Eglises d'Asie

Face à la trop grande dépendance à Internet d’une partie des jeunes Coréens, des responsables catholiques s’inquiètent, estimant que l’Eglise n’a pas pris la mesure du problème

Publié le 18/03/2010




En Corée du Sud, pays de la planète où l’accès à Internet via le haut débit est le plus important et où par conséquent Internet est devenu extrêmement populaire et présent dans la vie quotidienne, de récentes études ont montré que plus du quart de la jeunesse avait développé vis-à-vis d’Internet un comportement de “drogués s’accompagnant de manifestations psychologiques typiques de l’accoutumance. Conscients de cet état de fait, un certain nombre de responsables catholiques s’inquiètent et appellent l’Eglise à élaborer une pastorale adaptée afin de ne pas laisser la jeunesse face à elle-même.

La plus récente étude en la matière date du 11 mars dernier. Menée par un service officiel de recherche dans les domaines de l’information et de l’éducation, elle indique que 26 % des jeunes âgés de 14 à 19 ans passent plus de trois heures par jour sur Internet et présentent des symptômes de confusion psychologique s’ils en sont privés. Pour le docteur Cho Jung-woo, responsable de l’étude, l’“accoutumance” à Internet, comparable à celle qui peut être constatée avec des drogues “classiques”, empêche ces jeunes de poursuivre normalement leurs études. De plus, 60 % des jeunes interrogés pour les besoins de l’étude ont admis avoir eu accès à des images pornographiques et s’être livrés à des “violences verbales” sur les sites de discussion en ligne (chat online).

Selon le P. Emilio Cheong Ung-mo, directeur du Bureau des communications sociales de l’archidiocèse de Séoul, si tant de jeunes sont ainsi devenus “drogués” d’Internet, c’est parce qu’ils sont victimes de l’“individualisme caractéristique de la société contemporaine” et ne considèrent plus les relations humaines comme indispensables à leur vie. “Tout phénomène d’accoutumance peut mener à la destruction de son humanité propre a-t-il remarqué et c’est pourquoi l’Eglise doit aider les gens à faire un usage judicieux des nouvelles technologies. Or, selon lui, l’Eglise en Corée aujourd’hui n’est pas prête à répondre à ce défi.

Le P. Ignatius Kim Min-su, secrétaire de la Commission pour les communications sociales de la Conférence des évêques, partage le point de vue du P. Cheong mais estime que l’Eglise, si elle n’a pas encore trouvé les moyens de réagir, a pris conscience de l’ampleur du problème. Le 25 février dernier, sa Commission a réuni un ensemble de prêtres, de professionnels des médias et de responsables de sites Internet ; des sous-commissions de travail ont été créées, à charge pour elles d’élaborer des propositions.

Selon Francisco Lee Jong-bum, spécialiste d’éthique des médias auprès de l’Institut pastoral de Corée, rattaché à la Conférence épiscopale, l’Eglise a du travail devant elle. Les sites créés par les diocèses, les paroisses et les mouvements catholiques sont certes très nombreux mais les jeunes ne s’y intéressent que marginalement, les trouvant “dépassés” ou “pas intéressants”. De ce fait, l’Eglise pense être en phase avec les jeunes car, elle aussi, a investi Internet mais cela ne suffit pas. Francisco Lee estime que, pour proposer une culture positive de l’Internet aux jeunes, les responsables catholiques devraient investir nettement plus dans les technologies de l’information. L’organisation protestante YMCA, qui avait coutume de s’adresser aux jeunes sur les problèmes de dépendance aux drogues et à l’alcool, a, depuis quelques temps, commencé à conseiller les jeunes Coréens sur les dangers de l’accoutumance à Internet.