Eglises d'Asie – Inde
Des propos offensants sur la Bible prononcés par un dirigeant de l’extrême droite hindoue provoquent des rédactions indignées chez les chrétiens
Publié le 18/03/2010
Diverses instances chrétiennes ont aussitôt réagi. Le 1er février dernier, le Conseil chrétien panindien publiait un communiqué qualifiant de blasphématoires les propos tenus par le dirigeant d’extrême droite et demandant au gouvernement de poursuivre leur auteur pour “provocation” à l’égard des adeptes d’une religion minoritaire. Un communiqué de la Conférence épiscopale, paru le même jour, comportait une critique acerbe du comportement de Sudarshan. Il affirmait, entre autres, que les livres sacrés des différentes religions constituaient l’héritage commun de l’humanité et que personne n’avait le droit d’émettre des opinions hostiles à leur sujet et encore moins de les dénigrer. Le communiqué faisait remarquer que, depuis longtemps, le dirigeant du RSS s’arrogeait ce droit pour toutes les religions à l’exception de la sienne.
Récemment, dans une intervention publique, le même dirigeant avait demandé que soient réécrits un certain nombre de passages du Coran, jugés peu adaptés aux temps modernes. Son prurit révisionniste, a fait remarquer le P. Joseph Babu, porte-parole de la Conférence épiscopale indienne, le tourne maintenant vers la Bible, comme si ce livre était la cause des maux auxquels le monde moderne est confronté. Cette prétention de vouloir régir l’évolution des religions minoritaires, a ajouté le prêtre, entre dans le cadre d’une volonté affichée de l’extrême droite indienne, exigeant que le christianisme et l’islam “indianisent” leurs croyances et procèdent à une “réinterprétation” de leurs Ecritures de sorte à les accorder à la culture indienne.
Le porte-parole du RSS à New Delhi a confirmé que la récente déclaration de Sudarshan se situait dans cette perspective. Dans des propos rapportés par l’agence Ucanews, il a déclaré que l’Eglise en Inde devrait “s’indigéniser” et ne plus attendre de Rome ses instructions. Il a précisé : “Chrétiens et musulmans de ce pays étaient, à l’origine, des hindous. Ils devraient suivre leur religion respective en gardant à l’esprit que leurs traditions et leurs cultures hindoues constituent leur véritable héritage.”
Comme l’a fait remarquer un prêtre de New Delhi, les récents propos des responsables du RSS sur la nécessaire inculturation du christianisme et de l’islam n’ont pas pour objectif d’accroître l’harmonie entre les différents groupes religieux en Inde, mais bien plutôt d’exacerber les malaises actuels. Ils témoignent de la volonté de l’hindouisme militant d’étendre son emprise sur l’ensemble de la culture indienne. A cette prétention, les deux communiqués cités ci-dessus ont répondu en répliquant que la Bible a survécu à l’épreuve du temps et que, sans aucun doute, elle résistera sans difficulté aux intentions fascisantes de l’extrême droite hindoue qui, dans le passé, a déjà essayé de brûler plusieurs exemplaires des Ecritures saintes.
Avec ses 120 millions d’adeptes de l’islam, l’Inde est l’un des plus grands pays musulmans du monde, après l’Indonésie, le Pakistan et le Bangladesh. Cependant, les musulmans, accompagnés des 23 millions de chrétiens que compte l’Inde, ne constituent que 14 % de la population indienne. Sur 100 habitants de l’Inde, 82 sont de religion hindoue. Cette position dominante de l’hindouisme ne suffit sans doute pas au dirigeant du RSS qui, le 29 janvier dernier aurait déclaré : “Tous les musulmans vivant en Inde devraient comprendre qu’en raison de leurs conditions de vie en ce pays, ils sont en réalité hindous.”