Eglises d'Asie

Human Rights Watch a étabit un très lourd dossier de la répression sur les Hauts Plateaux du Centre-Vietnam

Publié le 18/03/2010




En matière de liberté religieuse, le gouvernement vietnamien paraît se plaire aujourd’hui à multiplier les signes contradictoires. Certains gestes accomplis par lui comme les contacts engagés avec les communautés protestantes non reconnues le 5 mars dernier (1), la rencontre du Premier ministre avec le patriarche du bouddhisme unifié dissident (2), le 2 avril suivant, ou encore l’abandon des sources classiques de son idéologie religieuse dans la résolution du Comité central lors du 7e plénum (3) sembleraient indiquer une volonté de conciliation et d’ouverture. Cependant, d’autres signes viennent contredire cette première orientation. En particulier, un très lourd dossier établi par l’organisation de défense des droits de l’homme Human rights Watch sur “l’escalade de la répression publié le 21 avril 2003 (4), attire l’attention sur la rééducation morale et idéologique ainsi que le très sévère contrôle policier auxquels sont soumises aujourd’hui les populations des Hauts Plateaux du Centre-Vietnam. Le dossier diffusé par l’association humanitaire américaine comprend un recueil de faits et un certain nombre de textes, à savoir de nouvelles directives gouvernementales et des plaintes envoyées par les victimes elles-mêmes.

Le document de Human Rights Watch signale en premier lieu le nouvel afflux de montagnards venant chercher asile au Cambodge. Durant la première semaine de février 2003, 86 montagnards du Vietnam ont traversé la frontière venant du district de Cu Se dans la province de Gia Lai. Ils ont été arrêtés par la police cambodgienne et ramenés de force au Vietnam. Au total plus d’une centaine ont subi le même sort depuis le début de l’année. Une grande partie d’entre eux ont été jetés en prison où ils ont été battus et torturés. D’autres se cachent dans les forêts du Cambodge sans alimentation ni médicaments. Par ailleurs, le gouvernement cambodgien a fait savoir qu’il fermerait le dernier camp de réfugiés géré par les Nations Unies à Phnom Penh dès que les derniers pensionnaires auront trouvé une résidence aux Etats-Unis.

Le nouveau rapport de Human Rights Watch note les efforts considérables accomplis par les autorités régionales pour assurer le contrôle idéologique, intellectuel et religieux de la population montagnarde. Les cérémonies de renonciation à la religion chrétienne, dénoncées déjà aussi bien par les instances catholiques que protestantes (5) se sont poursuivies en divers endroits des Hauts Plateaux. Une liste de trente deux villages où a eu lieu cette cérémonie est mentionnée par le rapport.

La dernière initiative prise par le gouvernement pour s’assurer la loyauté de la population locale se nomme “lê kêt nghia” (‘cérémonie d’engagement à la fidélité réciproque’). Deux directives gouvernementales publiées en documents annexes du rapport en décrivent l’objectif et le déroulement (6). Il s’agit de coordonner le village, ses activités, sa population et son encadrement avec les diverses instances locales du Parti et de l’Etat dont les représentants sont présents à la cérémonie. Le coeur de ce rassemblement est constitué par la lecture publique et la signature d’un engagement à la fidélité par les participants. Après les discours des autorités locales et des anciens du village, des rites de la culture traditionnelle sont accomplis.

La répression subie par les populations minoritaires des Hauts Plateaux du Centre-Vietnam est décrite concrètement à travers les diverses lettres émanant de dirigeants des communautés chrétiennes minoritaires, publiées en annexe du rapport. Elles font état de la persécution subie par les chrétiens jusqu’à la fin du mois de février 2003. Des responsables religieux locaux ont été battus, des églises ont été saccagées ou détruites, bibles et équipements d’Eglise ont été confisqués, des rassemblements religieux ou des déplacements en dehors des villages ont été interdits. De nombreux chrétiens ont été arrêtés ou jugés.

Il faut également signaler que, dans le cadre de la “normalisation” des ethnies minoritaires, des déplacements de population importants s’effectuent depuis le Sud-Vietnam et le Nord-Vietnam vers les Hauts Plateaux du Centre. Les principales agences de presse signalaient, le 22 avril dernier, le départ d’un groupe de 400 personnes résidant à Bên Tre, province populeuse du delta du Mékong vers la province de Dak Lak pour y être employés dans des fermes mettant en ouvre des projets économiques militaires. Il devait leur être fourni une maison et un hectare de terre à travailler. Au mois de mai, deux cents familles de Ben Tre rejoindront Dak Lak et 60 autres la province de Binh Phuoc, à la frontière du Cambodge. A Thai Binh, au Nord-Vietnam, il est prévu de déplacer vers les Hauts Plateaux, entre 2002 et 2005 un groupe d’environ 10 000 migrants.