Eglises d'Asie

Le trafic de femmes et d’enfants se multiplie sous des formes en apparence légale

Publié le 18/03/2010




Le trafic des femmes et des enfants s’intensifie et prend des formes de plus en plus subtiles au Vietnam. Telle est l’opinion quasi-unanime des participants d’un colloque organisé à Hanoi, le 24 octobre dernier, par la fédération des femmes vietnamiennes. Le compte-rendu des débats a été publié le jour-même par l’agence de presse électronique “vnexpress un organe de presse contrôlé par le gouvernement. Sous le couvert de contrats de travail, de voyages, de mariages à l’étranger, d’adoption d’enfants du pays par des étrangers, beaucoup de femmes et d’enfants sont les victimes des manoeuvres d’intermédiaires sans scrupules qui souvent camouflent leurs agissements sous un appareil en apparence légal. Ce trafic se pratique à l’intérieur du pays, mais également en direction de la Chine et du Cambodge pour les femmes et les enfants, en direction de Taiwan par le biais des mariages pour les femmes, en direction des pays européens sous le couvert des adoptions pour les enfants. Selon les statistiques produites à l’occasion du colloque, les diverses polices provinciales ont au cours des dix dernières années, découvert 2 260 affaires de traites de femmes ou d’enfants et arrêté 3 700 personnes impliquées dans ce type d’affaires.

Nguyên Manh Tê, sous-directeur de la Police judiciaire, dans son exposé au colloque, a parlé de dizaines de milliers de femmes et d’enfants des provinces de Lang Son, Quang Ninh, Ha Giang, Hai Phong, Thanh Hoa, qui, abusés par des intermédiaire, sont conduits en Chine continentale. Les femmes sont proposées, moyennant rétribution, comme épouses, employées domestiques, ou encore comme hôtesse de bars et d’hôtels. Les enfants sont placés dans des maisons où ils sont forcés à travailler. De l’année 1999 au mois d’août 2002, 244 cas de trafic inter-frontalier de femmes ou d’enfants ont été découverts au Nord-Vietnam. Dans les provinces de Hanoi et de Ninh Binh, dans certains cas, ce sont des centaines d’enfants qui ont été conduits à l’étranger. Par ailleurs, depuis quelques années, le nombre annuel de jeunes filles émigrant à Taiwan pour s’y marier avec des ressortissants du pays s’élève à quelques dizaines de milliers. Nombreuses sont celles qui ne contractent que de faux mariages et se trouvent ensuite engagées sur le chemin de la prostitution.

Le même conférencier a également mis en cause les nouvelles procédures juridiques de l’adoption mises en oeuvre récemment par le gouvernement. Elles on été utilisées par des organismes et des individus étrangers qui se sont mis en rapport avec des intermédiaires du pays pour récupérer des enfants, à travers ces procédures légales et en retirer du gain. Des centaines d’enfants sont ainsi partis pour des pays étrangers comme les Etats-Unis, l’Angleterre, la France, le Canada, la Suisse, la Belgique. La majorité des enfants sont des nouveaux nés abandonnés par leurs parents à l’hôpital, ou encore nés dans des familles dépourvues n’ayant pas la capacité de les élever.

Durant le colloque, une victime de ce trafic, Dang Thi Ngoan de la province de Nam Dinh a raconté son histoire. En 1987, répudiée par son mari, elle s’était enfuie à Hanoi où elle avait trouvé un travail de plongeuse. Une offre avantageuse lui fut faite alors de se rendre en Chine dans une province limitrophe du Vietnam. C’est la police de cette province qui la sauva et l’aida à revenir chez elle. De retour au Vietnam, elle apprit que sa fille avait cédé à la même tentation qu’elle.

Les participants du colloque ont proposé au gouvernement toute une panoplie de mesures susceptibles de freiner sinon de mettre un terme à ces divers trafics. Certaines visent en premier lieu à soulager la pauvreté des familles les plus enclines à se laisser tenter par des ressources faciles, en procurant des emplois à leurs membres et en favorisant les études scolaires et la formation professionnelle de leurs enfants. Il a été également proposé de faire adopter par l’Assemblée nationale des amendements aggravant les punitions prévues pour ce type de crimes. Actuellement, l’article 119 concernant la traite des femmes stipule que ce crime est puni d’une peine pouvant s’élever jusqu’à 20 ans de prison. La peine maximum prévue par l’article 120 pour la traite des enfants, leur substitution ou leur enlèvement est la prison à perpétuité.