Eglises d'Asie

Arunachal Pradesh : le christianisme autrefois interdit se répand aujourd’hui sans que les autorités n’y fassent obstacle

Publié le 18/03/2010




Le christianisme autrefois interdit dans l’Arunachal Pradesh (1) est maintenant librement pratiqué par environ 30 % du million d’habitants qui vivent dans cet Etat montagneux du nord-est de l’Inde, frontalier de la Chine et de la Birmanie. Le changement est particulièrement manifeste au moment des fêtes de Noël. On a pu voir par exemple plus de 6 000 personnes participer à des récitals oecuméniques de cantiques de Noël dans la capitale de l’Etat, Itanagar. Pour cette importante fête, les églises de la ville ainsi que celles des petites villes environnantes comme Papu Nallah, Chimpu et Baderdewa avaient été décorées avec des bandes de papier de couleurs et des étoiles de Noël que l’on pouvait voir juchées au sommet des clochers des églises.

Un prêtre salésien, le P. Jose, ancien missionnaire dans la région, venu visiter son ancien territoire de mission à l’occasion des fêtes de fin d’année, a exprimé lors d’une rencontre avec le représentant , son étonnement devant le changement radical qui s’était opéré dans la pratique et la diffusion du christianisme en cet Etat au cours des quinze ans écoulés. Un laïc, Tadar Taniang, un ancien ministre, le premier catholique de la région à être devenu ministre, a précisé la nature de ce changement par divers détails significatifs : les églises débordant de fidèles, les chrétiens libres de transporter la bible, le rosaire, les livres de chants et d’autres objets religieux. L’ancien ministre a rappelé aussi les conditions de l’exercice du christianisme autrefois, des conditions qu’il a, lui-même, contribué à améliorer : “Ces jours-là, nous célébrions la Noël dans la jungle grâce à des prêtres clandestins que nous cachions ici et là.” Aujourd’hui, on peut même voir des croix dans les voitures près du conducteur, un signe que le christianisme survit et se développe et que personne n’éprouve plus aucune crainte à se montrer chrétien.

C’est en 1970 que le gouvernement fédéral avait interdit la présence de missionnaires chrétiens au sein des minorités ethniques de l’Etat. La mesure, disait-il, visait à protéger les croyances et les pratiques religieuses des peuples indigènes. Ces mesures restrictives à l’égard du christianisme avaient d’ailleurs commencé bien plus tôt, à l’époque de la colonisation des Britanniques. Ces derniers, venus dans la région en 1838, avaient introduit une réglementation intérieure destinée à protéger les indigènes de l’exploitation et stipulant que les étrangers pour s’installer sur place devaient être munis d’un permis spécial. Le gouvernement fédéral indien avait maintenu et renforcé la réglementation écartant les missionnaires hindous et chrétiens du Arunachal Pradesh, mesure destinée à aider les minorités ethniques à préserver foi et coutumes locales. Néanmoins, on ne peut nier que certaines mesures prises par le gouvernement ont favorisé la pénétration de l’hindouisme, en particulier de la Mission Ramakrishna et d’autres groupes. En 1978, l’Etat adoptait également une loi très controversée sur la liberté de religion contenant des sanctions pénales contre les responsables de conversions forcées.

Pourtant, en dépit de cette réglementation et de nombreuses restrictions, des jeunes gens ayant accompli leur formation dans des écoles catholiques des Etats voisins contribuèrent à la diffusion du christianisme. Selon les missionnaires, la population indigène s’accorda à trouver le christianisme plus proche de leur religion et de leur système de pensée traditionnels. Les missionnaires s’instruisant des coutumes locales, parlant la langue indigène et répandant lentement le christianisme n’ont jamais cherché la confrontation agressive avec les modes de pensée traditionnels. C’est ainsi qu’aujourd’hui, il existe des chrétiens chez les Adis, chez les Apatanis, chez les Nyishis, les trois grandes ethnies de l’Etat.

Actuellement, les missionnaires estiment qu’au moins, un tiers de la population adhère au christianisme. Environ 55 % sont catholiques. Les autres appartiennent principalement aux Eglises baptiste, revivaliste et pentecôtiste. Plus de 67 religieuses et de 61 prêtres sont au service de la communauté catholique. Aujourd’hui, les autorités de l’Etat ne s’opposent pratiquement plus à l’entrée dans l’Arunachal Pradesh de chrétiens militants ou de pasteurs venant d’autres Etats de l’Inde.