Eglises d'Asie

Malgré le scandale soulevé au Japon par les révélations de Kim Jong-il au sujet des enlèvements de ressortissants japonais, la Caritas Japon poursuivra son aide à la Corée du Nord

Publié le 18/03/2010




La Caritas Japon a indiqué qu’elle continuera son aide alimentaire à la Corée du Nord en dépit de l’indignation provoquée au Japon par les aveux de Kim Jong-il, le leader nord-coréen, qui a reconnu récemment que des citoyens japonais avaient bel et bien été enlevés quelques dizaines d’années auparavant par les services secrets de son pays. Hideo Nosaka, secrétaire général de la Caritas Japon, a justifié son programme d’aide humanitaire à destination de la Corée du Nord et insisté pour que Caritas continue d’envoyer des vivres dans ce pays. “Parce que ce sont nos voisins”, tout simplement, a-t-il déclaré. Nosaka a fait cette déclaration après que les bureaux de la Caritas à Tôkyô eurent reçu plusieurs appels comminatoires de Japonais exigeant l’arrêt de l’aide alimentaire à la Corée du Nord, une aide commencée il y a plus de sept ans.

Avec la sécheresse et les inondations des années 1990, des millions de Nord-Coréens étaient menacés de mourir de faim. Des secours d’urgence avaient été lancés et le pire avait été évité. Mais, d’après le Programme alimentaire mondial et Caritas Internationalis, qui fédère toutes les Caritas du monde (1), l’aide est toujours autant nécessaire parce que la situation reste mauvaise. Nosaka a souligné que les enlèvements de citoyens japonais des dizaines d’années auparavant et l’aide alimentaire aux Nord-Coréens encore menacés de famine ou de disette n’avaient pas à être reliés l’un à l’autre.

Au Japon, l’opinion publique a très vivement réagi aux révélations de Kim Jong-il et les excuses que ce dernier a présentées au Premier ministre japonais Junichiro Koizumi lors de la visite de celui-ci à Pyongyang, le 17 septembre, n’ont pas suffi à calmer ce que certains observateurs locaux ont décrit comme étant de la “colère”. Cette visite était la première visite jamais accomplie par un Premier ministre japonais dans ce pays communiste. Les responsables nord-coréens ont révélé à Koizumi que cinq des personnes kidnappées étaient encore en vie mais que huit autres étaient décédées. Toutes avaient été enlevées ou attirées hors du Japon et emmenées en Corée du Nord pour participer à l’entraînement d’agents coréens destinés à être envoyés espionner le Japon.

Nosaka a expliqué que l’affaire devait être remise dans son contexte. Le responsable de la Caritas Japon a rappelé en effet que “la couverture médiatique donnée à l’aveu dramatique de ces enlèvements avait été, pour les Japonais, une belle occasion d’oblitérer leur responsabilité dans la guerre et la domination coloniale » exercée sur la péninsule coréenne. Le Japon a occupé toute la péninsule coréenne de 1910 à 1945, l’année où sa capitulation marqua la fin tant de la guerre sino-japonaise que de la deuxième guerre mondiale.

La colère des Japonais à l’annonce de ces enlèvements a provoqué plusieurs incidents. Trois garçons, des lycéens sans doute, ont agressé une collégienne coréenne d’Osaka à coups de pied, le 18 septembre. Deux jours plus tard, un homme a fait tomber une lycéenne coréenne de sa bicyclette. D’après Chosen Soren, l’organisation qui rassemble les Coréens du Japon favorables à la Corée du Nord, 291 cas de harcèlements contre des écoles coréennes ou leurs élèves ont été récemment répertoriés à la date du 25 septembre dernier. Parmi eux, neuf cas de tentatives d’agression, douze cas d’insultes publiques et 160 cas de harcèlements téléphoniques.

La Caritas Japon, spécialisée dans l’aide sociale distribuée au nom de la Conférence des évêques japonais, a envoyé l’équivalent de 1 229 500 euros d’aide alimentaire à la Corée du Nord depuis 1995, principalement du riz. Ce faisant, elle est le premier donateur privé japonais à un pays communiste. Nosaka a ajouté qu’au cours de ces sept dernières années, la Caritas Japon avait envoyé treize équipes en Corée du Nord pour s’assurer que l’aide alimentaire envoyée parvenait bien à ses destinataires. La Caritas Japon s’est engagée à continuer son aide mais le Programme alimentaire mondial et Caritas Internationalis constatent que les donateurs, dans leur l’ensemble et ces dernières années, sont devenus moins généreux pour la Corée du Nord.