Eglises d'Asie – Inde
Favorables à l’opposition, les résultats des élections en quatre Etats sont considérés dans les milieux chrétiens comme marquant le retour à une vie politique normale
Publié le 18/03/2010
Dans l’Etat de l’Himachal Pradesh, au nord de l’Inde, le parti nationaliste hindou, le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP), au pouvoir à New Delhi, a perdu la majorité au profit du Parti du Congrès. D’autres élections avaient lieu le même jour dans le Meghalaya, le Nagaland et le Tripura, trois Etats du nord-est du pays. L’opposition a obtenu plus de sièges que la coalition BJP dans les deux premiers de ces Etats, à majorité chrétienne, mais pas assez cependant pour contrôler l’Assemblée législative. C’est une coalition conduite par les communistes qui a obtenu la majorité dans l’Etat du Tripura, dont la population est en grande partie de religion hindoue.
Le porte-parole de l’épiscopat a estimé que les résultats du récent scrutin indiquent que les électeurs ont été mieux informés : “L’électeur moyen désire une économie stable, la cohésion sociale et tient peu compte des autres problèmes a-t-il commenté, expliquant qu’en dépit des violents conflits idéologiques dans lesquels on veut engager la population, c’est encore le développement économique, l’harmonie sociale et la stabilité politique qui restent les motivations déterminant le choix de l’électeur au moment de déposer son bulletin dans l’urne.
Lors de la préparation des élections du 26 février dans les quatre Etats, le BJP, encouragé par les résultats des élections de décembre 2002 dans le Gujarat (1), favorables pour lui, avait mené une campagne électorale sur les thèmes de , l’idéologie de la théocratie indienne (2), et avait exploité sans vergogne les antagonismes interreligieux de la population. Cette tactique a échoué dans l’Etat de l’Himachal Pradesh, bien que 95 % des 6,07 millions d’habitants de l’Etat soient de religion hindoue. Le BJP qui détient le pouvoir depuis déjà cinq ans n’a pu obtenir que seize sièges dans une assemblée qui en comporte soixante-huit, alors que l’opposition, le Parti du Congrès, remportait quarante sièges. Dans les trois autres Etats, les gains du BJP sont minimes. Il gagne deux sièges de députés dans le Meghalaya où le Congrès en rapporte vingt-deux. Il passe de deux à sept dans le Nagaland où vingt et un sièges de députés reviennent à l’opposition. Dans le Tripura où le Parti du Congrès conserve ses treize sièges, il n’en gagne aucun.
Commentant l’incontestable victoire de l’opposition dans l’Himachal Pradesh, le P. John Brisco, qui est directeur d’une école catholique à Solan, l’une des quelques écoles de l’Etat, a fait remarquer que les élections se sont jouées en premier lieu sur des questions de corruption, la population semblant apporter une attention particulière à la moralité de ses dirigeants. L’idéologie de n’a joué apparemment qu’un rôle réduit. C’est également l’avis de Vidya Stokes, président du Comité exécutif du Parti du Congrès pour l’Himachal Pradesh, qui conclut de la victoire de son propre groupe que la population préfère un bon gouvernement aux querelles intercommunautaires. Sonia Gandhi, présidente du Congrès au niveau national, a vu dans les résultats un message adressé au BJP lui signifiant que ses idées fondamentalistes ne jouent plus en sa faveur. Les commentaires de la grande presse nationale sont dans la même ligne. The Times of India du 3 mars dernier écrivait que les élections de l’Himachal Pradesh se sont révélées être un test pour la nouvelle ligne agressive du BJP. The Hindustan Times se disait rassuré par ce résultat montrant que les électeurs étaient guidés par des motivations politiques normales et non par des ressentiments d’ordre intercommunautaire. The Indian Express du même jour s’appuyant sur les récents résultats électoraux, conclut, avec retard, que les élections de décembre au Gujarat avaient été une aberration due à l’exploitation des blessures subies par l’Etat lors des troubles de l’année précédente.
La progression du BJP dans l’Etat du Nagaland où il a obtenu sept sièges de députés demande un commentaire spécial. Il semble en effet que l’ouverture de pourparlers de paix entre le gouvernement fédéral et les rebelles du Conseil socialiste national du Nagaland (3) a donné dans cet Etat un avantage au parti détenant le pouvoir fédéral à qui l’on attribue le mérite de cette initiative de paix. Il faut noter cependant que les sept élus du parti nationaliste hindou sont tous des chrétiens. Le Parti du Congrès, malgré les vingt-sept sièges obtenus, n’a pu former une coalition. En fin de compte, une majorité composée de cinq partis parmi lesquels le BJP a formé le nouveau gouvernement où quatre ministres sont des élus chrétiens du BJP.