Eglises d'Asie

LA LIBERTE, L’ESPACE VITAL ILLUSOIRE DE L’ECRITURE

Publié le 18/03/2010




La liberté est la flamme initiale à l’origine des grands incendies révolutionnaires. Elle est aussi le dernier déluge qui les engloutit. De toutes les aspirations humaines, il n’en est aucune qui soit capable de rassembler des foules aussi immenses qu’elle. Depuis Spartacus jusqu’à Gandhi, à travers toutes les formes de l’opposition, sous les aspects les plus variés qu’a revêtus la lutte des hommes pour le droit de vivre, partout a retenti le chant de la liberté. Là où il retentit, on voit de confus tourbillons de poussière s’élever au long des routes de l’histoire sur lesquelles s’avance une humanité dont le visage reflète la peine, la souffrance, l’effroi, le tourment, l’indignation, la passion, la folie, la cruauté et, en dernier ressort, une mélancolique fatigue qui s’évanouit dans des crépuscules éthérés.

Pas d’aspiration pour laquelle le prix à payer soit plus élevé. Pas de défi plus inexorable que le sien. Elle est aussi désirable que redoutable.

Est-il bien besoin de ressasser ici de telles idées surannées ? Il est possible que, pour l’Occident, la liberté soit une réalité déjà en place, tout comme les lampadaires, les enseignes au coin des rues, personne n’y prête plus guère attention. Mais je fais entendre ici les paroles issues du délire de nos terres de boue et de fange, des lieux où la liberté est encore un rêve du plein midi, une hantise incontournable. Laissez-moi répéter le cri de la liberté tel qu’il résonne dans nos âmes affamées et assoiffées. Pour nous, la liberté est comme une existence humaine avec son histoire particulière. Elle n’est pas présente en permanence auprès de l’humanité comme sa compagne de voyage. Sa semence a été jetée partout mais d’une façon inégale, sans uniformité. Ici, elle est devenue une forêt épaisse, là ce ne sont que des buissons épineux rabougris et sans vie ou de maigres végétations grimpantes. Pour certains peuples, la liberté est comme le sang qui bouillonne dans les veines. Pour d’autres, elle n’est qu’une pluie légère qui vient balayer un ciel obstinément immobile. L’aspiration à la liberté ne serait-elle pas un élément indispensable de la culture et du caractère d’un peuple ? Même s’il n’en est pas tout à fait ainsi, il n’empêche que lorsque l’on feuillette les pages d’histoire, on y trouve toujours la trace du drapeau de la liberté comme la marque indispensable de l’apparition de la dignité de l’homme et du particularisme d’une nation.

Dans n’importe quelle société, les personnes qui ont le plus besoin de liberté sont celles qui s’adonnent à la littérature et aux arts. Ce n’est pas sans raison que l’on place les arts et les lettres sous le patronage de ces trois marraines : la liberté, le luxe et le loisir. Ceci est évident dans les pays civilisés. Mais seul un tiers des terres du globe terrestre est illuminé par le soleil de la civilisation. Les terres restantes sont plongées dans les ténèbres et la confusion. Nous autres, les habitants des terres dépourvues de liberté, que ferons-nous de notre plume ? Forcerons-nous la littérature à changer d’apparence comme une salamandre ou à se faufiler dans l’interstice des pierres, comme la mousse des montagnes ? Accepterons-nous que notre ouvre se présente sous la forme d’un enfant affligé d’un bec de lièvre, d’un nez déformé, ou encore dépourvu de bras et de jambes ? Ce serait possible. Ce serait bien possible ! Se reconnaître bossu, estropié et mutilé est, pour les lettrés, la façon la plus commode et la plus habituelle de vivre en paix sous les dictatures. Doivent-ils prendre l’initiative d’éteindre la flamme de la liberté brûlant en leurs âmes ? Oui, il le faudrait. Mais la liberté, c’est la nature même des arts et des lettres. Eteindre la flamme de la liberté, c’est éteindre ce qu’il y a de plus essentiel dans la littérature et dans la mission sacrée de l’écrivain. Ainsi, il vaudrait mieux encore se procurer une place dans le corps des mandarins ou des fonctionnaires et d’y gagner paisiblement sa vie. Mais cela n’est pas davantage possible. Il arrive, en effet, à la littérature d’être comme un sortilège, une possession démoniaque, une prédestination, un amour contracté dans une existence antérieure, que l’on ne peut ni fuir ni repousser. Les écrivains ne peuvent donner congé à leur rêve de création afin de pouvoir mener une vie ordinaire. Ils ressemblent à ces condamnés de l’époque médiévale écartelés entre deux chevaux au galop, d’un côté la peur des pouvoirs, la nécessité de survivre, de l’autre la passion des arts et des lettres. Dans cette situation, la liberté ressemble à un gisement de houille au fond d’une mer de boue.

