Eglises d'Asie

Manille : en l’absence du pape et en dépit d’un nombre relativement faible de participants, la IVe Rencontre mondiale des familles a réaffirmé l’importance de la famille pour l’évangélisation

Publié le 18/03/2010




Organisée à Manille, capitale des Philippines, la IVe Rencontre mondiale des familles (1) s’est déroulée les 25 et 26 janvier derniers en l’absence du pape et en présence d’un nombre relativement faible de participants. Le pape, qui avait renoncé à venir aux Philippines pour des raisons de santé, a cependant pris part à l’événement à l’occasion d’une liaison audiovisuelle en duplex qui a duré deux heures le 25 janvier, devant environ 500 000 personnes. Peut-être intimidés par la mise en garde du département d’Etat américain qui avait émis une “alerte” quant au risque possible d’attentat terroriste à Manille, les délégués n’ont été que 6 628 à se rendre aux Philippines, là où les organisateurs en attendaient plus. Venus de 64 pays, ils étaient environ 4 000 laïcs, plusieurs centaines de prêtres et religieuses ainsi que 88 évêques et cinq cardinaux. En préparation à la Rencontre mondiale, un Congrès international théologique et pastoral s’est tenu dans la capitale philippine du 22 au 24 janvier ainsi qu’un Congrès des jeunes gens et jeunes filles. Le premier congrès avait pour objet l’étude théologique et pastorale du rôle de la famille chrétienne dans le monde au début du nouveau millénaire et le congrès des jeunes s’était donné pour but d’offrir aux jeunes la possibilité de réfléchir sur la famille comme “bonne nouvelle pour le troisième millénaire”.

Légat du pape pour cette rencontre, le cardinal Alfonso Lopez Trujillo, président du Conseil pontifical pour la famille, a prononcé l’homélie lors de la messe de clôture de la Rencontre, le 26 janvier, jour de la fête de Santo Niño (‘Saint Enfant’), très populaire aux Philippines. Il a rappelé à cette occasion le prix que l’Eglise accorde à la cellule familiale et la nécessité pour les gouvernements de s’opposer à tout ce qui peut affaiblir la famille : pauvreté, avortement, etc. “Il n’y a pas de meilleur investissement pour un gouvernement, pour les législateurs que de favoriser les familles, de renforcer leur unité, de les soutenir et de ne pas faire obstruction à la mission et aux droits des époux a-t-il affirmé, tout en rappelant aux familles leur mission pour l’évangélisation.

A Manille, outre différents dignitaires religieux dont des méthodistes britanniques et un évêque orthodoxe roumain, on a pu noter la présence de responsables politiques philippins lors de la messe de clôture du 26 janvier. Le vice-président Teofisto Guingona et les anciens présidents Corazon Aquino, catholique, et Fidel Ramos, protestant, étaient présents à la messe célébrée au Luneta Park. L’absence de la présidente Gloria Arroyo, fervente catholique, à cette messe a provoqué des commentaires variés dans la presse locale du lendemain. Certains journalistes ont suggéré que des tensions entre l’Eglise catholique et le gouvernement au sujet de la politique de contrôle des naissances étaient la cause de cette absence tandis que d’autres citaient des “questions de sécurité” après le récent assassinat, non loin de Manille, de deux ex-leaders communistes.

Le 27 janvier, un porte-parole de la présidence a déclaré que la présidente n’avait pas assisté à la messe du 26 car la substance du discours qu’elle devait prononcer à cette occasion avait été donnée lors d’un discours radio- et télédiffusé la veille. Gloria Arroyo y disait que “bien que nous respectons le droit des couples à décider de la taille de leur famille, nous devons leur rappeler que la qualité de vie qu’ils auront dépendra de la taille de leur famille”. Elle a ajouté que son gouvernement concentrerait à partir du mois de février son “attention sur le taux élevé de natalité [du paysà travers une politique fondée sur la paternité et la maternité responsables, le respect de la vie, l’espacement des naissances et un choix éclairé”. Elle a qualifié son engagement de la façon suivante : “Ceci est chrétien, ceci est responsable et ceci est constitutionnel.”

Trois jours auparavant, Mgr Teodoro Bacani, évêque du diocèse de Novaliches, avait déclaré lors d’une conférence de presse que la présidente devait clarifier ce qu’elle avait voulu dire lorsqu’elle avait parlé d’un “lien direct” entre “la pauvreté, la taille des familles et la qualité de vie des enfants et des parents”. Selon les observateurs, ces échanges par médias interposés ont souligné, une nouvelle fois, un des points d’achoppement récurrents entre l’Eglise catholique et le gouvernement philippin : la mise en valeur d’une “culture de la vie” telle qu’elle est défendue par l’Eglise catholique et les dilemmes d’un exécutif confronté à une croissance économique peu satisfaisante et à un taux de croissance démographique relativement important (2).