Eglises d'Asie

Des chrétiens japonais demandent pardon à des aborigènes du nord-est de l’Inde pour les atrocités commises durant la seconde guerre mondiale

Publié le 18/03/2010




Venus du Japon, quatre chrétiens se sont rendus au Nagaland, un Etat du nord-est de l’Inde, pour demander pardon pour les violences commises par les soldats japonais durant la deuxième guerre mondiale. “Nous nous inclinons devant Dieu et devant vous. Pardonnez, s’il vous plaît, au peuple japonais” : telle a été la prière des pèlerins, le 11 novembre dernier à Kohima, au cours d’une cérémonie de réconciliation. Suivant la coutume japonaise pour demander pardon, ils s’étaient agenouillés et prosternés devant les quelque 800 personnes présentes à cette cérémonie dans le cimetière militaire britannique du Nagaland.

Ces pèlerins japonais appartiennent à Agapé (‘charité’), une association fondée en 1992 pour la réconciliation des anciens prisonniers de guerre et de leurs gardiens. C’est l’Eglise baptiste de Kohima qui avait organisé ce service en mémoire des aborigènes de l’ethnie Naga morts ou disparus durant la bataille de Kohima.

En mars 1944, l’armée japonaise venue de Birmanie tentait d’entrer en Inde britannique. Elle s’empara de la région frontalière montagneuse de Naga avec le projet de s’emparer des plaines indiennes. Selon les historiens, la perte de Kohima aurait eu de terribles conséquences pour les forces alliées. Deux mille cinq cents soldats britanniques dont de nombreux aborigènes de l’ethnie Naga affrontèrent quinze mille Japonais. Le combat décisif eut lieu à la mi-mai 1944 dans un corps à corps à la baïonnette autour de la résidence du commissaire adjoint britannique. Il y eu des centaines de morts de chaque côté et les Japonais brûlèrent un certain nombre de villages.

Le petit groupe des pèlerins japonais de ce 11 novembre a prié pour les 1 421 soldats alliés inhumés dans le cimetière et pour les 917 autres qui ont été incinérés. Keiko Holmes, 50 ans, qui dirigeait la délégation, a reconnu publiquement que ses compatriotes avaient “pillé les maisons avant de les détruire et de les incendier. Beaucoup de villageois ont été tués ou portés disparus”.

Un aborigène Naga, Dovi Khate, 78 ans, un ancien porteur enrôlé par les forces alliées, avait revêtu son vieil uniforme pour l’occasion. Il a pris la parole pour dire qu’il pensait qu’il ne pourrait jamais pardonner aux Japonais “mais qu’aujourd’hui, tout était différent. Je leur pardonne. Quand vous retournerez au Japon, demandez-leur de prier pour nous”. A l’issue de la cérémonie, il a expliqué que, lui, aborigène, avait rejoint les forces britanniques pour se venger de la mort de cinq de ses compagnons quand les troupes japonaises avaient tiré sur eux qui n’étaient que de simples porteurs sans armes.

Keiko Holmes est la fondatrice , organisation qui a permis à des centaines d’anciens prisonniers de guerre britanniques de venir au Japon avec leur famille rencontrer leurs anciens gardiens. Agapé mène sa mission de réconciliation en Australie, au Canada, en Hollande, aux Philippines, à Singapour, à Taiwan, en Thaïlande et aux Etats-Unis. Keiko Holmes, Japonaise mariée à un Britannique, a été décorée en 1998 de l’Ordre du mérite de l’Empire britannique.