A tel ou tel moment, ici ou là, elle laisse subitement jaillir quelques étincelles et disparaît aussi brusquement. Dans le climat empesté des marécages, sous l’obscurité d’un ciel bouché, ces étincelles luisent quelques secondes puis s’éteignent, excitant la convoitise des hommes tout en faisant grandir leur épouvante. La peur et la soif de la liberté secrètement entremêlées sont les deux loups affamés qui, en permanence, déchirent le cour des écrivains. Ceux-ci éprouvent un complexe de supériorité, devenu quelque fois un orgueil délirant s’exprimant dans des rêves splendides et magnifiques, mais clandestins, à propos de la littérature et d’eux-mêmes. Mais ce complexe, tout en se combinant au sentiment d’infériorité né de la piètre condition qui est la leur dans la vie réelle, lui livre bataille. Tel est l’acide qui, jour après jour, ronge leurs âmes. Dans leurs yeux, on peut voir à la fois leurs ambitions et leurs lâchetés, leurs révoltes et leurs soumissions, des larmes de honte où l’on aperçoit l’ombre d’un nuage qui s’enfuit.

La vie s’écoule et l’homme s’use, s’émousse jour après jour, mois après mois, année après année dans une lutte intérieure sans vainqueur ni vaincu. Fruit d’un tel état d’âme, la littérature ne peut engendrer que des chefs-d’ouvre au discours tortueux, allusif, une façon de faire extrêmement subtile mais tombant facilement dans l’artifice par l’abus des procédés. Les allusions littéraires, les citations, les métaphores, un emploi des images allusif et ambigu, le glissement de sens, tout cela n’est pas destiné à donner plus d’attrait au style mais à dissimuler des arrière-pensées, à échapper aux ciseaux de la censure. L’écrivain en effet, lorsqu’il écrit, pratique l’autocensure. Au lieu de réfléchir à la composition du livre, à l’évolution de ses personnages, au dosage de ses mots en fonction de la phrase, il doit préparer à l’avance une plaidoirie qui le justifiera devant les autorités lorsque son livre sera dénoncé. Ce “plaidoyer” est destiné à gommer les arrière-pensées, les idées essentielles qu’il veut transmettre au lecteur. Ainsi, qu’il le veuille ou non, l’auteur est entraîné à devenir un professionnel de la dissimulation, un faussaire permanent. L’hypocrisie est le trait essentiel de ceux qui vivent sous une dictature, une pente qui leur est aussi naturelle que celle qui entraîne l’eau d’une cataracte vers le bas.

