Eglises d'Asie

Karnataka : la police empêche des protestataires de troubler le déroulement de la consécration du nouvel évêque du diocèse catholique de Mysore

Publié le 18/03/2010




Le 25 mars dernier, quelque quinze minutes avant que ne commencent les cérémonies de consécration du nouvel évêque de Mysore, le P. Thomas Anthony Vazhapilly, la police a arrêté une quinzaine de laïcs appartenant à l’Association chrétienne catholique Kannada, qui, par leurs cris et des pancartes déployées, protestaient contre la nomination du nouvel ordinaire du lieu. Ils entendaient blâmer l’attitude du Saint-Siège qui en nommant à Mysore un responsable dont la langue maternelle n’était pas le kannada, la langue officielle de l’Etat, montrait qu’il faisait peu de cas du peuple de la région. Connaissant les intentions des protestataires, les responsables ecclésiastiques locaux avaient fait appel à la police. Celle-ci avait barricadé le périmètre extérieur de la cathédrale Saint Joseph de Mysore et soigneusement contrôlé et filtré les 3 000 fidèles venus participer à l’ordination épiscopale. Dès que les premières bagarres ont éclaté, les forces de l’ordre ont appréhendé les fauteurs de trouble et les ont placés dans des cars de police. La cérémonie s’est ensuite déroulée dans le bon ordre avec la participation de vingt évêques parmi lesquels le cardinal Varkey Vithayathil, et de 385 prêtres. Mgr Ignatius Paul Pinto, évêque de Bangalore, était le célébrant principal.

Quelque temps avant l’ordination, l’association des prêtres kannada avait exprimé ses doléances en soulignant qu’aucun des évêques des huit diocèses de rite latin de l’Etat n’avait le kannada comme langue maternelle. Sept d’entre eux étaient originaires de Mangalore au sud-ouest de l’Etat et parlaient le konkani. Quant au nouvel évêque, il était né dans l’Etat voisin du Kerala où la langue principale est le malayalam.

Le nouvel évêque âgé de 63 ans, qui a reçu sa nomination du Saint-Siège le 12 février dernier pour remplacer Mgr Joseph Roy, parti à la retraite, était recteur du grand séminaire Saint-Pierre de Bangalore où il enseignait la théologie morale. En réponse aux critiques, il a fait remarquer que bien que né au Kerala, il est un véritable “Kannadiga” (personne parlant kannada) parlant couramment la langue. Il est même le coéditeur d’un livre de lectures bibliques journalières en langue kannada. Ordonné prêtre dans l’Etat en 1964, il y a passé l’essentiel de sa vie. Cependant, a-t-il dit, il considère sa nomination comme “un appel à servir le peuple de Dieu sans tenir compte de sa religion, de sa langue et de sa culture”. Trois semaines avant son ordination, il avait aussi déclaré qu’il voulait travailler pour “l’unité à l’intérieur de l’Eglise et de la société au moyen du dialogue”.

Voilà plus de trois décennies que le clergé et le laïcat local demandent que soient nommés des évêques de langue kannada et que l’ensemble de la liturgie soit célébré en langue kannada. De très violents incidents ont eu lieu dans le passé à ce sujet. En mars 2000, une ordination épiscopale avait déjà été interrompue. Cependant, depuis que le mouvement en faveur de la langue kannara a pris de l’expansion, les deux langues kannara et tamoul sont employées dans les églises catholiques. Il faut remarquer également que, bien que beaucoup de prêtres et d’évêques de l’Etat ne soient pas nés dans l’Etat, pour la plupart, ils parlent le kannara et célèbrent en cette langue.

Le kannada est une langue dravidienne parlée par 66 % de la population du Karnataka, ancien Etat de Mysore auquel on a rajouté, en 1956, un certain nombre de districts où le kannada était majoritaire. Si l’on ajoute les “Kannadiga” d’un certain nombre d’Etats voisins, le total des locuteurs d’expression “kannada” s’élève à 42 millions. Selon les statistiques citées par l’agence Ucanews, la majorité des catholiques vivant dans le Karnataka sont ou bien de langue konkani, ou bien originaires du Tamil Nadu et du Kerala.