres de cet établissement ont reçu l’ordre de la police de ne pas sortir de chez eux pendant quelques jours. Des unités de l’armée et de la police locale ont été désignées pour garder l’ensemble du complexe catholique où est intégrée cette école, comportant aussi un hôpital. L’école fondée au début du dernier siècle, accueille 2 500 élèves. La session d’examen qui devait avoir lieu prochainement a été remise à une date ultérieure en raison de la tension régnant actuellement. Des consignes de discrétion ont également été données aux militants chrétiens de Srinagar. En outre, il a été demandé aux chrétiens de ne pas emprunter la route menant de Baramulla à Srinagar, la police ayant eu vent de probables attaques sur cette voie de communication.

Cependant, les autorités policières régionales ont fait remarquer que ce n’est pas la première fois que des précautions spéciales sont prises pour assurer la sécurité des établissements d’Eglise. Des mesures de sécurité spéciales avaient été prises, il y a six mois, après l’attaque d’une église chrétienne au Pakistan. Elles avaient été renouvelées en septembre dernier, lorsque l’on avait trouvé dans les vêtements de deux terroristes, venant sans doute du Pakistan et abattus par les militaires indiens, les plans détaillés de l’hôpital et de l’école de Baramulla (1). Cependant de telles mesures avaient été, jusque là, uniquement justifiées par de simples soupçons. Cette fois des groupes musulmans essaient réellement d’assouvir leur soif de vengeance en sabotant des établissements.

Bien que prudents et appliquant scrupuleusement les consignes des autorités, les principaux responsables sont loin d’avoir cédé à la panique. Le P. Jose Vadakkel, supérieur du Collège, se dit confiant, persuadé que la population locale ne cherchera pas à nuire à une école où elle envoie ses enfants. Le prêtre hollandais chargé de l’église de la Sainte Famille, à Srinagar, exprime une confiance comparable. Il fait remarquer que, depuis des années, pas un coup de fusil n’a été tiré contre son église. Les derniers événements violents remontent à l’année 1972, date à laquelle des manifestants avaient brûlé l’église de tous les saints à Srinagar, et à l’année 1967 au cours de laquelle, des manifestants dénonçant l’agression d’Israël contre les Arabes, s’en étaient pris à l’église de la Sainte famille.