Certaines personnes sont incapables de s’adapter à leur environnement, quels que soient leurs efforts. Malheureusement pour moi, je fais partie de cette catégorie. Je ne peux et ne sais mentir. C’est mon plus grand défaut depuis que je suis venue au monde en cette terre de boue et de fange, une terre où partout manquent ni les guerres ni les bouleversements. Les gens autour de moi m’apparaissent à la fois familiers et étrangers et, bien que vivant avec mes compatriotes, je ne parviens pas à comprendre comment peuvent coexister en eux l’héroïsme et la servilité. Durant de nombreuses années, je n’ai pas compris mes propres confrères. Puis, lorsque, enfin, je les ai compris, je me suis écarté d’eux. Dans l’art du sophiste, je suis sans talent. J’éprouve de la honte lorsqu’il faut désavouer ce que j’ai écrit, tout en sachant que ce désaveu de soi-même a toujours fait partie de la sagesse et de l’efficacité asiatique, permettant de sauver la face aux autorités tout en assurant pour soi et pour son travail d’écriture le calme nécessaire. Les seigneurs et les chefs de clan orientaux apprécient à l’extrême la philosophie sentimentaliste telle qu’elle se déploie dans le “théâtre rénové”. Ils aiment voir les serviteurs inclinés et tout tremblants, deux abondants filets de larmes s’échappant de leurs yeux. C’est une tradition en Orient que de gouverner suivant son inspiration et non selon la loi. Avant moi, à mon époque, au cours des générations qui nous succèdent, on peut voir se jouer des scènes sentimentalistes à la manière du “théâtre rénové”. Elles provoquent chez moi cette sensation que Jean-Paul Sartre a nommée avec précision dans son livre La Nausée (1). Mais j’ai décidé d’apprécier ma vie selon sa dimension de bonheur et non selon sa longueur en mois et en années. J’ai décidé de vivre en être libre. Je me suis créé un soleil de la liberté qui brille même en ce marécage où je vis. A l’instant même où j’ai pris cette décision, je me suis aperçue de l’absolu changement qui s’était opéré en moi : j’étais heureuse, entièrement heureuse dans mon absolue et extrême solitude.

Serais-je folle ? Serais-je une fabulatrice s’efforçant de se forger des hallucinations pour se consoler, se leurrer ? Beaucoup le pensent. Ils ne peuvent pas croire à ma capacité d’être libre. Qui pourrait être libre lorsque tous vos amis autour de vous se voient confier la mission de vous surveiller et, qu’ils le veuillent ou non, se trouvent dans l’obligation de devenir des “mouchards” (2) qui vous suivent. Comment être libre lorsqu’un individu vient immédiatement s’asseoir derrière votre dos dans un café où vous n’êtes encore rentré que trois fois. Comment être libre, lorsque votre courrier, toutes vos communications avec vos proches sont contrôlés et saisis sans condition ?

Mais, je ne cesse pas de me trouver libre. Je dis ce que je veux dire, j’écris ce que je veux écrire, même si ces écrits n’obtiennent pas le permis d’impression. En 1991, au cours de mon internement, ma sensation de liberté est restée inchangée. Je réfléchissais à ma guise. J’étais émue par ce qui parvenait à mon cour et me faisait vibrer. Les séances d’interrogatoire et les trois hommes qui me faisaient face appartenaient à un autre monde. Celui-ci était sans rapport avec ma vie intérieure, ma véritable vie.

Ma cellule de prison était infectée d’innombrables moustiques. En tendant la main, je les capturais aussitôt. J’en ai attrapé des quantités. J’ai aussi attrapé des asticots noirs grouillant sur la vielle couverture de coton qui m’avait été distribuée, une couverture constellée des taches de sang séché laissées par des prisonniers atteints de dysenterie. Je chassais les cafards dans les jointures de mon lit. Avec leurs cadavres, je reconstituais la scène du passage de l’Elbe dans le film Libération de Bondarchuk et celle de la bataille de Waterloo dans le film sur Napoléon. Je comparais la mise en scène des Russes et des Français. J’ai toujours été une passionnée du septième art même si, en ces lieux de boue, de fange et de misère, le cinéma reste un rêve inapprochable et luxueux. Mais je n’ai pas cessé de rêver. Je continue à rêver. Avec des cadavres de punaises en guise de chars et de canons, des cadavres de moustiques et d’insectes en guise de troupes, je me remémorais les films qui, autrefois, m’avaient transportée. Et, je me souvenais de mon père, un homme que j’ai aimé dans le ressentiment et l’amertume, un père affectueux jusqu’à l’excès et sévère jusqu’à l’injustice. Il m’aimait mais ne pouvait s’arracher aux principes rigides du féodalisme. Je l’aimais mais il m’était impossible de ne pas être un enfant indocile. A ces moments-là, je ressentais son absence et son image envahissait toute mon âme m’entraînant loin de mes rêves artistiques. Je m’expliquais devant lui, je me disputais, je lui présentais mes reproches, nous pleurions ensemble dans l’amertume. Il arrivait que cela se produise en plein interrogatoire alors que mes oreilles entendaient des questions et que ma bouche y répondait tout comme une bande magnétique en train de se dérouler. L’expérience de ces jours-là m’a permis de comprendre comment Cervantès avait écrit Don Quichotte en prison. Certainement, Cervantès, dans son cadre particulier, était libre. Il était libre même dans sa cellule. Cette liberté de l’illusion était pourtant si intense que son environnement s’estompait, se fragilisait, s’anéantissait. Le monde extérieur est impuissant à exercer le moindre effet sur l’esprit et l’affectivité de l’écrivain. C’est une liberté créée par lui. La liberté de l’illusion ! Elle surgit du défi lancé à l’adversité extérieure. Elle survit comme un soleil spirituel, visible par une seule personne qui en est illuminée et réchauffée.

