Eglises d'Asie

Cachemire : des articles de presse évoquant des conversions accomplies par des chrétiens chez des musulmans mettent en danger les institutions catholiques

Publié le 18/03/2010




L’Eglise catholique de l’Inde vient de protester contre une série d’articles récemment parus dans la presse indienne accusant les chrétiens de convertir des musulmans dans l’Etat du Cachemire. Le porte-parole de la Conférence épiscopale, le P. Babu Joseph, a affirmé que les reportages publiés étaient surtout motivés par l’intention non avouée de troubler l’harmonie intercommunautaire existant dans la vallée du Cachemire.

Dans cette province où les heurts entre les rebelles et l’armée ont, depuis 1989, causé la mort de 70 000 personnes et fait fuir des milliers d’hindous, les chrétiens ont été épargnés par la violence et ont même pu continuer à se montrer actifs aussi bien dans le domaine de l’éducation que de la santé. Or, dans la série de reportages dont il a entamé la publication le 5 avril, le quotidien bien connu Indian Express affirme que, “malgré le bruit des armes et les violences sans fin, le Cachemire est le théâtre d’un discret mouvement de conversion de l’islam au christianisme”. Le journal anglophone affirme même que les groupes chrétiens eux-mêmes ont estimé le nombre de nouveaux convertis à plus de 10 000. Selon l’auteur des reportages, le nombre de conversions augmenterait régulièrement tout au long de la vallée du Cachemire où travaillent des évangélistes venant d’Eglises et de missions chrétiennes des Etats-Unis, de Suisse, d’Allemagne et des Pays-Bas. Cette évangélisation serait financée à partir de l’étranger grâce à des intermédiaires résidant à New Delhi. Un des articles cite même le P. Jim Borts, membre de la Société missionnaire catholique St Joseph de Mill Hill, travaillant au Cachemire depuis plusieurs décennies, comme l’un des prêtres les plus actifs qui serait à l’origine de nombreuses conversions.

Le porte-parole de la Conférence épiscopale s’est fermement élevé contre ces reportages et affirmé que l’accusation de prosélytisme portée par le journal était totalement infondée. Le christianisme, a-t-il dit, continue d’être une minuscule minorité dans la vallée du Cachemire. L’Etat de Jammu-et-Cachemire, seul Etat à majorité musulmane de l’Union indienne, abrite une population de dix millions d’habitants mais il n’existe pas de statistiques officielles concernant la répartition des différentes religions. La plupart des chrétiens sont des catholiques qui, selon les registres de l’Eglise, sont estimés à 15 000 fidèles, ce qui représente, en effet, un pourcentage très peu élevé de la population. Il est vrai, a affirmé le P. Joseph, que, depuis près de cent ans, les établissement catholiques en matière éducative et sanitaire, ont rencontré un vif succès auprès de la population. En outre, les catholiques se sont fait connaître par leur engagement dans des oeuvres en rapport avec le développement de la région. Ainsi, malgré le tout petit nombre de catholiques, leurs écoles, leurs hôpitaux, leurs églises sont éparpillés sur tout le territoire de la vallée. Cependant, jusqu’ici, l’équilibre démographique du pays n’a pas été substantiellement transformé. Durant les dernières années où le sang n’a cessé de couler, une harmonie sociale de bon aloi a réussi à se maintenir entre les musulmans et les chrétiens.

Les récents rapports diffusés par la presse risquent de vicier un climat jusqu’ici serein. Dans une déclaration prononcée le 28 avril dernier, l’évêque de Jammu Srinagar précisait que les militants du pays ne manifestaient pas d’agressivité contre l’Eglise et les missionnaires, sachant que ceux-ci n’étaient pas là pour convertir mais pour aider le peuple au travers de l’éducation et de divers services. “Nous n’avons eu jusqu’ici aucun problème, a-t-il conclu, car nous n’avons jamais rien fait contre la religion, la culture et les coutumes locales.” Cependant, le vicaire général du même diocèse a reconnu avoir été choqué par les allégations du journal indien, qu’il a qualifiées d’injustes et contraires à la vérité. Elles sont susceptibles de mettre les institutions chrétiennes en danger. Celles-ci, au cours des récentes années, ont joui de la sécurité et bénéficié d’une protection spéciale des forces en présence.