Eglises d'Asie

Aceh : l’inauguration, le 4 mars prochain, du premier tribunal islamique chargé de l’application de la charia marque une nouvelle étape dans l’islamisation des institutions de la province

Publié le 18/03/2010




Dans le cadre de la large autonomie concédée par Djakarta à Aceh, province quasi exclusivement musulmane et où se pratique une forme rigoriste d’islam, un tribunal islamique chargé de l’application de la charia va être inauguré le 4 mars prochain. Ce tribunal, qui n’a pas d’équivalent à ce jour dans le reste de l’Indonésie, sera chargé dans un premier temps d’une application seulement partielle de la charia et seuls les musulmans de la province seront concernés par ses décisions.

L’inauguration du tribunal a été fixée au 4 mars, premier jour du mois lunaire muharram dans le calendrier musulman. Selon le gouverneur d’Aceh, Abdullah Puteh, un juge de la Cour suprême de Djakarta devrait participer à la cérémonie. Le nouveau tribunal agira comme un tribunal de dernière instance pour les dix-neuf tribunaux islamiques et la cour d’appel déjà en place dans la province et qui dépendent in fine du ministère de la Justice indonésien. Un total de 121 juges siègent dans ces tribunaux et appliquent déjà la charia en se cantonnant aux aspects civils (questions relatives au divorce et aux successions) et non criminels du droit musulman.

Les premières mesures permettant l’application de la charia dans la province remontent à 1999, sous la présidence Habibie (1). Il s’en était suivi une courte période de “fièvre islamique le port de tenues islamiques étant imposé aux femmes et aux hommes habillés à l’occidentale, mais l’impact sur la vie quotidienne avait été relativement limité. C’est la loi d’autonomie spéciale, votée par le parlement indonésien en juillet 2001, qui a autorisé la création des tribunaux islamiques de la charia dont le premier va être mis en place ce 4 mars. En théorie, ces tribunaux pourront appliquer le “hudud i.e. les dispositions pénales de la charia, mais toutes leurs décisions seront susceptibles d’appel devant la Cour suprême civile de Djakarta.

La mise en place de ce tribunal intervient alors que la province vit dans un état de calme précaire. En effet, le 9 décembre 2002, un accord a été signé à Genève, en Suisse, entre le gouvernement indonésien et les séparatistes du GAM (Mouvement pour Aceh libre), mettant ainsi fin à vingt-six ans de conflits meurtriers. Depuis cette date, la paix est à peu près revenue dans la province, mais la tension y est vive (2).