Cette liberté est le pouvoir suprême de l’écrivain, l’activité sacrée par laquelle il s’empare du feu. A part lui, personne ne peut la lui apporter. Elle est l’espace vital de l’écriture.

Ne faut-il pas avoir une bonne dose de naïveté ou de folie pour partir à la recherche d’une liberté de ce type ! Peut-être. Mais ou bien tu la refuses ou bien tu acceptes d’être libre afin de pouvoir écrire ce qui est digne de l’être. Ton talent. ? C’est Dieu qui te le donne. La liberté, ta confiance en toi et ta personnalité te la procureront. Sur cette terre, il y a des myriades de voies à suivre. Je ne suis ni assez sotte, ni assez perverse pour penser que la mienne est la seule juste. Mais je sais que, ici-bas, toutes les choses ont un prix, que l’homme se crée lui-même sa propre destinée en même temps qu’il en subit tous les retournements. Lors de la chute du mur de Berlin, on a pu croire que l’univers allait être ébranlé par les hurlements de joie des foules. La dictature du prolétariat s’effondrait. Les gens étaient tout décontenancés en apercevant le bleu de l’horizon, ce bleu lointain dont ils avaient toujours rêvé, le bleu de la liberté. A ce moment, des dizaines de milliers d’artistes de l’Union soviétique et des pays de l’Europe de l’Est se mirent à pleurer de joie. L’avenir des lettres et des arts s’ouvrait devant eux. Avec la liberté. Mais ces premières larmes de joie n’étaient pas encore sèches que déjà perlaient des larmes de douleur. Pendant un temps, le silence se prolongea avec l’embarras et le désarroi. Puis, ici et là, quelques personnes courageusement confièrent leurs tourments. Enfin, toute une foule reconnut publiquement son impuissance. Les écrivains ne pouvaient plus écrire. Je me souviens de la phrase d’une célèbre poétesse bulgare : “Toutes ces dernières années, nous avons souhaité écrire librement. Maintenant, la liberté est là, mais nous n’avons plus rien à écrire.”

Cet écrivain est venu plusieurs fois au Vietnam. C’est une femme intelligente et belle. Mon cour s’est serré à cette confidence. Mais je savais que je ne pouvais rien pour elle et pour tous ceux qui se trouvaient dans la même situation qu’elle. Car la liberté n’appartient pas à cette catégorie d’objets précieux que l’on peut cacher dans un palais trois cents ans durant, puis retrouver sans qu’ils aient perdu de leur valeur. La liberté ressemble à une existence humaine, à une compagne de voyage. Il faut apprendre à vivre avec elle, à se rendre digne d’elle.

