Eglises d'Asie

Mindanao : réagissant à une série d’attentats meurtriers, les évêques catholiques appellent au calme et préparent la prochaine “Semaine de la paix”, en collaboration avec les oulémas locaux

Publié le 18/03/2010




Après la série d’attentats à la bombe qui a endeuillé Mindanao le mois dernier, Mgr Orlando Quevedo, archevêque de Cotabato et président de la Conférence des évêques catholiques des Philippines, a appelé les Philippins, particulièrement dans le sud du pays, à la prière, à la retenue et à la justice ainsi qu’à la vigilance. Condamnant “l’inhumanité de ces actes terroristes” et exprimant les “plus sincères condoléances [de l’Eglise catholique] aux familles dans la peine il a déclaré que les responsables de l’Eglise catholique, après les attentats, avaient prié aux côté de responsables religieux musulmans et d’hindous pour la fin de ces “violences aveugles et dénuées de sens”.

Le premier attentat du mois dernier remonte au 2 octobre. L’explosion d’une bombe près d’une base militaire dans la ville de Zamboanga a fait ce jour-là quatre morts, un soldat américain et trois citoyens philippins. Huit jours plus tard, le 10, l’explosion d’une bombe déposée sous un banc dans une gare routière de Kidapawan a tué six personnes et blessé 25 autres. Le 17 octobre, de nouveau à Zamboanga, mais cette fois-ci dans deux centres commerciaux de la ville, deux puissantes bombes ont tué sept personnes et blessé près de 150 autres. Enfin, le 20 octobre, devant un ancien fort espagnol de Zamboanga abritant aujourd’hui un sanctuaire marial, un militaire de la Marine a été tué par l’explosion d’une bombe ; dix-huit autres personnes – dont un nourrisson de douze mois – ont également été blessés. Par ailleurs, durant ce mois d’octobre, plusieurs autres bombes ont pu être désamorcées à temps.

Face à cette succession d’attentats, les évêques philippins ont demandé aux autorités “de trouver les responsables de ces actes et de garantir la sécurité des personnes dans les grandes villes”, sans pour autant procéder à des arrestations hâtives. Selon la presse locale et les autorités philippines, le groupe Abu Sayyaf figure parmi les suspects principaux. La ville de Zamboanga, théâtre de la plupart des attentats, est en effet une ville à majorité chrétienne. Les trois quarts de ses 600 000 habitants sont chrétiens, les musulmans comptant pour 20 % de sa population. Située dans une région à majorité musulmane, elle abrite le centre de commandement des forces armées américaines qui entraînent les soldats philippins contre les rebelles islamistes actifs dans les environs. Les autorités philippines auraient établi que les explosifs utilisés le 2 et le 17 octobre étaient similaires.

Pour Mgr Antonio Ledesma, de la prélature d’Ipil, située au nord-est de Zamboanga, la théorie selon laquelle Abu Sayyaf ou d’autres groupes tels que la Jemaah Islamiyah (‘communauté musulmane’) seraient derrière ces attentats n’est pas évidente. Il souligne que “les lieux choisis sont des lieux fréquentés par l’homme de la rue” et que la plupart des victimes du 17 octobre sont des musulmans. Selon un haut fonctionnaire philippin proche des milieux du renseignement, “les attaques à Zamboanga sont ‘locales'” tandis que les réseaux terroristes internationaux visent en général “des intérêts étrangers ou des symboles de la puissance économique et militaire de l’Occident”.

En dépit des attentats, les évêques philippins tiennent à ce que la prochaine “Semaine de la paix”, organisée chaque année conjointement par le gouvernement et par le Forum des évêques et des oulémas, soit maintenue et se déroule comme prévu du 28 novembre au 4 décembre 2002. Selon Mgr Ledesma, président de la Commission épiscopale pour le dialogue interreligieux, “ceux qui chérissent la paix ne peuvent laisser des extrémistes, de quelque bord que ce soit, arrêter le processus de paix”. Cette année, le thème choisi pour cette semaine de rencontres et de prière entre musulmans et chrétiens est : “La paix par la réconciliation : Mindanao à la recherche d’un bien commun”.