Il y avait autrefois un empereur chinois qui n’aimait manger qu’une seule chair, celle d’un oiseau sauvage. Les mandarins de la cour envoyaient des émissaires chargés d’attraper les oiseaux de cette espèce pour ensuite les élever dans des parcs clôturés d’un filet. Dès leur naissance, on enfonçait ces volatiles à l’intérieur de tiges de bambous ne laissant dépasser à l’extérieur que leur bec. Ils étaient nourris de précieuses céréales et de fruits sains. En grandissant, leurs corps épousaient la forme oblongue des bambous, charnus mais sans ailes et les pattes atrophiées. Lorsque le cuisinier venait fendre les bambous pour en retirer les oiseaux afin de les faire cuire, ceux-ci étaient si pesants qu’après quelques petits bonds, ils s’effondraient et restaient étendus sur le sol. Tel est le principe de l’adaptation. Des dizaines de milliers d’artistes sous le régime socialiste ont été élevés comme les oiseaux de l’empereur de Chine . Quelle souffrance, quels regrets, en pensant à tous ces talents gaspillés et disparus.

Cependant, quelles que soient les circonstances, il subsiste toujours des oiseaux libres appartenant à la race de ceux qui fréquentent les cimes vertigineuses et ne trouvent leur bonheur qu’en les survolant, dans la pluie et la tempête, dans la solitude, dans l’orgueil de leur souffrance et de leur isolement. Je peux citer l’un d’entre eux : Boulgakov. Il n’a pas choisi le chemin de l’exil comme Soljenitsyne ou Pasternak. Il est resté en Russie. Maltraité des années durant, isolé, surveillé, il a fabriqué des briques, et accompli d’autres tâches épuisantes dans la construction pour survivre. Mais il a vécu en homme libre, il a écrit en homme libre. Ses ouvres, Cour de chien, Le maître et Marguerite, ont été rédigées à la lumière du soleil de la liberté, un soleil que lui-même, cette âme russe noble et forte, avait créé.

L’histoire de l’humanité, selon le calendrier chrétien, est sur le point d’achever ses 2000 ans, vingt siècles. Mais avant cela, l’Orient avait connu l’époque des Printemps et des Automnes et celle des Royaumes combattants (3), L’Occident a connu les croisades. L’humanité a eu ses tristesses et ses joies, ses souffrances et ses plaisirs. Elle a réfléchi. Chroniques et légendes ont été transmises, et se sont accumulées comme des couches alluvionnaires déposées dans le subconscient humain. Elles sont une part de notre avoir, mélangées aux germes de talent et de faiblesses que nos ancêtres et notre race ont déposés dans notre sang. Pour les écrivains, cet avoir spirituel est plus important que la fortune de ce monde. Au cours de mes années d’enfance, je ne sais par quelle faveur du destin, j’eus entre les mains une comédie sur Esope. Immédiatement, la figure de cet esclave m’a subjuguée. C’est lui qui m’a fait comprendre que la liberté était, pour l’homme, l’aspiration la plus intense, le défi le plus inexorable, à la mesure même de la hauteur de la personne humaine.

Les dernières paroles d’Esope avant qu’il ne se jette au fond d’un gouffre ont été celles-ci : “Pour ce qui est de l’amour, je suis encore trop jeune. Mais pour ce qui regarde la liberté, je suis déjà mûr. Quelle que soit la profondeur du gouffre, j’ai choisi ma voie. Je mourrai et, par cette mort, je deviendrai un homme libre”.

L’esclavage a disparu depuis longtemps mais l’aspiration à la liberté reste toujours aussi neuve. Pour les écrivains vivant en ces terres de boue et de fange, le personnage d’Esope est d’une grande utilité s’ils veulent user dignement de leur plume. La liberté réelle d’Esope, c’est la liberté de l’illusion de l’écrivain, condition nécessaire à la liberté authentique de la foule qui l’entoure.

C’est pourquoi, je vous en conjure, confrères écrivains, supportez les mauvais traitements, l’opprobre et les prisons, supportez même la mort. Mais, elle, ne l’abandonnez jamais !

(1)En français dans le texte

(2)En français dans le texte

(3) En Chine, à la période dite “des Printemps et des Automnes” a succédé, en 481 av. J.C., celle des “Royaumes combattants”